Jazz Celebration 2024, Théâtre du Châtelet, Paris
09.10.2024
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14 novembre 2021.
Après avoir séché – pour des raisons indépendantes de sa volonté – ses apparitions festivalières estivales, Arlo Parks était de retour sur les scènes françaises pour une petite tournée de quelques dates qui s’ouvrait par une soirée devant un Trabendo complet depuis plusieurs semaines et quasiment conquis d’avance. En ouverture, la chanteuse franco-brésilienne Yndi peine un peu à conquérir l’attention des spectateurs – et n’est pas aidée dans sa tâche par le malaise d’une spectatrice du premier rang, qui l’oblige à s’interrompre en pleine chanson. Dommage, car sa pop atmosphérique et sensible, qui évoque par moment les enregistrements les plus expérimentaux de Christophe, ne manque pas de charme et aurait mérité une écoute plus attentive.
Pas de difficulté de ce genre pour Arlo Parks : le public connaît visiblement par cœur son album “Collapsed in Sunbeams”, paru au début de l’année, et la chanteuse est acclamée dès qu’elle rejoint ses musiciens – trois hommes à la guitare, à la basse et à la batterie, deux femmes à la trompette et aux claviers, soit avec Parks une parfaite parité sur scène, ce qui n’arrive pas souvent ! – sur une scène décorée, de façon un peu kitsch, de fleurs et plantes en plastique. Parks, de son côté, joue la sobriété au plan vestimentaire, et les tenues fashions des photos promotionnelles laissent la place à un t-shirt et à un pantalon noirs, peut-être une façon d’indiquer que c’est la musique le sujet.
Une courte introduction instrumentale ouvre la voie à Hurt, un des titres majeurs de l’album, et c’est évidemment celui-ci qui fournit l’essentiel du répertoire de la soirée. Surprise : c’est dans un français quasi parfait que la chanteuse communique avec le public – sa mère a grandi à Paris, dit-elle –, présentant ses chansons et les conditions dans lesquelles elle les a écrites et évoquant certaines de ses influences, parmi lesquelles Patti Smith. L’orchestre resserré – il lui arrive de se produire dans des formats plus riches, y compris avec des cordes – interdit la reproduction servile des arrangements du disque et une chanson comme Too good, jouée “à l’os” – basse, batterie, guitare et quelques chœurs sur bande – y gagne en percussion, en s’offrant un final instrumental funk bienvenu. L’hymne Caroline est repris à pleine voix par un public aux anges, tandis que Angel’s song, qu’elle dit avoir écrit quand elle avait 15 ans, est traité en mode dépouillé, avec seulement l’accompagnement de la guitare.
Entre les morceaux, Parks évoque sa nervosité à l’idée de parler en français, et il est fort possible que cette nervosité ait impacté sa prestation : même si elle fait correctement le job, difficile de ne pas percevoir une certaine distance, voire un manque d’implication dans ses interprétations. Peut-être en conséquence, la setlist est abrégée d’un titre (le plus ancien Sophie) par rapport aux dates précédentes, et le concert, rappel compris, ne dure pas plus de 55 minutes, ce qui entraîne quelques marques de mécontentement à la sortie. Impression mitigée, donc, à infirmer à l’occasion d’une prochaine date – je serais surpris qu’elle ne soit pas à l’affiche des festivals d’été…
Texte : Frédéric Adrian
Photos © Frédéric Ragot