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Brèves / 12.07.2012

L’as de la trompette et la magnifique

Jazz à Vienne, 11 juillet 2012. On lui a sans doute déjà faite : qualifier le Français Stéphane Belmondo d’as des as de la trompette… Mais plus sérieusement, il fait bel et bien partie des artistes qui comptent sur l’instrument. À la tête d’un quartet particulièrement soudé et dense (au sein duquel se distinguent le pianiste et occasionnellement flûtiste Kirk Lightsey et le batteur Billy Hart — quel jeu de cymbales ! —, le contrebassiste Sylvain Romano assurant un soutien exemplaire de souplesse), il propose un set parfait de jazz moderne. Des thèmes comme You and I et Habiba, sur lesquels les solistes improvisent dans la plus pure tradition du style, le démontrent. Mais la suite des événements va révéler un changement radical de registre et d’ambiance… « Vous êtes absolument magnifiques. » À plusieurs reprises, Melody Gardot utilisera cette phrase pour remercier les spectateurs du théâtre antique, et ce dans un français impeccable, s’il vous plaît. On ne peut que lui retourner le compliment, et pas seulement pour sa plastique certes tout aussi impeccable, mais surtout pour son art empreint d’une rare originalité, dont le jazz n’est qu’une composante. Son concert, ou plutôt son spectacle, est une invite au voyage, un voyage initiatique durant lequel elle passe de la finesse à la ferveur pour dévoiler ses inspirations, et qui passe bien sûr par les États-Unis, son pays natal, mais aussi par l’Amérique du Sud, le Portugal, l’Afrique du Nord… D’emblée, elle fascine et s’avance seule sur la scène pour No more, my Lord (un negro spiritual d’origine indéfinie, proche du holler, enregistré par Alan Lomax dans une prison en 1947…) chanté a cappella, s’accompagnant seulement d’un curieux bracelet à clochettes et de son talon aiguille qui frappe inlassablement la scène. Obsédant. Le ton est donné pour un show parfois baroque qui décline toutes les facettes d’un étonnant talent hybride, parfaitement servi par un groupe au diapason même si le saxophoniste pourrait s‘épargner quelques clichés. Mais ne boudons pas, tous sont au service d’un répertoire toujours chargé d’émotions plurielles qui nous mènent au Brésil (Mira) et en France (Les étoiles), réveille les peines de cœur (So we meet again my heartache, la passion sur un gospel lancinant et enfiévré (Who will comfort me), l’apaisement sur Somewhere over the rainbow en second rappel. Enfin, il reste la voix. Ne multiplions pas les mots, un seul suffira : maturité. À 27 ans, Melody Gardot a la voix d’une chanteuse de 20 ou 25 ans son aînée. Miss Gardot, vous êtes absolument magnifique.