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Live reports / 05.12.2018

4U: A Symphonic Celebration Of Prince

Depuis le décès inattendu de Prince en avril 2016, les concerts hommages se succèdent. Après les anciens accompagnateurs de la New Power Generation à l’été 2017 et en attendant les originaux de The Revolution début 2019, c’est la tournée “4U: A Symphonic Celebration Of Prince” qui fait étape à Paris, dans le cadre d’une tournée européenne. Dans l’ancien Palais des Sports rebaptisé Dôme de Paris, la salle est bien loin d’être remplie, la faute peut-être à une communication assez incompréhensible – des affiches illustrées d’une photo de Prince datant des années 1980 et un titre amputé du mot “symphonique”, laissant planer un doute sur la nature de l’opération –, et la production a visiblement distribué largement des invitations pour compléter les réservations des inconditionnels princiers, sceptiques avant même le début du concert. 

 

Approuvé par les héritiers de l’artiste, le projet, dont le “conseiller musical” est Questlove, le batteur des Roots, était annoncé comme une interprétation symphonique du répertoire princier, sur des orchestrations signées par Brent Fischer, le fils de l’arrangeur régulier de Prince – entre autres – Clare Fischer et lui-même collaborateur régulier du Kid de Minneapolis. 

 

Le concert commence dans une certaine confusion : à l’heure pile annoncée sur les billets, alors que nombre de spectateurs sont encore en train de rejoindre leur place, les musiciens s’installent alors que retentit un message enregistré de Questlove à peu près inaudible du fait de la médiocre sonorisation. Sur scène se trouvent donc la trentaine de musiciens classiques du Russian Chamber Philharmonic St. Petersburg, sous la direction du chef Juri Gilbo – les orchestres varient selon les dates –, quatre musiciens “électriques” américains non identifiés, ainsi qu’une violoniste soliste américaine, Ginny Luke, accompagnatrice notamment de Meat Loaf et de Britney Spears. Ils sont surplombés par deux logos princiers, ainsi que par un écran sur lequel seront projetées photos et vidéos de la vedette in absentia de la soirée ainsi que différentes images d’illustrations à la pertinence discutable. 

 

En deux parties séparées par un entracte, le programme revisite sous forme de medleys le répertoire princier. Quelques raretés font leur apparition – les inédits All my dreams et It ain’t over ‘til the fat lady sings, en particulier – mais la setlist est essentiellement composée des succès, avec un accent marqué sur les albums des années 1980. Les arrangements sont très inégaux, mêlant quelques réussites (Under the cherry moonWhen doves cryComputer blue) à de francs ratages à bases de violonnades en roue libre (Nothing compares to you). L’ennui qui se lit en permanence sur le visage des musiciens – à l’exception par moment du premier violon – interdit de se laisser emporter totalement par la musique, d’autant qu’il est contrebalancé par le jeux de scène grotesque de la violoniste Ginny Luke, dont les tentatives d’entraîner le public à la façon d’une pom pom girl bas de gamme tombent systématiquement à plat – sans même parler des moments où elle chante quelques refrains avec une emphase digne de la vedette d’une comédie musicale de fin d’année scolaire. Son omniprésence gesticulatoire ne fait que gâcher les quelques bons moments du programme et il est difficile de croire qu’elle ait été choisie par les responsables du projet pour en être la figure de proue. En fin de programme retentissent la guitare et la voix de Prince, accompagnées par l’orchestre pour un Purple rain lourdaud.

 

La version live de Baby I’m a star projetée sur l’écran, de façon incongrue, avant que l’ensemble reprenne le même morceau ne fait que souligner le fossé qui existe entre les interprétations carrées et tendues de Prince et le pudding indigeste proposé ce soir en guise d’hommage. Très clairement, une occasion ratée, et il ne reste qu’à souhaiter que les héritiers fassent preuve de plus de discernement dans leurs futurs projets – l’œuvre princière mérite bien mieux.

Frédéric Adrian