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Hommages / 29.05.2022

Ils nous quittent : Ben Moore, Jimmy Thomas, Bobby Hendricks, Otis Jackson, Doug Jay, Robert Manthoulis…

Hommages aux artistes et personnalités disparus récemment.

Ben Moore (1941-2022)

Originaire d’Atlanta, Ben Moore grandit dans une famille où la musique occupe une place majeure : son père, Benjamin Moore, Sr.,  est le leader des  Echoes of Zion et Moore rejoint dès l’adolescence le groupe familial, avec lequel il chante et joue de la guitare. Il passe ensuite du côté séculier, rejoignant différents ensembles parmi lesquels Jimmy Tig & The Rounders, avec lesquels il fait ses débuts discographiques en 1963, avant de fonder avec Spencer James le duo Ben & Spence dont les enregistrements réalisés chez Fame sous la houlette de Dan Penn et Rick Hall sortent sous l’étiquette Bell puis Atlantic.

C’est Dan Penn qui lui propose à la fin des années 1960 de remplacer le Bobby Purify original – Robert Lee Dickey de son vrai nom – au sein du duo James & Bobby Purify. Ben Moore joue donc le rôle – toujours sous le pseudonyme original tout au long des années 1970 et jusqu’à la dissolution du duo dans les années 1980, participant notamment aux albums Casablanca et Mercury. Il reprend son nom à la fin des années 1970 pour lancer une carrière personnelle avec un premier album qui sort sous deux titres, “Slow Dancin’” et “Purified”. C’est également sous ce titre que paraît au début des années 1980 un premier album gospel qui lui vaut même une nomination aux Grammys. Un second album dans ce registre paraît un peu plus tard, mais Moore, affecté par des problèmes de santé qui le conduisent à perdre la vue, s’éloigne de la musique.

C’est Ray Charles, que lui présente un ami commun, qui le convainc de relancer sa carrière au début des années 2000. Il retrouve alors son pseudonyme et Dan Penn pour un nouvel album séculier, “Better to Have It”, qui paraît sous le nom de Bobby Purify. Le disque, bien accueilli, lui permet en particulier d’apparaître à Porretta en 2006. Il intègre ensuite les Blind Boys of Alabama, où il reprend le rôle de Clarence Fountain après le départ de celui-ci. Il participe à cinq albums du groupe à partir de 2008 et de “Down in New Orleans”, qui est salué par un Grammy, apparaît avec eux sur disque aux côtés de Taj Mahal, Dr. John ou le Preservation Hall Jazz Band et tourne régulièrement, apparaissant notamment à la Maison-Blanche en 2010 et pour quelques dates françaises (New Morning, Juan, Vannes) en 2017. Il était encore sur scène il y a quelques semaines avec les Blind Boys, dans le cadre d’une tournée partagée avec le duo malien Amadou & Mariam.

Jimmy Thomas (1939-2022)

Originaire d’Osceola, dans l’Arkansas, Jimmy Thomas se produit sur les scènes locales avec les Rock and Roll Trays quand il croise la route d’Albert King, qui lui suggère d’aller auditionner à East St. Louis pour le poste de chanteur des Kings of Rhythm d’Ike Turner, que vient de quitter Clayton Love. Avec les Kings of Rhythm, il fait ses débuts en studio en 1958 , en tant que choriste chez Cobra pour You keep on worrying me, puis en voix principale l’année suivante sur les deux singles Stevens crédités à Icky Renrut, Hey hey et Jack Rabbit.

Quand Tina rejoint l’ensemble et que naît la Ike & Tina Turner Revue, Jimmy Thomas est évidemment de la partie, contribuant à la création des chorégraphies de l’ensemble, et gravant ponctuellement quelques singles pour différents labels, parfois produits par Ike Turner, dont un, sous le nom de Jimmy & Jean, avec l’Ikette Wilhelmina Weaver. Paru en 1966 sur Mirwood, son Where there’s a will est considéré comme un classique sur la scène northern. Il apparaît également sur plusieurs albums live de la revue, “Live – The Ike & Tina Turner Show” de 1965 et “Live” de 1966. 

À la fin des années 1960, il quitte la revue et s’installe en Grande-Bretagne, où il se produit régulièrement, notamment dans le cadre d’évènements northern soul, et enregistre pour différents labels locaux, dont Parlophone, Spark et Contempo, pour qui il grave son premier album en 1973, “Abyss”. Il monte ensuite son propre label, baptisé en hommage à sa ville natale Osceola, sur lequel il publie ses propres disques, mais aussi des enregistrements d’autres artistes comme le batteur Tony Cook.

Il développe en parallèle une carrière de choriste tout terrain, enregistrant au fil des années aussi bien avec l’ancienne Sweet Inspiration Doris Troy qu’avec des artistes pop comme Lloyd Cole ou Miguel Bosé. Il prête également sa voix à différents groupes blues anglais, en particulier ceux d’Otis Grand, avec qui il enregistre plusieurs disques, et de Little George Sueref. Il était également apparu, en tant que choriste uniquement, sur “The Hard Way” de James Hunter en 2008. Plus discret depuis le début des années 2000, il avait néanmoins contribué quelques titres à des anthologies northern soul produites par Ian Levine, et prêté sa voix en 2016 à un album en public du Mark Olbrich BluesEnternity.

Robert Manthoulis (1929-2022)

Réfugié à Paris depuis les années 1960, le réalisateur d’origine grecque a dirigé différents films de fiction et documentaires sur son pays natal. Il est l’auteur en 1973 des films En remontant le Mississippi et  Le Blues entre les dents, écrit avec Claude Fléouter, dans lequel apparaissent B.B. King, Brownie McGhee, Sonny Terry, Mance Lipscomb, Robert Pete Williams, Roosevelt Sykes, Junior Wells, Buddy Guy, Bukka White… Il a également réalisé différents reportages pour la télévision française, parmi lesquels des séquences réalisées dans les studios Fame et Stax ou un portrait des Voices of East Harlem. 

Barbara Campbell Cooke (19??-2021)

Mariée à Sam Cooke de 1959 à son décès, puis, dans des conditions controversées, à Bobby Womack, Barbara Campbell est créditée comme autrice de certains des plus grands succès de Cooke et de chansons enregistrées par Jackie Wilson et Johnnie Taylor, mais elle ne servait que de prête-nom pour des raisons contractuelles pour différents auteurs : Sam Cooke, Lou Adler, Herb Alpert et Bobby Womack.

Andrew Woolfolk (1950-1971)

Ami d’adolescence de Philip Bailey, le saxophoniste Andrew Woolfolk rejoint Earth Wind & Fire à partir de l’album “Head To The Sky” en 1973 et reste au sein du groupe jusqu’au début des années 1990, apparaissant sur les principaux tubes et classiques de l’ensemble et contribuant à son jeu de scène dynamique. Il enregistre également avec Deniece Williams, Stanley Turrentine, Level 42, Ruby Turner, Josie James, Phil Collins et sur deux albums solo de Philip Bailey. 

Allan “Grip” Smith (1960-2022)

Clavier et producteur, Allan “Grip” Smith a enregistré avec Keith Sweat, Xscape et Dru Hill et tourné avec le S.O.S. Band, Jagged Edge, Keith Sweat, Silk et Xscape. 

Dave Usher (19??-2022)

Ami et collaborateur occasionnel de Dizzy Gillespie, Dave Usher travaille dans les années 1950 comme directeur artistique chez Argo, la filiale jazz de Chess, pour qui il produit notamment les Moonnglows et Ramsey Lewis en plus de différents albums jazz… avant de devenir un spécialiste reconnu du traitement des marées noires. 

Bobby Hendricks (1939-2022)

Originaire de Colombus, dans l’Ohio, Bobby Hendricks intègre dès l’âge de 16 ans les Crowns, un groupe vocal local, avec de rejoindre différents ensembles du même type dont les Swallows et les Flyers, un groupe emmené par l’ancien Drifters Bill Pinkney, avec qui il fait ses débuts discographiques en 1957. Quelques mois plus tard, quand Pinkney réintègre les Drifters, Hendricks l’accompagne. Il participe à quelques séances, assurant le chant principal sur une poignée de titres dont le petit tube Drip drop, mais quitte le groupe au bout de quelques mois pour se lancer dans une carrière solo. Celle-ci commence brillamment avec le succès Itchy twitchy feeling, qui atteint la 5e place du classement R&B et le 25e rang du Hot 100, mais la réussite ne se prolonge pas. S’il continue à enregistrer régulièrement jusqu’au début des années 1960, il intègre également la version des Drifters montés par Bill Pinkney après son départ du groupe original, avec qui il se produit régulièrement jusqu’à la fin des années 2000. Installé à Los Angeles à la fin des années 1970, il monte son propre groupe, qui tourne régulièrement sur le circuit de la nostalgie jusqu’à ce que sa santé lui impose de prendre sa retraite en 2018. 

Otis Jackson (1944-2022)

Originaire de Shreveport en Louisiane, Otis Jackson croise la route de Tina Turner, Bobby “Blue” Bland, et Johnnie Taylor avant de lancer sa carrière personnelle dans les années 1970 avec une série de 45-tours pour différents labels, dont le petit classique Beggin’ for a broken heart / Message to the ghetto, produit par H.B. Barnum, qui sort en 1974 sur Mega. Il profite du succès de ses enfants, les producteurs Madlib et Oh No, pour relancer sa carrière dans les années 2000 avec un album, “The Art Of Love”. Une anthologie de ses singles est annoncée pour l’année prochaine par Now-Again Records. 

Doug Jay (1953-2022)

Originaire de Floride, c’est sur la scène de Washington que le chanteur et harmoniciste Doug Jay entame sa carrière. Il fait ses débuts discographiques à la fin des années 1970 avec les Allstars From Charlottesville, Va. et intègre le groupe de Bob Margolin. Il s’installe à San Francisco au début des années 1990 et y monte son propre ensemble. Il enregistre son premier album personnel, “Until We Meet Again”, suivi d’un deuxième en 2001, “Get It While It’s Hot”, auquel contribuent Big Joe Maher et Alex Schultz, et devient un habitué des tournées européennes, en particulier avec les autrichiens du Mojo Blues Band. Il finit par s’installer en Allemagne où il monte un nouveau groupe, les Blue Jays, avec des musiciens locaux dont le guitariste Jimmy Reiter. Il tourne régulièrement dans toute l’Europe, y compris, ponctuellement, en France et grave deux albums pour Crosscut sous le nom de Doug Jay & The Blue Jays. Il avait également collaboré avec différents musiciens locaux comme B.B. & The Blues Shacks, Kai Strauss et son protégé Jimmy Reiter avant de retourner s’installer aux États-Unis. 

Jewell (1968-2022)

Originaire de Chicago, la chanteuse se fait remarquer dans les années 1990 en prêtant sa voix à différents classiques hip-hop parus sur l’étiquette Death Row, de Snoop Dogg à Dr. Dre et enregistre quelques titres sous son nom, en particulier une reprise du Woman to woman de Shirley Brown qui connaît un certain succès en 1994.

Tommy McConnell (1955-2022)

Originaire de New York, c’est sur les fauteuils de l’Apollo que Tommy McConnell découvre la musique, avant d’apprendre la batterie. Au milieu des années 1970, il rejoint le groupe Skyy emmené par Solomon Roberts Jr et les sœurs Dunning et participe à leurs débuts discographiques pour Salsoul à la fin des années 1970 et aux albums suivants. Outre son rôle de batteur, responsable en particulier de la partie de batterie spectaculaire qui ouvre le tube Call me, il signe quelques titres comme Let’s celebrate et, avec le clavier Joe Williams, le numéro un R&B Start of a romance, qui permet de relancer la carrière de Skyy à la fin des années 1980.

Mickey Gilley (1936-2022)

Figure légendaire de la scène country, Mickey Gilley avait enregistré des versions country à succès de classiques R&B et soul comme Lawdy Miss Clawdy, Stand by me, You’ve really got a hold on me ou I’m your puppet et chanté en duo avec Ray Charles sur son album “Friendship”.

Textes : Frédéric Adrian