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Live reports / 07.06.2018

Fred Wesley Generations

À bientôt 75 ans, le meilleur soliste issu des rangs des orchestres browniens (Maceo qui ?) ne semble pas décidé à ralentir le rythme. À peine plus d’un mois après un New Morning complet en format funk, et alors qu’une série de dates festivalières estivales est déjà annoncée, c’est avec son excellent trio jazz Generations (déjà entendu en 2016) que Fred Wesley se produisait dans un Pan Piper bien rempli. La soirée était organisée, si j’ai bien compris, par une association étudiante, et deux brèves premières parties, d’une vingtaine de minutes chacune, avait été confiées à deux groupes orientés funk. Très jeunes, les membres de Light Up ne manquent pourtant pas d’expérience sur les scènes parisiennes et offre un set dynamique et compétent à base d’un répertoire original soul bien joué (la clavier Margherita Gruden, particulièrement à l’aise) mais souffre d’un chant très “français”, même en anglais. L’ensemble ne manque cependant pas de charme et mérite d’être suivi. Plus expérimentés, le quintet Funk Fiction propose un funk instrumental festif efficace en mode fanfare – bien que le groupe ne comprenne que deux cuivres –, un peu à la manière de Ceux Qui Marchent Debout. 

Précédée, le temps d’un instrumental, par ses deux partenaires, le batteur Tony Match et l’organiste Leonardo Corradi, c’est ensuite au tour de la vedette de la soirée de rejoindre la scène. Né un peu par hasard des suites d’un projet en hommage à Jimmy Smith monté par Match en 2013, le trio a, en presque cinq ans d’existence, affiné sa formule : une bonne dose de standards jazz, empruntés en particulier au répertoire classique du soul-jazz des années 1960 – de Wes Montgomery à Jimmy Smith –, et quelques originaux dans le même esprit signés par Wesley – Slide man et Old man, occasion pour Wesley de préciser qu’il est sans doute la personne la plus âgée de la salle… Plus inattendu, le Saint Thomas de Sonny Rollins – que Wesley présente comme un ami – s’inscrit naturellement dans la continuité et permet tant à Wesley qu’à Corradi d’assurer quelques beaux solos. Plus discret en individuel, Tony Match, accompagnateur propulsif, s’offre une très belle introduction, à mains nues sur sa batterie, au Caravande Juan Tizol. En fin de set, Wesley offre à ses admirateurs historiques un clin d’œil au passé avec un medley de tubes des JB’s – Shake everything you’ve gotPass the peasGimme some more. Si c’est un plaisir à chaque fois renouvelé d’entendre Wesley attaquer le début du solo de Pass the peas, la brièveté du medley laisse à penser que le principal intéressé à fait le tour des charmes de ce répertoire ! Cela ne l’empêche pas d’entonner avec enthousiasme le classique Houseparty, avec son habituelle fausse sortie (« It's not the weekend and I can't stay up too late, I hate to stop the party but I gotta be to work at 8… ») et les grands cris du public. En rappel final, une version ludique du Catde Jimmy Smith vient rappeler les fondamentaux et clore en beauté une soirée en tout point réussie avec trois musiciens au sommet de leur inspiration.

Frédéric Adrian