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Live reports / 30.11.2023

Montfort Blues Festival 2023

Montfort-sur-Meu (35), 17-18 novembre 2023

C’est la 15e édition d’un festival comme on les aime, pas trop grand, convivial, chaleureux, en proximité, de plus en plus ancré dans son environnement avec des partenaires publics et privés de la ville, et une programmation qui sort des sentiers battus, concoctée par Nico Sturma et Cédric Cobret, tout en conservant une base blues solide.

Au milieu du public, nombreux dès le vendredi soir et quasi complet le samedi, on retrouve avec plaisir des connaissances locales, ou venues de plus loin, et on savoure une nouvelle fois le combo l’incontournable “galette-saucisse, bière locale”. On y arrive avec le sourire on repart avec un sourire plus grand encore.

Tout commence le vendredi 17 novembre à la salle du Confluent avec Little Big 6ster, lauréats du prix Montfort Blues au tremplin des Rendez-Vous de l’Erdre de Nantes début septembre. Il y a ceux qui connaissent le groupe et ceux dont ce n’est pas encore le cas. Tout le monde sera séduit. Virginie Pinon, chant et guitares, Nicolas Bach, chant, guitares et harmonica, Cyril Bach, percussions et didgeridoo, Gilles Théolier, basse, et Pascal Cochard, batterie, donnent leur pleine mesure sur scène, avec des concerts remplis d’énergie, une image décalée qui semble s’assagir un peu, des compositions fortes et des reprises de blues et de soul personnalisées comme Hesitation blues en ouverture, suivi de Never loved a man, Who do you love un peu plus tard, et surtout leur superbe version de Someday baby de R.L. Burnside, avec le chant lancé par Nicolas et repris en flow par Virginie, dont la voix, tour à tour claire ou grondante, est l’un des atouts maitres du groupe. N’oublions pas les deux guitares, les percussions, le didgeridoo, ils ont tout bon !

Leur succèdent T-Bear & The Dukes, venus tout droit de Suède, avec Torbjörn “T-Bear” Solberg au chant et à la guitare, Fredrik Kaudern à la basse, Emil Wachenfeldt aux claviers et Henrik Berg à la batterie. Ce sera la caution blues de la soirée et leur set commence très bien avec des blues électriques très marqués par B.B. King, surtout à la guitare, mais aussi au chant même si la voix de Torbjörn est plus grave que celle du maître. Le répertoire vient de Magic Sam, Fenton Robinson, Phillip Walker, Bobby Bland, Buddy Guy ou Freddie King, les solos de guitare sont bons, mais ça va se terminer en eau de boudin à cause de sombres problèmes de matériel. Dommage.

S’il y avait des problèmes techniques sur scène pour Cyril Maguy et Vicious Steel Fuel Band, nul doute qu’il sortirait les outils et réparerait tout sur le champ. Il suffit de voir la fameuse steel guitar montée sur son capot de tracteur avec micro et liaison ampli sans fil pour être convaincu qu’il a de la ressource. Il en a aussi à l’écriture, avec une suite de compositions fortes qu’on a plaisir à retrouver. Fureur, poésie, rock, blues, douceur musicale, gros son, il y a tout dans un concert de ce groupe, et surtout beaucoup d’énergie et de partage, avec le public et sur scène entre Cyril au chant et à la guitare, Antoine Delavaud à la batterie, Richard Puaud à la basse, Mathieu Péqueriau à l’harmonica et à la planche à laver, Paul Weeger à la trompette et Adrien Toulouse au trombone. C’est du lourd, de l’original, et on aime.

Vicious Steel Fuel Band © J-M Rock’n’Blues
Cyril Maguy © J-M Rock’n’Blues
Cyril Maguy, Mathieu Pequeriau © J-M Rock’n’Blues

Le lendemain samedi commence à 12 h 30 à la Galerie Quiconce avec Ady One Woman Band. Il est tôt, mais il y a du monde, pour profiter de la musique et aussi de l’accueil avec sandwiches faits sur place et moult boissons. Ady, elle, fait le show avec le courage et la force requis pour ceux qui jouent seuls. Sa voix forte, sa guitare forcément très rythmique, son jeu de batterie aux pieds simple, et surtout ses compositions passent bien, la journée est bien lancée.

À 17 h, il faut être au bar PMU Le Gaolp’1 pour les Mockingbirds avec Gaël Roul à l’harmonica et au chant, Pierre Dubigny et Nicolas Deshayes aux guitares, Yann Renoul à la basse et Cyril Durand. Nous en avons déjà parlé dans Soul Bag, mais on peut encore dire que ce groupe est le meilleur tenant du blues sudiste dans des limites géographiques de plus en plus grandes en France. Clifton Chenier, James Harman, Omar Dykes, Lazy Lester, Charles Sheffield, Slim Harpo et bien d’autres sont convoqués dans le lieu rapidement bondé et chaud comme un juke-joint Louisianais. Ça chante et ça joue avec détermination, talent et feeling et ça termine en bœuf avec Max Genouel, Soizic Lebreton, Marc Loison et Joko Blues.

Ady One Woman Band © C. Mourot
The Mockingbirds © C. Mourot

On rejoint vite la salle du Confluent pour avaler une galette-saucisse avant le premier concert du soir tenu par Little Sadie Band avec Mathis Haug au chant et à la guitare, Benoit Nogaret à la guitare et à la basse et Simon Boyer à la batterie. On est vite pris par la voix instantanément reconnaissable de Mathis, le jeu de guitare incroyable de Benoit et les rythmes élégants de Simon. Le set commence par du gospel avec This train (« Le blues parle de train et d’arrière-train » dira Mathis plus tard) et Will the circle be unbroken, puis s’égrène au rythme des compositions de Mathis dont Fishing with Bill, Walk on boy, avec un formidable solo de Benoit, Deep river blues, avant de se terminer en rappel avec Trouble in mind.

Mathis Haug, Simon Boyer © J-M Rock’n’Blues

On avait vu James Armstrong au Zygo Bar de Nantes début novembre et l’ambiance avait été chaude. Il prouve vite ce soir à Montfort qu’il est dans les mêmes dispositions. Bien soutenu par Denis Agenet à la batterie, Jean-Patrick Cosset aux claviers et Abdell B Bop à la basse, il peut y aller à fond dès le premier morceau et il va le faire avec un chant et un jeu de guitare dans le ton blues qui va bien. Le seul reproche qu’on pourrait lui adresser est de jouer une bonne part de reprises, de plus très standards, alors qu’il a un répertoire personnel important. On préfère l’entendre jouer Blues been good to me et Addicted to love plutôt que Boom boom boom, The Thrill is gone, The blues is all right et Got my mojo working. Mais on relativise car le public apprécie, et James sait le divertir avec de bonnes ficelles de scène, le sollicite pour chanter, taper dans les mains, et va à sa rencontre en descendant de scène. Il fait le show et c’est chaud.

James Armstrong, Denis Agenet © J-M Rock’n’Blues
James Armstrong © J-M Rock’n’Blues

La salle est prête pour Mike Andersen et ses fidèles Johannes Nørrelykke à la guitare rythmique, Kristian Kold à la basse, Jens Kristian Dam à la batterie. Physique qui en impose, voix qui captive, univers personnel, voilà un artiste qui sait conquérir un public même si celui-ci ne l’a jamais vu auparavant. On est séduit par la douceur et la poésie qui se dégagent de sa musique. Mais il y a aussi la colère qui parfois affleure, la force des mélodies, des notes égrenées avec une forme de parcimonie, en rythmique comme en solo, l’alternance électrique et acoustique à la guitare, la sensibilité des accompagnements, et le pouvoir attractif de la voix de Mike qui s’élève, s’enroule, s’insinue dans les oreilles pour ne plus en ressortir. Right now it hurts, qui remonte au premier disque du Mike Andersen Band en 2002, la première en public de Don’t waste your time, Because of you avec les gentils mots pour la chronique de l’album “Raising Hand” dans Soul Bag, sont autant de chansons qui forment une bulle musicale de laquelle on n’a plus envie de sortir.

Mais il le faut bien, et le Montfort Blues Festival 2023 prend fin après cela. On se sent bien, détendu, et on va attendre l’année prochaine sereinement.

Texte : Christophe Mourot
Photos © J-M Rock’n’Blues et Christophe Mourot
Photo d’ouverture © J-M Rock’n’Blues
Plus de photos ici.

Jens Kristian Dam, Mike Andersen, Johannes Nørrelykke © J-M Rock’n’Blues
Mike Andersen © J-M Rock’n’Blues
Mike Andersen, Jens Kristian Dam © J-M Rock’n’Blues