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Live reports / 06.07.2023

Sandra Nkaké, Le Café de la Danse

15 juin 2023.

Il y a du monde pour entendre pour la première fois en concert les morceaux du nouveau et merveilleux album (Le Pied dans Soul Bag) de Sandra Nkaké, “Scars”, paru quelques semaines plus tôt.

Peut-être même un peu trop pour la capacité de la salle, configurée essentiellement en places debout (au mécontentement marqué de certains spectateurs) et faiblement climatisée malgré la chaleur. Les conditions d’écoute ne sont donc pas optimales, et quelques membres du public quitteront même la salle avant la fin du spectacle…  

Quoi qu’il en soit, le show must go on, et c’est Sandra Nkaké elle-même, en civil, qui entre en scène à vingt heures pile pour introduire l’artiste qui fera sa première partie, la chanteuse Frieda, qu’elle présente comme sa sœur – le thème de la sororité sera d’ailleurs un des fils rouges de la soirée, tant musicalement que dans les discours. La chanteuse, qui se produit régulièrement au moins depuis 2020, prépare un premier album à venir prochainement, et c’est le répertoire de celui-ci qu’elle propose ce soir.

Frieda © Maxim Francois
Frieda © Maxim Francois

Même si l’ancrage dans le R&B contemporain est plus marqué dans son cas, sa musique et son esthétique très soignée sont tout à fait cohérentes avec l’univers de la vedette de la soirée, et elle n’a aucun mal à emporter le public, même si le fait de chanter accompagnée uniquement d’une bande enregistrée limite logiquement l’impact de sa prestation. Sans surprise, d’ailleurs, c’est une jolie ballade en français jouée en bonne partie au piano qui se révèle la plus marquante. 

Mais Frieda a du charisme et de la présence, et elle parvient sans grand mal à occuper l’espace et à faire oublier l’absence d’accompagnateurs à ses côtés, d’autant que son répertoire ne manque pas de chansons accrocheuses qui donnent envie d’en entendre plus, sur disque et sur scène !

Le temps d’un court entracte et c’est au tour de Sandra Nkaké d’entrer en scène, accompagnée de ses quatre musiciens emmenés par le fidèle Jî Drû : Jérôme Perez à la guitare, Mathilda Haynes à la basse et Frédéric Jean à la batterie, soit le cœur des participants à l’album. Comme sur celui-ci, c’est avec La voix éraillée – peut-être la plus belle chanson francophone depuis le début de l’année – que commence le concert. “Scars” était un disque de studio, avec un usage important des effets et de l’électronique, mais le choix est fait ici de pas tenter de le reproduire à l’identique et d’en proposer une déclinaison plus organique – il n’y a même pas de claviers – qui repose sur la solidité des chansons et sur la voix. 

Sandra Nkaké © Seka
© Seka
Jî Drû et Mathilda Haynes © Seka
Mathilda Haynes © Seka
Sandra Nkaké et Frédéric Jean © Seka
© Maxim Francois
Mathilda Haynes, Sandra Nkaké, Frédéric Jean et Jérôme Perez © Maxim Francois

Celle de Nkaké, évidemment, toujours aussi puissante et envoûtante, mais aussi celle de ses partenaires de scène, soit sous forme de seconde voix assurée par Jî Drû, soit sous forme de chœurs assurés dans des configurations variées par les musiciens. Prolongement naturel du chant, la flûte de Jî Drû occupe sa place singulière dans l’univers musical de la chanteuse.

Sans respecter l’ordre précis du disque, le programme de la soirée en traverse quasiment tout le répertoire, du puissant Rising up au très beau Terre rouge. Si la tonalité des chansons est globalement sombre, les interventions parlées de Sandra Nkaké ne manquent ni d’humour ni de colère pour les mettre en perspective et en contexte. Très clairement, elle ne chante pas pour passer le temps, et ses engagements, notamment pour un féminisme inclusif, sont un élément majeur de son univers artistique.

Au-delà de la musique, le spectacle est soigné, avec une mise en scène discrète mais efficace, reposant en particulier sur des lumières très réussies, un décor simple et élégant – un rideau de fils en fond de scène – utilisé de façon particulièrement frappante sur Terre rouge et des costumes coordonnés, apparemment peu adaptés à la chaleur ! En rappel, Sandra Nkaké revisite le très beau Like a buffalo, extrait de l’album “Nothing For Granted”, puis s’offre un final a cappella, portée par les voix de ses musiciens et de tout le public, au sein duquel elle se plonge, avec son groupe, tout en continuant à chanter. 

Quelques dates dans cette configuration sont d’ores et déjà annoncées pour l’été et ensuite jusqu’au début de 2024 dans toute la France, et devraient permettre au plus grand nombre, bien au-delà du cercle habituel des amateurs de jazz et de soul, de découvrir ou de retrouver sur scène celle qui est sans doute une des plus grandes voix du moment. 

Texte : Frédéric Adrian
Photos © Seka et Maxim Francois
Photo d’ouverture © Maxim Francois

© Maxim Francois
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© Seka
© Seka
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