;
Hommages / 15.11.2020

Ils nous quittent : Cándido, Len Barry, Gus Hawkins, Scrap Iron, Baron Wolman, Jean-Michel Boris

Hommages aux artistes et personnalités disparus récemment. 

Cándido (1921-2020)
Originaire de Cuba, Candido de Guerra Camero fait ses débuts sur la scène de La Havane, notamment au légendaire Tropicana Club, avant de s’installer aux États-Unis. Installé aux États-Unis à partir du début des années 1950, il est, dans la lignée de Chano Pozo, un des pionniers de l’intégration des percussions d’inspirations cubaines dans le jazz, accompagnant notamment sur disque et sur scène Charlie Parker, Miles Davis, Gene Ammons, Stan Getz, Phil Woods, Sonny Rollins, Illinois Jacquet, Coleman Hawkins, Kenny Burrell, Wes Montgomery, Grant Green, Bud Powell, Tony Bennett, Duke Ellington, Woody Herman, Lionel Hampton, Art Blakey et Elvin Jones, tout en lançant dès le milieu des années 1950 une carrière personnelle, en particulier pour ABC-Paramount.

S’il enregistre essentiellement dans un registre jazz et latin, le R&B ne lui est pas étranger, et ses congas se font entendre chez Dinah Washington et, surtout, chez Ray Charles, à l’occasion de certaines de ses premières séances Atlantic (Mess around, It should have been me…). Toujours aussi actif dans les années 1970, avec notamment un album pour Blue Note, il plonge à la fin de la décennie dans le disco avec deux albums pour Salsoul et un classique dans le genre avec sa version du Jingo de Babatunde Olatunji. Il poursuit ensuite sa carrière, dans un registre plus classiquement latin jazz en général, jusqu’au milieu des années 2010, recevant notamment un prestigieux Jazz Masters Award du National Endowment for the Arts en 2008.
Photo © DR

Len Barry (1942-2020)
Pionnier “blue eyed” de la scène soul de Philadelphie, sa ville natale, Leonard Borisoff fait ses débuts discographiques alors qu’il est encore adolescent avec différents singles parus sous le nom des Brookstones et des Bross-Tones. Avec quelques changements de personnels, c’est sous l’identité des Dovells que le groupe commence à décoller au début des années 1960 avec une série de singles sur lesquels Borissof est le chanteur principal. Entre 1961 et 1963, plusieurs chansons, comme Bristol stomp et You can’t sit down, se classent dans les différents classements de Billboard. Bien que l’ensemble des membres du groupe soient blancs, ses enregistrements sont populaires auprès du public afro-américain : plusieurs de ses 45-tours deviennent des succès dans les charts R&B et le groupe tourne même avec James Brown.

Pour sa carrière solo, qu’il lance au milieu des années 1960, Leonard Borisoff devient Len Barry. Il décroche quelques tubes, en particulier avec une chanson baptisée 1-2-3, sans se départir de son inspiration R&B et soul : plusieurs de ses titres de l’époque sont d’ailleurs coécrits avec Leon Huff, futur architecte du Philly Sound avec Kenny Gamble. Si le succès est éphémère – sa discographie s’arrête dans les années 1970, même s’il continue à se produire sur le circuit de la nostalgie –, sa carrière se poursuit néanmoins sur la scène musicale de Philadelphie, principalement en tant qu’auteur (pour Chubby Checker, Billy Eckstine, Major Harris, Sister Sledge, Black Magic, Damon Harris, Fat Larry’s Band (le tube Zoom), Slick, Sylvester…) et comme producteur occasionnel, notamment pour Slick et Fat Larry’s Band. 

Gus Hawkins (19??-2020)
Originaire des environs de Cleveland, le saxophoniste et le flûtiste se produit dès ses 17 ans sur les scènes de la ville, accompagnant entre autres Marvin Gaye, Dionne Warwick et les Temptations. À la fin des années 1960, il joue au sein d’un groupe local, les Future Tones, avec un certain Charles Edwin Hatcher, futur Edwin Starr, mais l’armée se charge d’interrompre l’aventure. À son retour du Vietnam, il monte son propre groupe, les Dynamic Sounds, qui remporte un concours de talent dont le premier prix est un contrat avec le label Musicor. Rebaptisé S.O.U.L. (soit Sounds of Unity and Love), le groupe se fait remarquer avec son premier single, Down in the ghetto, suivi d’un premier album pour Musicor, “What Is It”. Si le succès est au rendez-vous, avec des passages à l’Apollo et une tournée avec les Jackson 5, les relations sont compliquées avec le label, et, après un second album et une série de singles, le groupe se sépare en 1975 et Hawkins se consacre à une carrière médicale de phlébologue, même s’il n’abandonne pas totalement la musique, apparaissant par exemple en 1978 sur l’album “Is The Conveyor “Understand Each Other”” d’une autre figure de la scène soul de Cleveland, Lou Ragland, avec qui il avait déjà collaboré au début de la décennie en co-signant un titre de l’album paru sous le nom de Hot Chocolate.

Largement négligée dans les années 1980, la musique de S.O.U.L. est redécouverte dans la décennie suivante, grâce en particulier à de nombreux samples et à la réédition des deux albums par BGP, et Hawkins remonte une version du groupe, avec laquelle il se produit régulièrement au moins jusqu’au début des années 2000, tout en accompagnant occasionnellement d’autres artistes comme Travis Haddix (“Daylight At Midnight”) ou le trio all-stars Honeyboy Edwards-Robert Lockwood Jr.-Pinetop Perkins (“Last of the Great Mississippi Delta Bluesmen: Live in Dallas”).

Scrap Iron (19??-2020)
Figure du Chitlin’ Circuit, Frank “Scrap Iron” Robinson a été pendant trois décennies l’assistant et homme à tout faire sur la route de Little Milton. Fils (non reconnu) du chanteur blues et gospel Gatemouth Moore, Scrap Iron était une figure de la scène musicale de Memphis, travaillant notamment en tant que portier-videur au club de B.B. King sur Beale Street ou au Center for Southern Folklore. Ces dernières années, il assurait régulièrement un rôle de MC et ambianceur pour la Legendary Rhythm and Blues Cruise et ses différentes déclinaisons. 

Scrap Iron. © André Hobus

Baron Wolman (1937-2020)
Particulièrement connu pour avoir été, de la fondation du journal à 1970, le principal photographe du magazine Rolling Stone, Baron Wolman a immortalisé, bien souvent sur scène – et en particulier au Fillmore et dans les autres salles de San Francisco – ou au naturel, les principales stars de l’époque, côté rock et pop bien sûr – il est à Woodstock –, mais aussi jazz, soul ou blues. Parmi les artistes dont il a capturé l’image figurent B.B. King, Taj Mahal, Albert King, Buddy Guy, Big Mama Thornton, Bukka White, Johnny Winter, Ike & Tina Turner, Sly Stone, James Brown, Betty Davis… Ses œuvres apparaissent en couverture de plusieurs albums dont “King Of The Blues Guitar” d’Albert King ou, plus récemment, l’anthologie “The Columbia Years 1968-1969” de Betty Davis, ainsi que sur les pochettes ou les livrets de nombreux disques. 

Jean-Michel Boris (1933-2020)
Neveu par alliance de Bruno Coquatrix, Jean-Michel Boris devient en 1959 le directeur artistique de l’Olympia, puis son co-directeur (à partir de 1970) et enfin son directeur général (de 1979 à 2001). Il est en particulier associé à l’ouverture de la salle aux artistes anglo-saxons, rock, pop, mais aussi soul et blues, d’Otis Redding à James Brown en passant par Aretha Franklin ou Stevie Wonder, notamment dans le cadre des Musicorama d’Europe 1 dont il est le programmateur. 

Textes : Frédéric Adrian

Baron WolmanCándidoFrédéric AdrianGus HawkinsJean-Michel BorisLen BarryScrap Iron