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Hommages / 03.01.2024

Les McCann (1935-2023)

Hard-bop, soul jazz, funk, R&B : au cours d’une carrière au long cours, le chanteur et pianiste Les McCann ne s’est interdit aucun détour, quitte à désarçonner la critique… 

Né le 23 septembre 1935 à Lexington dans le Kentucky dans une famille très musicale, il se fait remarquer dès le milieu des années 1950 quand son succès lors d’un concours de chant organisé par l’armée, qu’il rejoindra quelque temps plus tard, lui permet d’apparaître dans le show d’Ed Sullivan. Démobilisé, il s’installe à Los Angeles où il monte son propre trio. S’il décline une proposition de rejoindre l’ensemble de Cannonball Adderley, il accompagne quelque temps le chanteur Gene McDaniels avant de signer avec le label Pacific Jazz, où il publie en 1960 son premier album, “Les McCann Ltd. – The Truth”.

Jusqu’en 1967, il publie une douzaine d’albums pour le label, incluant des collaborations avec Teddy Edwards, Groove Holmes, Clifford Scott, Bumble Bee Slim et les Jazz Crusaders, devenant très populaire sur le circuit live – un peu à la manière d’un Ramsey Lewis, et décrochant même un petit succès instrumental avec The shampoo en 1963. Une anthologie de faces live de l’époque, “Never A Dull Moment! – Live From Coast to Coast 1966-1967”, est sortie en décembre 2023. En parallèle, il accompagne sur disque pour d’autres labels Lou Rawls (pour le classique Stormy monday) et Stanley Turrentine. 

Après un court passage sur Limelight, il signe avec Atlantic en 1968. Enregistré de façon impromptue à Montreux avec le saxophoniste Eddie Harris (et le trompettiste Benny Bailey), son premier album pour le label, “Swiss Movement”, sort en 1969 et est un énorme succès, au point que deux extraits, Compared to what, composition de Gene McDaniels chantée par McCann, et Cold duck time, un instrumental signé par Harris fassent leur apparition dans les classements de Billboard. Les deux hommes ne s’entendant pas, la collaboration sera de courte durée – le temps d’un second album, “Second Movement” et de quelques concerts, dont le fameux festival Soul To Soul au Ghana –, mais la carrière de McCann, qui développe alors à la fois son goût pour le chant et pour l’utilisation du piano électrique et des synthétiseurs, connaît un nouvel élan, avec des albums marquants comme “Talk To The People”, “Invitation To Openness,”, “Layers” et “Live At Montreux”.

Il est également associé aux débuts de la carrière de Roberta Flack, dont il écrit les notes de pochette pour le premier album et avec qui il enregistre en duo en 1970. Après avoir quitté Atlantic, il enregistre à la fin des années 1970 pour ABC et A&M.  Pendant cette période, il apparaît ponctuellement sur les disques d’autres artistes, de Frank Zappa au Gap Band.

S’il enregistre plus ponctuellement dans les années 1980, il continue à tourner régulièrement jusqu’à ce qu’une attaque en 1995 vienne réduire ses capacités au piano, sans cependant l’empêcher de chanter. C’est donc seulement en tant que chanteur qu’il publie en 2002 “Pump It Up”, avec une liste d’invités de luxe, de Maceo Parker à Marcus Miller en passant par Dianne Reeves et Bonnie Raitt. Il apparaît en invité de luxe sur des disques de Cash McCall, Bill Evans, Herbie Mann, les Blind Boys of Alabama ou Lou Rawls, tandis que sa musique est redécouverte par le monde du hip-hop et de l’électro, et samplée par Massive Attack, Snoop Dogg, Notorious B.I.G., IAM, Pete Rock & C.L. Smooth et bien d’autres.

Il tourne également à plusieurs reprises au milieu des années 2000 en Europe, et notamment à Porretta et au Paris Jazz Festival, avec les Soul Survivors, un all star comprenant Cornell Dupree, Ronnie Cuber et Jerry Jemmott, sa voix toujours puissante et sa bonne humeur communicative compensant les limites de son jeu de piano. Un disque de Noël, “A Time Les Christmas”, était paru en 2018. 

Texte : Frédéric Adrian
Photos © DR / Collection Gilles Pétard

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