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Live reports / 01.12.2023

Robert Finley + Lowland Brothers, La Maroquinerie, Paris

21 novembre 2023.

Si l’actualité reste malheureusement aussi sombre que cette grisaille automnale qui plombe le moral de beaucoup, il faut croire qu’en ce mardi pluvieux de novembre, le meilleur antidépresseur à disposition était de faire un corps à corps dans une Maroquinerie pleine à craquer pour venir applaudir l’irrésistible Robert Finley au milieu d’une tournée française à “presque” guichet fermé. 

C’est à un groupe cher à Soul Bag qu’il revient d’ouvrir cette soirée. Éclairage soigné, salle presque comble (chose rare pour les premières parties), les cinq faux frangins de Lowland Brothers, chemises denim à boutons nacrés et Wrangler vintage ajustés comme il faut, prennent place et ouvrent les hostilités avec Share your load. Intro catchy, riff camarade appuyé d’une rythmique simple et directe, le ton est donné, les Brothers joueront fort, et même pas mal rock ce soir.

Des parties de claviers beaucoup plus appuyées que ce qu’on leur connaissait, la basse de Max Genouel joliment saturée et la frappe puissante du batteur Gille Delagrange qui les accompagne depuis maintenant plus d’un an. Aucune guitare folk/acoustique n’est de sortie pour ce chauffage de salle en règle. Que les habitués du groupe se rassurent, même avec ce parti pris rock et ses quelques glissades psyché (superbe version du classique de The Relatives, Don’t let me fall), harmonies vocales et ballades se glissent dans cette courte prestation. Que les habitués se rerassurent : les nouveaux titres entendus ce soir annonceraient même un nouvel album pour 2024. On va mettre nos équipes sur le coup. Quoi qu’il en soit, au bout des huit titres exécutés, Nico Duportal et ses acolytes semblent ravis d’avoir ouvert deux jours de suite pour l’homme du bayou.

Lowland Brothers
Lowland Brothers

C’est la pause, les lumières se rallument, il fait chaud, la logique voudrait qu’on aille prendre un peu l’air, mais non, la fosse reste compacte. Si les techniciens s’activent, le public, lui, ne semble pas vouloir bouger d’un centimètre de peur de louper l’entrée en scène du chanteur louisianais. 

Si vous êtes lecteur ou lectrice régulier de ces pages, vous avez peut-être vu passer le compte rendu de notre collègue Christophe Mourot publié il y a quelques jours sur la prestation de Finley du côté de Saint-Nazaire. La suite de l’histoire est donc devant nous avec The Sierra Band, ce même trio de jeunes musiciens anglais qui, sur fond de rythmique nerveuse et enthousiaste, annonce la vedette qui arrive dans un costume flamboyant au bras de sa fille qui le guide jusqu’au micro. 

Une déclaration d’amour assez directe à l’intention de la salle qui jubile et c’est Sharecroper’s son que le country boy de 69 ans entonne avec son génial grain de voix traînant. Puis viendront Sneakin’ around, Miss Kitty, Get it while you can, Souled out on you, Tell everybody… Dans un savant dosage où l’on reconnaît une pioche équitable dans les trois albums parus sous étiquettes Easy Eye Sound. Finley cause pas mal entre les titres, y allant de ses succulentes punchline ou autres petites histoires introduisant brièvement les titres qu’il interprète, quitte à s’emmêler un peu les pinceaux parfois. Le naturel des débutants pourrait-on dire quand on sait que notre homme a publié son 1er album en 2016. 

Olli Hopkins, Charlie Love, Robert Finley, Christy Johnson 
Robert Finley, Liam Hart, Christy Johnson

On approche l’heure de concert quand il invite sa fille Christy Johnson à prendre le lead. Comme elle le fit à Saint-Nazaire, c’est un joli doublé inspiré. Le medley Etta James/Chris Stapleton (I’d rather go blind/Tennessee whiskey) et l’immense tube de Betty Wright (Clean u p woman) qui semble plaire beaucoup à papa. Public aux anges et retour en position centrale pour Finley, banane en travers du visage et chapeau de nouveau vissé sur ses cheveux d’argent.

On a heureusement le droit à une version de You got it (And I need it), titre majeur extrait de “Black Bayou” qui joué ainsi en live perd un peu de ce lazy groove entendu sur disque. Un adieu rapide sous un tonnerre d’applaudissements… Et un rappel en règle ou il conclura la soirée avec cette longue et truculente histoire métaphorique de chasse à l’alligator (Alligator bait). Un truc issu de la culture afro-américaine typiquement sudiste qui nous rappelle que si monsieur Finley amuse la galerie avec son Stetson géant et ses boots en croco, il n’en est pas moins une formidable  figure de ce southern sound qu’on aime tant. 

Repu de musique et de bonnes vibrations, on grimpe à l’étage se rafraîchir et tombe sur 30 mètres de queue pour se faire signer vinyle, tee-shirt, place de concert… Prendre une photo ou simplement serrer la pince d’un chanteur à qui l’on souhaite de tout cœur de belles années de musique et de rencontres.

Texte : Julien D.
Photos © Wilfried-Antoine Desveaux

Christy Johnson