En intitulant son nouvel opus “Rawer Than Raw” Bobby Rush fait référence à l’album “Raw” de 2007 qui, pour la première fois, le présentait quasiment seul (un guitariste l’épaulait sur seulement trois titres). Ici, il n’a que sa voix, sa guitare, son harmonica et son pied pour marteler le rythme. Il s’agit, nous dit-on, de la réunion de morceaux gravés au cours des cinq dernières années, mais l’unité de ton et de style est telle qu’on les pense issus d’une même séance. 

Down in Mississippi donne le ton. C’est dans cet État qu’il réside depuis les années 1980 et de là que viennent les musiciens qu’il a côtoyés et qui l’ont influencé. Qu’il s’agisse des cinq titres qu’il signe ou des six reprises, il est d’un naturel étonnant. Sans ostentation, il marque de son empreinte ce répertoire classique et cent fois entendu. Sa façon lancinante et syncopée d’insuffler un groove à la guitare est irrésistible et ses parties d’harmonica ont beaucoup gagné en expressivité au fil des ans. Ses emprunts à Howlin’ Wolf, Muddy Waters, Sonny Boy ou Elmore James n’ont rien d’apprêtées, il en change les paroles, ajoute des strophes, en oublie d’autres. Ça devient du pur Bobby Rush ! On l’attendait moins reprenant Skip James, il s’approprie superbement Hard time killing floor, lui donnant une dramatique actualité.

Peut-être est-ce la conséquence de sa mise en quarantaine pour suspicion de coronavirus qui a poussé Bobby Rush à publier ce nouvel album, moins d’un an après “Sitting On Top Of The Blues” (et quelques mois après la parution en France du DVD “Bobby Rush Blues Revue”). Toujours est-il qu’il nous donne une nouvelle occasion d’apprécier son talent exceptionnel, d’une évidence et d’une simplicité précieuses.

Jacques Périn

Note : ★★★★
Label : Deep Rush
Sortie : 28 août 2020