;
Hommages / 12.01.2023

Jeff Beck (1944-2023)

De tous les guitaristes issus du british blues boom des années 1960, il est sans doute celui dont la musique s’est au fil des années le plus éloigné du blues, sans jamais cependant perdre le fil qui l’y reliait. 

Originaire de Londres, il découvre la guitare électrique encore enfant, la première fois qu’il entend la version de How high the moon par Les Paul. Influencé, comme la plupart de ses collègues, par B.B. King et Steve Cropper, mais aussi par le moins habituel Cliff Gallup – le guitariste de Gene Vincent –, il se met à jouer à l’adolescence, et ne tarde pas à se produire avec différents groupes, dont celui de Screaming Lord Sutch, tout en travaillant comme accompagnateur en studio. 

Début 1965, il est recruté pour remplacer Eric Clapton au sein des Yardbirds, mais le cadre étroit du groupe ne convient pas à son tempérament explosif, et il quitte l’ensemble dès l’année suivante pour monter son propre orchestre, avec notamment Rod Stewart au chant, qui publie deux albums en 1968 et 1969. Si le premier de ces disques, “Truth”, repose largement sur un répertoire blues musclé, pionnier du blues rock à venir, le second relève assez clairement du rock, comme le feront les suivants, enregistrés avec Carmine Appice et Tim Bogert. 

Au milieu des années 1970, il évolue vers un registre jazz fusion instrumental, avec quelques belles réussites – la reprise du Cause we’ve ended as lovers de Stevie Wonder… –, puis reviens vers la pop et le rock au milieu de la décennie suivante – un beau People get ready chanté par Rod Stewart. La suite de sa carrière le voit alterner les registres, ne s’interdisant même pas un détour inattendu par l’électro (l’album “Jeff ” en 2003), avec notamment deux beaux hommages à ses influences : “Crazy Legs”, dédié à Cliff Gallup, avec les Big Town Playboys et “Rock ‘n’ Roll Party: Honoring Les Paul” avec Imelda May, Gary U.S. Bonds et Trombone Shorty. Son dernier disque, plutôt calamiteux, le voyais s’associer avec Johnny Depp…

S’il ne revient que ponctuellement au blues de ses débuts, il ne néglige pas pour autant par la suite les musiques afro-américaines, apparaissant sur le “Talking Book” de Stevie Wonder (qui lui offre puis lui reprend, dans des conditions controversées, Superstition) et croisant la route sur disque d’Eddie Harris, Stanley Clarke, Tina Turner, Narada Michael Walden, Billy Preston, Diana Ross, Philip Bailey, Buddy Guy, Sly Stone, Beth Hart…

Texte : Frédéric Adrian
Photo © DR

Frédéric AdrianJeff Beck