Originaire de Memphis mais rapidement installée en Californie, c’est avec les Raelets que se fait remarquer Lillie Ford lorsqu’elle rejoint l’ensemble des choristes de Ray Charles en pleine tournée européenne après le départ brutal de Margie Hendricks. Avec le Genius, elle tourne dans le monde entier et est souvent mise en avant pendant les concerts. Sur l’album “Live in Concert”, paru en 1965, elle duettise avec son patron sur Don’t set me free (la réédition de 2011 de cet album ajoute un second duo, sur My baby (I love her yes I do)). En plus de son rôle de choriste, elle partage occasionnellement le micro avec Ray Charles en studio, par exemple sur Crying time. 

Après son départ des Raelets, elle rejoint le all star vocal Sisters Love (parfois crédité The Sisters Love), bâti autour de Merry Clayton. Réputé pour ses prestations incendiaires, Sisters Love se produit régulièrement au Caesars Palace de Las Vegas et apparaît à la télévision (Bandstand, Soul Train…) et même au cinéma, dans The Mack, un film blaxploitation avec Richard Pryor. Au plan discographique, les choses sont plus compliquées : après un single paru sur Man-Child Records, le groupe signe avec A&M – elles sont les premières artistes R&B du label – où elle publient huit singles, dont le petit succès Are you lonely?, produit par Gene Chandler. Une de leurs chansons, Now is the time, apparaît dans le film The Mack, mis n’est pas reprise sur la bande originale, créditée à Willie Hutch. 

Le groupe signe ensuite avec Motown. Plusieurs singles paraissent sous l’étiquette MoWest, la filiale West Coast du label. Malgré une réelle promotion – le groupe tourne ainsi en première partie des Jackson 5 – et la qualité de leur production (l’irrésistible Give me your love), le succès reste limité, et l’album prévu et enregistré, qui comprenait notamment une version incendiaire de Do what you gotta do emmenée par Fort, reste dans les tiroirs de Motown jusqu’en 2010, quand il est exhumé par Reel Music sous le titre “With Love”. Quelques années plus tôt, c’est Soul Jazz Records qui avait compilé des faces A&M et Mowest pour une anthologie intitulée “Give Me Your Love”. Au milieu des années 1970, le groupe tente de se réinventer sous le nom des Chocolate Kisses, mais doit se contenter d’un titre sur le projet “Disco Tex & The Sex-O-Lettes Review” de 1975. Fort s’éloigne ensuite de la musique et travaille jusqu’à sa retraite pour l’État de Californie. 

Texte : Frédéric Adrian
Photo d’ouverture : The Raelets, 1966 : (clockwise from top) Merry Clayton, Clydie King, Gwen Berry, Lillie Fort. © DR / Collection Joël Dufour