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Live reports / 01.07.2011

JAZZ À VIENNE

Placée sous le signe d’un éclectisme de bon aloi, l’affiche de Jazz à Vienne proposait cette année des vedettes confirmées, des jeunes talents et son lot habituel de découvertes.


 


1er juillet 2011


Cette soirée du festival Jazz à Vienne est celle de la traditionnelle nuit du blues. En régionaux de l’étape (ils viennent de Grenoble), les Mountain Men ont l’honneur d’ouvrir la scène. Fidèles à eux-mêmes, c’est-à-dire excellents, les deux larrons ne paraissent pas impressionnés (mais ils le sont probablement un peu !) et parviennent en seulement 45 minutes à assaillir un public pas nécessairement acquis à leur cause… Leur set reste des plus percutants (Fishin’ blues, I make you lose, Rock me baby, l’ébouriffant tour de force Hellhole…), avec de temps à autre une accalmie (Georgia on my mind). Iano à l’harmonica, Mat à la guitare, au stompbox et bien sûr au chant, tous deux démontrent une assurance et une efficacité qui semblent désormais leur garantir un succès systématique, même si on connaît leur répertoire. En tout cas, le théâtre antique se lève spontanément, en redemande et obtient un rappel (She shines).

 
Mountain Men


Mountain Men


Ensuite, Robert Randolph se présente avec son Family Band. Tous délivrent une musique novatrice, sûrement surprenante pour certains, mais pleine d’énergie avec un groupe sans faille, à la fois compact et éclectique, avec un gros son dès les premières mesures (Good times). Toutes les qualités du combo se concentrent dans une chanson comme Ain’t nothing wrong with that, qui met en avant une rythmique souvent funky (c’est également manifeste sur Walk don’t walk), les harmonies vocales, les arrangements, enfin l’aisance du leader à la guitare. Randolph est d’ailleurs franchement impressionnant à la pedal-steel guitar et fait d’éblouissantes démonstrations sur l’instrumental The march et sur Nobody, sur lequel il se laisse même aller à des élans hendrixiens. Bien qu’il soit lui-même bon chanteur, il est peut-être surpassé dans ce domaine par son bassiste Danyel Morgan, dont le timbre haut perché s’impose sur I don’t know what you come to do. Un titre d’ailleurs totalement endiablé, sorte de boogie sur lequel le leader échange les instruments avec le bassiste et le batteur Sean Quackenbush pour un vrai moment de folie. Il en remet peu après une couche avec une version de Purple haze franchement bien tournée, avant de calmer le jeu en revenant au gospel (If I had my way). Occupant parfaitement la scène, le Family Band rafraîchit et dépoussière avec verve et envie tous les styles. Un show d’exception.


Robert Randolph


À l’écoute de leurs récents CD et attiré par l’article que nous avons consacré à Derek dans le numéro 203 de Soul Bag, j’attendais beaucoup de Derek Trucks et Susan Tedeschi. Sans doute trop. Bien sûr, Trucks est un guitariste talentueux au phrasé très original (il attaque notamment ses chorus en s’appuyant sur son pouce, comme le font souvent les bassistes), mais je le trouve également peu expressif. Il semble un peu errer au sein de cette formation pléthorique (onze musiciens dont trois cuivres et deux batteurs), “dominée” par son épouse qui est plus à son affaire au chant et à la guitare. En outre, le registre apparaît mal défini, s'apparentant surtout au country rock sudiste dans l’interprétation (Bound for glory, Love has something else to say). La slide de Trucks ne parvient que très ponctuellement à s’enflammer, et peu à peu, l’ennui nous gagne. Est-ce dû au début de tournée, au manque d'habitude des musiciens de jouer ensemble dans un registre incertain ? En tout cas, le groupe n'est pas en place. Et après une heure d'un show duquel le blues est absent, je décide de ne pas finir ma nuit sur cette déception en faisant le détour par le Club de Minuit, où les Mountain Men resservent le couvert. Et quelle plat de résistance, 1 h 45 cette fois, et toujours du même niveau ! Allez, au bilan, cette édition 2011 a commencé (pour votre serviteur, du moins, le festival ayant en fait débuté le 29 juin) sous de bons auspices.

 
Susan Tedeschi et Derek Trucks

 


2 juillet 2011


On ne le dira jamais assez, Vienne est bien plus qu’un festival de jazz. Et le théâtre antique (nous l’avons vu hier soir au Club de Minuit) ne doit pas faire oublier les autres sites… Ce samedi en fin d’après-midi, nous voilà au pied de la bien nommée scène de Cybèle avec le groupe Out of the blues. Voici une formation comme il en existe beaucoup en France, à peu près inconnue en dehors de sa bonne ville de Grenoble. Mais voici surtout une formation soudée qui, depuis une bonne quinzaine d’années, distille un blues sans prétention mais efficace et spontané. Certes, le répertoire repose sur des reprises, mais en alternant classiques (I'm a woman, Ghetto child, You can't judge a book by its cover) et titres moins courants (Just around the corner, Blues in my pocket, I don't need no doctor). Beau succès dans une ambiance familiale sympathique de fin d'après-midi d'été.


Pour la soirée au théâtre antique en forme d’hommage à Miles Davis mort il y a vingt ans, nous retrouvons Mike Stern et Didier Lockwood. En parfaite osmose avec le public et entre eux (le bassiste Tom Kennedy et le batteur Dave Weckl les aident bien avec un soutien puissant mais souple), le guitariste et le violoniste délivrent un set exemplaire de jazz fusion. Et parfois, ils poussent même l’osmose (la fusion ?) jusqu’à sonner comme deux violons… Stern est un guitariste passionnant, capable de vélocité et de solos incendiaires (il sonne alors plus rock que jazz) mais aussi de retenue et d'invention quand il privilégie les accords graves. Quant à Lockwood, expressif et aventureux, il figure parmi les meilleurs violonistes de sa génération. Dans le genre, difficile de croire que l'on puisse faire mieux…


Sensation bien différente avec Bitches Brew Beyond. Sorti en 1970, l’album de Miles “Bitches Brew” marquait son époque, enterrait le hard bop au profit du jazz fusion ou du jazz-rock, on vous laisse le choix… Pourtant, on a droit à un concert évoquant plus le free jazz, durant lesquels les solistes (pour beaucoup d’anciens musiciens de Miles), hormis le formidable batteur Al Foster derrière ses deux grandes cymbales dont il tire le meilleur parti, semblent essoufflés et peu concernés. C’est notamment le cas du trompettiste Wallace Roney (l’héritier de Miles ?), franchement irritant à force de quitter la scène après chaque chorus, avant de revenir pile à la seconde à laquelle s’achèvent les interventions de ses collègues ! Du jazz prévisible, un comble…

 


3 juillet 2011


Dimanche, 10 h 30, c’est l’heure de la messe en la cathédrale Saint-Maurice (dont la nef longue de 90 m et haute de 33 m est réellement écrasante), où Rhoda Scott et LaVelle participent à une célébration gospel. Malgré la beauté du cadre, on a toutefois plus l’impression d’assister à une messe qu’à une fête, et même si on n’a évidemment rien contre, on attendra le soir pour revoir ces artistes dans un tout autre contexte… Et le moment vient donc pour cette soirée gospel au théâtre antique. Remarquable à l’orgue mais un peu limitée vocalement, Rhoda laisse légitimement à LaVelle la majorité des parties chantées. Malgré le succès populaire, le premier set appliqué ne sort pas d’un certain classicisme et ne réserve pas de grande surprise (Old time religion, He’s got the whole world in his hands, When the saints go marching in, Glory, glory, hallelujah, Amazing grace). Mais avec l’arrivée de la chorale Jazz à Vienne (200 membres dont 80 enfants), et en particulier quand ce sont les gamins qui chantent, le show prend du volume (Get on board le bien nommé, I know I’ve been changed, Blood done sign my name avec un bel orgue tout en feeling). La ferveur est bien là, le final va crescendo et s’emballe (This little light of mine, Can’t nobody do me like Jesus, We shall overcome), et c’est enfin l’émotion quand tout le monde, sur scène et dans les gradins, fête les 73 ans de Rhoda Scott (Happy birthday)…

 


4 juillet 2011


Soir de piano. La jeune japonaise Hiromi Uehara, qui se produit simplement sous le nom d’Hiromi, est une protégée d’Ahmad Jamal, qui l’a découverte en 1999. Aujourd’hui âgée de 32 ans, elle surprend par sa virtuosité ahurissante et son énergie débordante plus ou moins contenue, au service d’un jazz où fusion et classique font le meilleur ménage (Now or never, la Sonate pathétique de Beethoven). Bien sûr, elle est parfois théâtrale, elle se sert peut-être de sa vélocité pour marquer davantage les esprits, alors que le batteur est aussi excité que le bassiste est souple… Mais nul ne semble s’en plaindre. Et derrière son ravissant visage de gamine espiègle toujours illuminé d’un large sourire un peu interrogateur, Hiromi impressionne et bouleverse pour conquérir un public sous le charme.


De presque 50 ans son aîné (il est né le 2 juillet 1930), son mentor Ahmad Jamal est évidemment moins exubérant. Mais quel toucher, et quelle gestion des silences ! Les doigts de sa main droite caressent les touches, ses mains se lèvent puis s’abattent soudainement dans un style hautement personnel, accentuant un décalage (les techniciens parlent de déconstruction) selon une architecture polyrythmique qui n’appartient qu’à lui. D’ailleurs, un de ces surnoms est “l’architecte”… Cela repose certes sur des arrangements très recherchés, et c’est évidemment le cas, tout en laissant moins de place aux solistes (Hi fly, Topsy turvy). Mais décidément, quelle que soit la génération, le piano jazz ne meurt jamais.

 


5 juillet 2011


La soirée big bands est prometteuse et ne déçoit pas. En ouverture, l’Amazing Keystone Big Band, fort de ses 17 musiciens dont la moyenne d’âge est largement inférieure à 30 ans, fait déjà preuve d’un savoir-faire certain et d’un sens abouti de l’orchestration. C’est souple et souvent swinguant (Stompin’ at the Savoy), et même si ça reste parfois un peu académique, nul doute qu’il faudra compter avec cette formation et on passe un très bon moment. Il faut souligner les interventions de Rhoda Scott très groovy sur Strike on the blue line (décidément, quelle organiste !), de la chanteuse Cécile McLorin-Salvant sur Born to be blue et If I were a bell (élevée aux États-Unis, sa technique vocale est très affirmée), du vibraphoniste Michel Hausser (84 ans dont 62 de carrière…), ainsi que le rappel (Exactly like you).


Rhoda Scott et l'Amazing Keystone Big Band


Cécile McLorin-Salvant


Michel Hausser


En deuxième partie, les big bands de Laurent Mignard et de Michel Pastre ont décidé de faire revivre “Battle Royal”, du titre d’un disque également appelé “First time! The Count Meets The Duke” sorti en 1961. Lors d’un hommage bien plus convaincant que celui de Bitches Brew Beyond 72 heures plus tôt, les deux orchestres (Ellington pour Mignard, Basie pour Pastre) font d’abord donner les cuivres (une vingtaine au total), et ça claque comme aux plus belles heures du swing des deux grands jazzmen. Cinquante ans après, la bataille est royale mais également pacifique, les solistes trouvant tous leur place pour s’exprimer et échanger dans une ambiance pleine de ferveur et de groove infernal (Corner pocket, Take the A train, Dickie’s dream, I don’t mean a thing). On a même droit à des inédits : Manhattan murals, gravé par Ellington en 1948, et le Fickle fling de Basie, qui date lui de 1946. Enfin, pour que le plaisir soit complet, il est question de blues à plusieurs reprises avec Blues backstage, Everyday I have the blues, Wild man blues

 

 


6 juillet 2011


Il faut sévèrement jouer des coudes pour trouver une place dans les gradins du théâtre antique. Pour cette soirée soul du festival Jazz à Vienne, honneur à Raphael Saadiq de se délecter le premier de cette ambiance exceptionnelle, d’autant que son nom ne suffit sans doute pas pour susciter un tel engouement populaire. En showman averti, il s’en accommode aisément et en profite au mieux, emportant tout sur son passage, notamment grâce à son aisance pour varier les genres et faire monter la pression. Ainsi, il fait dans la soul classique avec Love that girl et Big easy, ajoute un zeste de funk sur Good man, tutoie le jazz sur un instrumental avec une basse et un piano endiablés, mais c’est surtout le groove permanent qui fait vraiment la différence (Radio, We fight / we love, Let’s take a walk, Be here…). Le show ne baisse pas d’un cran et prend même des directions inattendues quand Saadiq laisse son pianiste chanter sur Feel so good, mais surtout avec What’s going wrong (presque jazzy à la New Orleans), Day dreams (tendance country avec solo de slide !), enfin ce Movin’ down the line interprété comme un blues avec le guitariste aux vocaux. Un concert audacieux, sans doute étonnant et peut-être même déroutant aux oreilles des puristes de la soul, mais hautement réjouissant.


C’est une sensation étrange de voir Saadiq faire ainsi la première partie, mais il est clair que le public est d’abord là pour Ben l’Oncle Soul. Ce dernier met un peu plus de temps à trouver ses marques, peut-être aussi par la faute d’un groupe un tantinet convenu qui tarde à se lâcher, surtout les cuivres qui restent en retrait (Soulman, Try a little tenderness). Mais la seconde partie du concert est de très belle facture, atteignant parfois des sommets si l’on en juge par les réactions des spectateurs (I got a woman), le jeune et dynamique chanteur s’offrant même un bain de foule pour leur plus grand plaisir (Ain’t off to the back). La controverse qui entoure ce chanteur est parfois excessive. Bien sûr, il y a de l’opportunisme dans cette démarche, et on aimerait que les grands soulmen américains bénéficient d’un succès plus en rapport avec leur talent réel. Mais le système veut ça, et si Ben l’Oncle Soul contribue à l’élargissement, même dans une faible mesure, de l’audience de cette musique, ce n’est pas complètement négatif. Et puis, artistiquement parlant, il est plutôt crédible et ne sombre pas dans le ridicule. Contrairement à un Seal, par exemple.
Daniel Léon

 

7 juillet

Cette soirée, dédiée au jazz fusion, honorait le souvenir de Miles Davis avec Dave Holland et Chick Corea qui participèrent à ses côtés à l’enregistrement “Bitches Brew”, un album fondateur du genre. Ouvrant les débats, le quintette sans piano du contrebassiste Dave Holland a interprété avec conviction un jazz actuel fortement enraciné dans la tradition. La musique du groupe est organisée autour des solos chantants du leader et privilégie sans compromission les belles mélodies. S’y ajoutent le jeu souple et dynamique du batteur Nate Smith et les improvisations de Chris Potter (ts), Robin Eubanks (tb) et Steve Nelson (vib) qui savent souffler le chaud et le froid en contribuant largement à la richesse de l’ensemble. Une belle première partie.

La prestation  de Chick Corea et de Return Forever s’est déroulée sous une pluie torrentielle et un ciel zébré d’éclairs. Le public courageux a eu raison de rester car Lenny White (dm), Frank Gambale (g), Stanley Clarke (b) et Jean-Luc Ponty (vl) ont interprété une musique nourrie de mélodies dont l’apparente facilité masque une réelle virtuosité. Le top dans le genre.

 

8 juillet

La sympathique chanteuse Ayo a débuté la soirée avec un concert louchant franchement vers la variété. Un jeu de scène minimaliste, quelques pas de danse élémentaires et un répertoire décliné sur un ton monocorde ont paru satisfaire un public bon enfant. On est tout de même loin de Michael Jackson, l’influence réclamée d’Ayo qui lui rendit un hommage avec une reprise de Shake your body (Down to the ground).

La blonde Cyndi Lauper, toute vêtue de cuir noir, lui succédait pour son spectacle habituel avec gymnastique scénique et descente dans le public. Mais elle a aussi montré que son statut de vedette du rock ne l’empêchait pas de connaître le blues et d’en livrer une interprétation honorable (Early in the morning). Il est vrai que le vétéran Charles Musselwhite a joué un rôle décisif en apportant des notes bleues bien frappées. Le reste du show a été consacré à son répertoire rock pour se terminer par un duo avec Ayo.

 

9 juillet

Le lendemain, trois groupes funk ont martelé une tout autre ambiance. Constitués de musiciens originaires de La Nouvelle-Orléans, de la Jamaïque et de Porto Rico, les Brooklynn Funk Essentials ont donné le ton avec une musique chaloupée où se fondent les sons du reggae et du funk. Après cette solide mise en bouche, Larry Graham et le Graham Central Station ont fait monter l’ambiance d’un cran en transformant le devant de la scène en piste de danse. La façon dont Graham descendu dans le public, a déchaîné l’enthousiasme avec un simple motif de basse relève du grand art. Puis vint Bootsy Collins pour un show surréaliste, noyé dans les paillettes, les couleurs, le blabla, les numéros de danse ringards, les changements de tenue du leader et où le burlesque côtoie de belles réussites. Parmi celles-ci, le soutien musclé d’un orchestre bâti comme une armada funk, la guitare de Blackbird McKnight et des versions de Good-n-nasty et I’d rather be with you. À la fois délirant et décevant.

 

10 juillet

Cette soirée consacrée au jazz vocal a démarré avec Cécile McLaurin Salvant, qui possède beaucoup de qualités : un phrasé naturel épuré de tout effet gratuit, un investissement constant, un chant nourri de l’ombre bienfaitrice de Billie Holiday et éclairé par le talent personnel d’une vraie chanteuse de jazz. Son répertoire est varié puisque l’on y trouve des standards (I cried for you), et une composition de Gigi Gryce (Soul call). Constitué de bons musiciens qui mériteraient d’être plus mis en valeur, son orchestre a fourni un accompagnement solide que l’on aurait aimé un peu plus délirant.

Jamie Cullum, qui assurait la deuxième partie, ne manque pas non plus d’atouts. Il en a même peut être trop. Son talent protéiforme agace ceux qui le voient s’éloigner du jazz pour flirter avec une variété de haut vol appréciée du public. Le lutin Cullum pique des sprints sur la scène, enchaîne sans crier gare des morceaux rapides et des ballades, puise à toutes les sources en cherchant son inspiration chez Cole Porter et Jeff Buckley. Mais quand ce tourbillon se calme, la musique, la vraie, celle qu’il est fort capable de produire, reprend ses droits comme le montrent ses versions de I’ve got a woman et Do you know what it means to miss New Orleans. Ses musiciens trentenaires lui donnent une réplique sans faille. Un vrai show.

 

 11 juillet

Place à Sonny Rollins. À 80 ans passés, Rollins est manifestement heureux d’être encore là. Celui qui fût un colosse du ténor sait très bien ce qu’il peut encore faire et ce qu’il ne peut plus faire. Sonny Rollins se déplace peut-être avec la grâce d’un ours fatigué mais quand il souffle dans son saxophone, la métamorphose se produit et le vieux géant retrouve alors une ardeur juvénile pour enchaîner des chorus généreux, surtout lors d’un deuxième set riche du plus beau jazz bebop (Tenor Madness) et de ballades somptueuses. Avec l’inamovible Bob Cranshaw (b), Kobbie Watkins (dm), Sammy Figueroa (congas) et Peter Bernstein, auteur de beaux chorus de guitare, son orchestre fournit un soutien à la hauteur. Une leçon.
Alain Tomas

Photos © Brigitte Charvolin