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Hommages / 18.02.2020

Henry Gray (1925-2020)

Avec le décès d’Henry Gray, c’est un des derniers liens avec la scène blues de Chicago des années 1950 qui disparaît. 

Né à Kenner en Louisiane, installé avec sa famille à Alsen, une petite communauté située à proximité de Baton Rouge, il découvre le piano dans son enfance, grâce à une voisine, Mrs. White. Si le blues n’est pas le bienvenu chez lui, il l’est chez Mrs. White et, dès la fin de son adolescence, Gray se produit dans un club local. Soldat dans le Pacifique pendant la Seconde Guerre mondiale, il s’installe peu après la fin des hostilités à Chicago, dont il ne tarde pas à explorer la scène musicale.

Découvert par Big Maceo – comme Otis Spann ou Johnny Jones avant lui –, il bénéficie de son parrainage, qui influencera son style de jeu. Quand Big Maceo subit une attaque qui lui interdit d’utiliser son bras gauche, c’est Henry Gray qui le supplée pendant les concerts, assurant la main gauche. Il rejoint également le Red Devil Trio du guitariste Little Hudson, mais c’est au service de Jimmy Rogers qu’il fait ses débuts sur disque, en 1952, sur The last time. Cette séance lui ouvre les portes des studios de la ville, et il se fait entendre, entre autres, derrière Billy Boy Arnold (I wish you would), Junior Wells (Hoodoo man), Bo Diddley (I’m a man), Morris Pejoe, Robert Nighthawk, Homesick James, Little Walter, Jimmy Reed… Il grave aussi quelques faces personnelles pour Chess et Parrot, mais celles-ci restent alors inédites. C’est avec Howlin’ Wolf qu’il lie le partenariat artistique le plus fort et le plus durable : à partir de 1956 et jusqu’en 1968, Henry Gray l’accompagne sur scène et sur disque, et son piano se fait entendre sur de nombreuses faces de cette période : Commit a crime, Just like I treat you, I ain’t superstitious

Revenu en Louisiane suite au décès de son père, il ne tarde pas à s’imposer sur la scène blues de Baton Rouge, apparaissant en vedette sur les deux anthologies publiées en 1970 par Excello et Arhoolie (respectivement “Swamp Blues” et “Louisiana Blues”). Habitué des tournées européennes, c’est en Allemagne qu’il grave son premier album personnel, “They Call Me Little Henry”, en 1977. Il lui faut attendre une décennie de plus pour publier un album américain, “Lucky Man”. Tout en participant à différentes séances pour d’autres (Tabby Thomas, Clarence Edwards…), sa notoriété se répand un peu plus à partir des années 1990, notamment avec l’appui du groupe Short Fuse de Steve Coleridge, avec qui il publie en particulier en 1996 l’album “Don’t Start That Stuff”, publié par le label français Last Call.

Visiteur régulier des scènes françaises avec ses Cats (emmenés par le guitariste Paul Sinegal), il n’enregistre que rarement sous son nom et souvent pour des petits labels, “Plays Chicago Blues” pour Hightone faisant figure d’exception en 2001. Il continue néanmoins à participer à de nombreuses séances, notamment pour Bob Corritore, et à se produire quasiment jusqu’à la fin de ses jours.

New Orleans, 6 mai 2000. © Jacques Périn
Avec Bob Corritore et Bob Stroger, Chicago, 2017. © Brigitte Charvolin

Texte : Frédéric Adrian

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