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Live reports / 28.03.2023

Luke Winslow-King + Wacky Jugs, L’Odéon, Tremblay

18 mars 2023.

C’est après les avoir vus en août 2021 aux Rendez-vous de l’Erdre que Michel Rémond a décidé de programmer les Wacky Jugs à Tremblay. Avant donc qu’ils ne soient proclamés en 2022 « champions du monde du blues » après leur prestation à l’International Blues Challenge à Memphis, comme ils s’amusent à le dire. Pourtant le groupe breton semble bien éloigné des critères en vogue sur la scène blues actuelle. Leur truc à eux, c’est le blues d’avant-guerre et, en particulier, celui que pratiquaient les jug bands de Memphis. Ce qui n’a sans doute pas échappé au jury de l’IBC !

Au chant, à la guitare électrique (format ukulélé) et à la mandoline, Jack Titley donne le ton avec Gurvan Leray à l’harmonica, Rascal Cuff à l’accordéon boutons, Jonathan Caserta à la contrebasse et Rowen Berrou à la batterie. Le groupe est compact, soudé, et privilégie le collectif, d’où s’échappent des solos de guitare, d’harmo ou d’accordéon. Il est difficile de distinguer les reprises (Washboard Sam, John Hurt, Memphis Jug Band…) des originaux, tant la même flamme les animent, mais on prend un plaisir particulier à l’écoute de leur version de 4th Street mess around et ses chœurs emballants ou de l’instrumental endiablé Wacky stomp. À l’esprit des jug bands, Wacky Jugs ajoute sa touche personnelle, teintée de folk, de musique celtique et d’une french touch soulignée par l’accordéon.

Jonathan Caserta, Jack Titley, Rascal Cuff
Jack Titley
Gurvan Leray

On change de registre avec Luke Winslow-King. Cet Américain natif de Cadillac, Michigan, longtemps résidant de La Nouvelle-Orléans s’est maintenant posé en Espagne tout en s’associant au guitariste italien Roberto Luti. Lorsque le cachet le permet, comme ce soir, ils sont épaulés par deux autres Italiens, Simone Luti à la basse et Piero Perelli aux drums. Winslow-King ne pratique pas un blues pur et dur, mais excelle dans ce qu’il faut nommer l’americana, cette musique typiquement étatsunienne qui prospère sur un terreau rock-blues-country, avec quelques intrants gospel, funk ou soul. 

Roberto Luti, Simone Luti, Piero Perelli, Luke Winslow-King
Roberto Luti, Simone Luti

Il puise son répertoire dans ses nombreux albums (Slow Sunday June ; Hurry crab, bien funky ; la délicate ballade Leaves turn brown; Leghorn woman, lay down à la Tony Joe White ; Farewell blues, plus country que blues…), mais il nous réserve aussi quelques nouvelles compositions, comme How could I forget, née de la pandémie, l’humoristique Sweet peaches ou une autre où il est question de fast trains. S’il séduit par son chant assuré et convaincu, les parties instrumentales finissent de convaincre. Winslow-King est un excellent guitariste mais Roberto Luti est, lui, exceptionnel, toujours captivant. Le plus souvent à la slide, mais pas que. Lorsque les deux guitares dialoguent, on se régale, d’autant que la rythmique reste prompte à relancer les débats. 

Une belle soirée, juste à la marge des sentiers battus, qui témoigne de la richesse des musiques raciniennes. À noter que le dernier concert blues de la saison 2022-23 de l’Odéon aura lieu le 15 avril prochain avec Whitney Say et Laura Chavez à la guitare.

Texte : Jacques Périn
Photos © Miss Béa

Simone Luti, Roberto Luti, Piero Perelli, Luke Winslow-King
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