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Live reports / 01.02.2016

Rhiannon Giddens

Découverte au sein des Carolina Chocolate Drops – qui semblent en sommeil –, Rhiannon Giddens s’est désormais lancée dans une carrière solo, engagée l’année dernière avec l’album “Tomorrow Is My Turn” (Nonesuch). Si elle joue ponctuellement du banjo et du violon, c’est essentiellement en tant que chanteuse qu’elle s'illustre pour ce concert parisien, qu’elle présente comme « un voyage au sein des musiques américaines raciniennes » et pour lequel elle est accompagné d’un groupe de cinq musiciens dont trois guitaristes (dont Hubby Jenkins, entendu avec les Carolina Chocolate Drops) qui pratiquent également, selon les cas, le violon, le banjo, la mandoline et les percussions.

 

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???, Jason Sypher, Jamie Dick, Rhiannon Giddens, Rowan Corbett, Hubby J. Jenkins

 

Le programme, qui comprend étonnamment peu de chansons de son album, s’ouvre sur Spanish Mary, une chanson dont elle a écrit la musique sur des paroles inédites de Bob Dylan pour le projet des “New Basement Tapes”, et se poursuit par des titres empruntés à quelques-unes des plus grandes voix de la country et du folk, de Dolly Parton à Odetta, en passant par Patsy Cline (un vibrant She’s got you) et Elisabeth Cotten (Shake sugaree). À la façon d’une Joan Baez avec qui elle partage la capacité à atteindre des aigus stratosphériques, Giddens fait preuve d’une certaine théâtralité dans ses interprétations. C’est parfois efficace, comme sur une version stupéfiante de Tommorrow is my turn, emprunté à Aznavour via Nina Simone, parfois à la limite du gênant, par exemple sur le très kitsch Under the Harlem moon d’Ethel Waters, d’autant que Giddens, malgré son expérience et ses tentatives de parler en français entre les chansons, semble très rigide.

 

 


Rhiannon Giddens, Hubby J. Jenkins

 

L’entracte, visiblement imposé par la salle à l’artiste, nuit quelque peu à la dynamique du show, mais la chanteuse parvient à garder l’attention du public jusqu’à la fin de la deuxième partie, qui inclut notamment, en clin d’œil aux Carolina Chocolate Drops, la reprise de Hit’em up style de Blu Cantrell qui avait contribué à les faire remarquer. En rappel, elle donne une version banale de La vie en rose – qu’elle lie aux attentats de novembre – avant de conclure sur un medley endiablé – mais oui – de chansons de Sister Rosetta Tharpe qui verse de façon pertinente dans le rockabilly et laisse à penser que si elle acceptait plus facilement de lâcher prise, Giddens pourrait réellement devenir une chanteuse majeure.

Frédéric Adrian
Photos © Fouadoulicious