11 mai 2022.

En parfait accord avec ses chansons-baume qui nous trottent dans la tête, la Britannique Pip Millett, épaulée par un quartet attentif, s’exprime tout en douceur contenue. Une présence moins statique n’aurait pas fait de mal, mais l’épaisseur et les nuances de son timbre font leur effet grâce à un répertoire consistant et bien connu d’un Hasard Ludique bondé et bouillant, semaine de mai à tendance caniculaire oblige.

Contraint d’arriver tard dans la petite salle située dans l’ancienne gare de l’avenue de Saint-Ouen, j’ai manqué une première partie apparemment bien assurée par la chanteuse Enchantée Julia. Je raccroche les wagons du set de Millett à partir de Hard life, un des titres de “Motion Sick”, son dernier EP en date publié l’été dernier. Basse, batterie, clavier, guitare : les quatre musiciens font corps dans un espace resserré et les regards échangés traduisent une complicité qui s’entend sur scène. Concentrée, Pip Millett pioche dans les trois EP et la poignée de singles qu’elle a réalisés depuis 2018.

Quelques sourires entre les morceaux tempèrent une impression de distance – on est à l’opposé d’une Mahalia toujours prompte à discuter avec son public –, mais c’est aussi son répertoire très introspectif qui veut ça. Ainsi Deeper dark, la belle ouverture de son excellent “Lost In June” (2020), laisse place à Fancy, titre phare de “Do Well” (2019), avant que le plus récent et joliment recueilli Best things prépare le terrain pour sa relecture sensible de Try a little tenderness. 

Et puis le temps suspend son cours lorsque cette merveille nommée Ava déploie les ailes de son envoûtant refrain. L’enchaînement entre Downright, qui n’a alors pas une semaine d’existence, et Make me cry, son titre le plus ancien (2018) qui a bénéficié d’un passage à Colors, offre une bonne conclusion en deux temps qui rappelle la qualité constante d’une œuvre encore jeune mais déjà marquante. 

Texte : Nicolas Teurnier
Photos © Cindy Voitus