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Chroniques / 07.12.2023

Blue Planet, fin 2023

En complément de la rubrique Blue Planet du magazine, voici quelques mots à propos de disques que nous n’avons pas pu y intégrer faute de place ou parce qu’ils étaient à la marge du champ d’action principal de Soul Bag. Certains sont entre nos mains depuis quelques mois et il y a plein de raisons, plus ou moins avouables, pour en parler avec retard. Mais il n’y en a aucune pour les passer sous silence. Let’s go!

Vainqueurs de l’European Blues Challenge en 2022, Harlem Lake approche le blues par un versant rock des années 1970. La puissance prime, que ce soit dans le chant, les guitares, les cuivres, les claviers, les chœurs, pondérée par quelques tensions-détentes bienvenues. C’est bien fait, attractif sur scène, mais, sur disque, ça manque de blues.

PD Martin privilégie lui aussi le côté rock, cette fois léger et en trio. Au-delà des passages convenus en country rock, soul ou funk, on retient la couleur apportée par l’orgue et le saxophone invités, et les parties de guitare doublées de scat vocal.

Tio Manuel met également du rock, de la country et du folk dans son blues, presqu’en portion congrue. L’homme a bourlingué et est crédible dans ses textes et son spectre musical. Le disque, son huitième, dégage une bonne ambiance et s’écoute agréablement. L’instrumental Heading to Sorbas vaut le détour.

Haylen a un parcours impressionnant, jusqu’à The Voice ou les grands music halls parisiens, ce qui lui donne une aisance vocale dans tous les styles. Sa voix, en anglais ou en français, domine sans peine un accompagnement solide, plus rock ‘n’ roll que blues. Pour l’avoir vue sur scène, accompagnée par un groupe très solide, on se dit que ce n’est qu’une étape dans une trajectoire qui ira plus loin que ça.

Paul Personne reprend 17 chansons, presque toutes françaises, qui l’ont marqué, variété plus ou moins grand public, rock, afro, blues – Benoit Blue Boy –, qu’il adapte à son propre style blues rock, parfois sans reprendre le chant. Certains s’en trouvent agréablement transfigurés, par exemple Je suis mordu de Johnny Hallyday, d’autres passent moins, surtout si on ne connaît pas bien les originaux.

The Red Goes Black propose un bon répertoire de pop rock, au sens noble du terme, c’est-à-dire de rock entraînant comme on en faisait dans les années 1960, avec des guitares nerveuses, un chant de qualité, des refrains à reprendre en chœur, des références multiples, et des couleurs blues et funk. Ça balance fort, le son est sobre et propre, transmettant bien l’énergie contagieuse du groupe.

Good Bad & Young joue une musique qu’on pourrait qualifier de folk blues rock dont la formule en trio guitare acoustique, basse et batterie retient l’attention car elle permet un joli son, à la fois puissant et mélodique. Autre atout du groupe, la voix très accrocheuse de Sadbh Tapie, qui tient aussi la guitare : joli timbre, accent anglais impeccable, et ce petit hoquet qui revient régulièrement comme une sorte de marqueur rythmique supplémentaire, soutenu par les chœurs discrets de ses compères Cyril Tapie et Joé Chollet.

Le trio Muddy What ? a un beau palmarès en “challenges”, allemand ou internationaux, et le doit certainement à son approche particulière du blues, via le rock des années 1970, la country, et son propre talent. Un chanteur énergique, deux guitares aux riffs secs ou planants, une mandoline, un batteur-bassiste, l’ambiance s’installe peu à peu, avec des réussites comme Muddy’s joy, Can’t tell a lie ou Bassman.

Fab Zoreil ne semble pas être un homme de concession. Son disque “Blues Sur Paname”, enregistré avec le seul batteur Olivier Hurtu, qu’on a connu avec Jesus Volt, lui-même officiant au chant et à la guitare, est un recueil de blues rock hargneux, avec de textes en français qui ne le sont pas moins. La formule à deux impose de se concentrer sur le rythme et c’est réussi. Olivier est fort à la batterie et les riffs de guitare de Fab sont inspirés. Celui de The devil n’a pas fini de hanter nos oreilles, tout comme la mélodie de Tous les gars du métro.

La musique de Komodrag & Mounodor relève plus à nos oreilles du rock des années 1970 que du blues, ce qui ne l’empêche pas d’être emballante. Un zeste de Deep Purple, une tranche de Pink Floyd, une pincée de Doors, une goutte de Jethro Tull, un éclat de Black Sabbath, et surtout beaucoup d’eux-mêmes, voilà ce que les sept membres du groupe assemblent pour produire un gros son avec basse et claviers groovy, guitares rageuses, double batterie et refrains rassembleurs. Les morceaux sont très bien construits, on écoute et on suit avec plaisir.

Francesco Piu est bien entouré par Roberto Luti aux guitares, Davide Speranza à l’harmonica et Silvio Centamore à la batterie et peut s’adonner librement à son blues très marqué par le gospel. Il est ici enregistré en public au théâtre municipal de Sens en 2021. Sa voix porte bien, sa guitare marque bien le rythme en acoustique et les basses en baryton, Roberto envoie de multiples traits de slide, Davide souligne les mélodies et prend quelques solos, et Sivio est costaud à la batterie. Les morceaux sont longs, c’est le propre des concerts, et remplis de passages prenants.

Exercice difficile que celui du duo piano voix, mais Nico de Cock au chant et Edwin Risbourg, baptisés pour l’occasion Big D & Captain Keys, s’en sortent bien. Ils reprennent des classiques grand teint, élargissent ensuite vers Tim McGraw, Tom Waits, John Hiatt, et glissent quatre compositions. Ce faisant, ils installent une ambiance sympathique, intimiste, qui donne envie de les voir en concert.

Dix ans séparent le premier album complet des Wanton Bishops et leur nouveau disque “Under The Sun”. Dans un tel intervalle de temps, on peut comprendre que le groupe ait évolué et cela semble s’être fait au détriment du blues qui alimentait le premier, leur leader qualifiant désormais leur musique de « rock du monde, pour le monde ». Le son est rude, l’ambiance est sombre, c’est une expérience musicale particulière.

Deuxième album pour Ka & the Blue Devils qui poussent plus loin sur la piste soul, rock et blues, avec des compositions en anglais et en français. La voix forte et passionnée de Carole Crimi, les guitares claires de Jeff Rebsamen, les claviers en nappes de Romain Petite et la rythmique de Christophe Garreau et Thierry le Gall composent un univers musical personnel tour à tour joyeux, dramatique, rapide, lent, tout ce qu’il faut pour générer des émotions.

Concluons en blues avec Jerry T. & The Black Alligators qui aiment se réapproprier les classiques et les entourer de leurs propres compositions. Robert Johnson, Otis Rush, Jimi Hendrix, Screamin’ Jay Hawkins, Muddy Waters sont ainsi remis au goût du jour en format blues rock bien blues, avec deux guitares, un harmonica et un saxophone qui apporte une belle et ronde chaleur au son d’ensemble. On retrouve l’énergie et la puissance des concerts et on passe un bon moment.

Christophe Mourot

• Big D & Captain Keys
Tales Of Friendship
Naked Prod

• Good Bad & Young
Atrium
goodbadandyoung.com

Harlem Lake
Volition Live
harlemlake.com

Haylen
Blue Wine
Le Backbeat

Ka & The Blue Devils
Anywhere
ka-musique.com

Komodrag & The Mounodor
Green Fields Of Armorica
Dyonisiac

Tio Manuel
¡Ocho!
tio-manuel.com

PD Martin
Soulbeat Incarnate
Naked Prod

Muddy What ?
Spider Legs
Howlin’ Who

Paul Personne
Dédicaces, My Spéciales Personnelles Covers, Volumes I & II
Verycords

Francesco Piu & The Groovy Brotherhood
Live In France
Appaloosa

The Red Goes Black
Keept It In Mind
French Wine

• Jerry T. & The Black Alligators
Blue No More
facebook.com/jerrytbluesman

The Wanton Bishops
Under The Sun
Gnu Roam

Fab Zoreil
Blues Sur Paname
fabzoreil.wixsite.com

albumBlue Planetmagazine