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Live reports / 19.10.2016

Roy Hargrove

Malgré une carrière discographique en sommeil depuis plusieurs années, le trompettiste Roy Hargrove reste une attraction scénique importante, et c’est un New Morning plein à craquer (à la limite du raisonnable, d’ailleurs) qui l’attendait pour son retour dans ce qui constitue sa base parisienne après que ses problèmes de santé l’ont contraint à ralentir son rythme de tournée. Le RH Factor en pause prolongée – au point qu’on se demande si celle-ci n’est pas définitive –, c’est avec son quartet de jazz acoustique, composé de partenaires de longue date (Justin Robinson au saxophone, Sullivan Fortner au piano, Ameen Saleem à la basse, Quincy Phillips à la batterie), qu’Hargrove se présente ce soir.

 


Sullivan Fortner, Justin Robinson, Ameen Saleem, Roy Hargrove, Quincy Phillips

 


Justin Robinson, Ameen Saleem, Roy Hargrove

 


Roy Hargrove

 

Ceux-ci auront d’ailleurs à faire : si on se réjouit de revoir Hargrove, il faut bien avouer qu’il n’est très clairement pas au maximum des potentialités déployées il y a quelques années. Presque constamment assis, peu communiquant, il se contente de courts solos, sur lesquels il semble par moments hésitant, laissant les développements les plus longs à son excellent pianiste – qui a d’ailleurs sorti un disque personnel très remarqué il y a quelques mois – et à son fidèle saxophoniste, au point qu’il paraisse parfois plus témoin qu’acteur de sa propre musique, même s’il dirige l’orchestre du geste et de la voix.

 


Roy Hargrove

 


Sullivan Fortner

 


Quincy Phillips

 

Difficile néanmoins de lui reprocher quoi que ce soit, tant la musique est de haut niveau (même si on aimerait parfois un peu plus de prise de risque) : tant Robinson que Fortner sont des solistes de premier plan, constamment inventifs, et la rythmique, particulièrement complémentaire, est d’une solidité à toute épreuve. Lorsque, au bout de soixante-quinze minutes, les cinq musiciens quittent la scène après une version particulièrement enlevée du tubesque Strasbourg Saint-Denis, on pense que le concert est fini, jusqu’à ce qu’une voix annonce qu’il ne s’agit que d’une pause avant un second set. Les contraintes de la vie réelle nous empêcheront de déguster celui-ci jusqu’à son terme, mais ce n’est pas faute d’apprécier l’immense musicalité des différents protagonistes, tout en se félicitant qu’un tel musicien, qui pourrait largement remplir de plus grandes salles, continue à privilégier la proximité et l’intensité des prestations en club.

Frédéric Adrian
Photos © Frédéric Ragot