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Live reports / 04.09.2023

Durand Jones, Les Étoiles, Paris, 2023

30 août 2023.

Un peu plus de cinq ans après y avoir joué pour la première fois en France, c’est à nouveau aux Étoiles, à deux pas du New Morning, que Durand Jones offrait la première date parisienne de sa tournée solo, qui accompagne la sortie de “Wait Til I Get Over”, évoqué longuement avec le principal intéressé dans notre numéro 251. 

Date encore un peu estivale ou lieu un peu à l’écart des circuits soul habituels, la salle n’est pas très remplie pendant que la première partie, une chanteuse française baptisée Josie, présente son joli répertoire pop (en anglais), mais les spectateurs arrivent progressivement et compensent leur relative faiblesse numérique par une ferveur évidente, à la hauteur de l’enthousiasme soulevé par le disque de la tête d’affiche.

Surprise à l’arrivée sur scène de Durand Jones, dans un spectaculaire costume rayé : non seulement il est armé d’un saxophone, dont il jouera surtout dans la seconde partie du concert, mais c’est par My love, une composition de Paul McCartney – dont il évoquera ensuite l’influence sur son écriture – pour son groupe Wings. C’est ensuite bien sûr le répertoire du nouvel album qui constitue le cœur du répertoire de la soirée, en commençant par Sadie puis I want you

Josie
Durand Jones

Difficile pour les quatre musiciens (Drake Ritter à la guitare, Glenn Myers à la basse, Ben Lumsdaine à la batterie et Matt Romy aux claviers) de restituer, dans cette configuration, la subtilité et la richesse des arrangements originaux, même si tous ont participé à l’enregistrement (Lumsdaine et Ritter également en tant que coproducteur avec Jones), et d’autant plus que la qualité sonore est plutôt médiocre, sombrant même dans une sorte de bouillie dès lors que les musiciens assurent également des chœurs… 

Même si l’intensité des interprétations de Jones, qui tombe à genou dès I want you, ne parvient pas tout à fait à dépasser un rendu sonore insatisfaisant, impossible de bouder le plaisir d’entendre pour la première fois en live le répertoire du disque, du très beau See it through à l’intense Letter to my 17 year old self, en passant par la lecture habitée du Someday we’ll all be free de Donny Hathaway, avec une introduction parlée sur la situation politique des États-Unis qui remplace le rap de la version discographique. Frontman discret, à la limite de la timidité, avec les Indications, Jones assure ici pleinement son rôle de leader, avec pas de danse et interactions avec le public, et laisse une large place à son humour : quand une voix dans la salle lui demande comment il va, il répond : « I’m beautiful! » 

Drake Ritter

Glenn Myers

Matt Romy

Ben Lumsdaine

Au répertoire du disque s’ajoutent quelques reprises d’artistes l’ayant influencé, de Queen à Stevie Wonder, avec un I ain’t gonna stand for it (extrait de “Hotter Than July”) rarement joué et occasion d’un brillant solo de saxophone. Le répertoire des Indications, par contre, n’est pas abordé. La fin du concert, avec Gerri Marie puis le spoken word The place you’d most want to live, hommage à ses origines louisianaises, monte encore en intensité, avant un final musclé, à coup de grosse guitare, sur Lord have mercy.

Malgré le cri « play something funky » qui l’accueille lors de son arrivée sur scène pour le rappel, c’est avec une courte version du classique de Sinatra On a clear day (You can see forever) qu’il choisit de clore la soirée. À la sortie, si tout le monde semble d’accord pour déplorer la médiocrité du son, rares sont ceux qui regrettent leur venue, et beaucoup espèrent un retour rapide de Durand Jones dans des conditions plus favorables à l’appréciation de sa musique ! 

Texte : Frédéric Adrian
Photos © Cindy Voitus

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