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Live reports / 12.01.2020

You & the Night & the Music 2019, Salle Pleyel, Paris

16 décembre 2019.

Pour la dix-septième fois, la radio TSF donnait rendez-vous aux amateurs de jazz pour sa traditionnelle célébration de l’année jazz, désormais bien installée à Pleyel. Malgré les difficultés de transport, la salle est comble pour accueillir une copieuse affiche, avec rien moins que dix-huit groupes annoncés, des stars installées aux découvertes. Seule faiblesse du programme : l’invraisemblable sous-représentation féminine, avec seulement deux femmes en vedette, la chanteuse Sarah McKenzie et la saxophoniste Géraldine Laurent, une situation incompréhensible après la place occupée ces derniers mois par des artistes comme Nubya Garcia, Melissa Aldana ou Naïssam Jalal…

Traditionnellement dévolue à un big band – le Sacre du Tympan ou l’Amazing Keystone Big Band ont en particulier assuré la fonction –, l’ouverture a été cette année confiée à l’orchestre de Louis Cole. Accompagné de huit musiciens et de deux choristes (dont sa partenaire au sein de Knower Geneviève Artardi) aux looks très étudiés, Cole fait le show et désarçonne d’entrée le public avec son jazz funk électro que même quelques problèmes de son ne peut perturber. Il finit néanmoins par emporter l’adhésion des spectateurs à partir du moment où Cole abandonne ses claviers au profit de la batterie. 

La suite de la soirée joue dans un domaine plus classique, mettant pour une fois l’accent plus sur un certain classicisme plus que sur des propositions innovantes. Cela n’enlève rien à la qualité de la musique présentée, de la patte élégante du pianiste Fred Hersch, invité d’honneur de la soirée et qui semble convoquer dans ses doigts toute l’histoire du trio pianistique, à l’exaltant Yes! Trio – Ali Jackson à la batterie, Aaron Goldberg au piano, Omer Avital à la contrebasse, qui mérite bien son point d’exclamation. À l’applaudimètre, c’est évidemment la star Ibrahim Maalouf qui triomphe, juste après l’entracte, avec un medley à rallonge de titres de son dernier album sous influence latin jazz. Si Maalouf laisse parfois son talent d’ambianceur prendre le pas sur la musique, impossible de résister aux interventions du saxophoniste cubain Irving Acao… La remise à Maalouf d’un disque de platine – cent mille exemplaires vendus – pour son album “10 Ans de Live” sorti à l’automne 2016 ne fait que confirmer la place majeure qu’il a conquis dans le cœur du public français.

Sans atteindre – pour l’instant ! – le même niveau de notoriété, le pianiste Roberto Fonseca est également très attendu et ne déçoit pas, surtout quand Ibrahim Maalouf rejoint son trio pour un morceau très enlevé. Moins exposé médiatiquement, l’accordéoniste Marc Berthomieux emporte le public grâce à son “tube” – à l’échelle de TSF, tout du moins – Le bal des mondes, repris à pleine voix par une salle conquise. Quant à Erik Truffaz, il continue vingt-cinq ans après ses débuts discographiques à creuser le même sillon, sans que l’absence impromptue de son groupe – remplacé par le piano d’Eric Legnini, toujours pertinent – ne vienne l’en détourner. Côté jeunes talents, le saxophoniste Plume, associé pour l’occasion à Géraldine Laurent, confirme les échos enthousiastes à son sujet, tandis que Theo Croker, petit-fils de Doc Cheatham, joue à merveille son rôle de trublion à mi-chemin entre la tradition et la modernité.

Peut-être moins riche en surprise que les éditions précédentes mais pas moins réussie pour autant, la soirée se termine en beauté avec le retour pour un dernier morceau d’un Louis Cole qui aurait visiblement volontiers prolongé les réjouissances et qui constitue le parfait bouquet final pour symboliser la fin d’une année riche en musiques et annoncer la suivante…

Texte : Frédéric Adrian

Frédéric AdrianjazzLouis ColeSalle PleyelTSF