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Chroniques / 21.04.2023

Eddie 9V, Capricorn

Sur ses albums précédents, Eddie 9V faisait preuve d’un goût marqué pour un blues bien trempé, tant dans ses compos que ses reprises. Il s’éloigne ici de cette veine, privilégiant le versant soul déjà sous-jacent auparavant. 

Néanmoins, le blues est bien présent dans la reprise de Bob Dylan, Down along the cove (avec sa juteuse guitare slide) ou les originaux I’m going down (sur les pièges de la vie nocturne) et Are we through (intro à la guitare et falsetto aérien). Mais le sound, l’esprit, évoquent plutôt celui des studios Hi à Memphis. C’est patent lorsqu’Eddie reprend ‘Bout to make me leave home à la manière de Syl Johnson ou clôt l’album sur un I’m lonely que n’aurait pas boudé Al Green. Dans cette veine, d’autres titres se détachent : le très dansant Beg borrow and steal d’ouverture, suivi par Yella alligator, au swamp funk imagé, ou encore How long, au refrain accrocheur et à la guitare conquérante.

Outre la qualité de l’accompagnement (ses habituels complices dont son frère Chad Mason aux claviers, les cuivres…), ce qui frappe tout au long de l’album, c’est l’intensité vocale déployée par Brooks Mason (son vrai nom), digne de la ferveur vocale du gospel, à la manière d’un Eli “Paperboy” Reed. Le gospel, le vrai, fait l’objet d’une brève et superbe incursion, une version de Mary don’t you weep curieusement non créditée. Eddie 9V ne semble pas y participer et seul le communiqué de presse en révèle la responsable : Khristie French. 

Autre incongruité, avoir intitulé l’album “Capricorn” du nom du studio où il fut enregistré, mais celui-ci, réhabilité en 2010, servit surtout de cadre à des groupes de rock sudiste. Mieux vaut saluer cet élargissement de l’horizon musical d’Eddie 9V à une southern soul généreuse, bien maîtrisée, en attendant de pouvoir juger sur pièce sur une scène hexagonale.

Jacques Périn

Note : ★★★★
Label : Ruf
Sortie : 27 janvier 2023

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