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Live reports / 09.11.2016

Idris Ackamoor and the Pyramids + Vaudou Game

Surprise : initialement programmés seuls pour cette soirée du festival Worldstock, Idris Ackamoor et les Pyramids se retrouvent finalement à assurer la première partie du groupe Vaudou Game, ajouté peu de temps avant le concert !

À 20 heures 30 pile, ce sont donc les six membres du groupe qui font leur apparition au balcon d’un théâtre fort peu rempli, dans un line-up différent de celui du récent album : outre le leader au saxophone et au synthétiseur, Sandra Poindexter est au violon, David Molina à la guitare électrique, Skyler Stover à la basse et à la contrebasse, et Sandor Moss et Raul Ramirez se partagent, selon les morceaux, la batterie et les percussions. Revêtu d’une coiffe de pharaon, Ackamoor souffle dans une sorte de trompe qui dépasse les deux mètres, tandis que le reste de son équipe se partage des flûtes, des sifflets et des percussions. Après cette introduction spectaculaire, le groupe rejoint la scène pour un set reposant largement sur le répertoire du formidable “We Be All Africans”, paru il y a quelques mois. Alors que le retour de flamme critique actuel pour le jazz spirituel des années 1970 vient un peu tard pour la plupart des figures majeures du genre, Ackamoor – seul membre historique du groupe – est en pleine forme et dirige d’une main de maître le groupe, dans une démarche d’improvisation très contrôlée. Souvent décrit comme la rencontre entre Sun Ra et Fela, la musique des Pyramids se montre à la hauteur des enjeux d’une telle étiquette, passant sans difficulté d’improvisations free débridées (Epiphany, avec ses ruptures de ton pilotées par Ackamoor) à la rigueur rythmique de l’afrobeat (We be all Africans). Loin de se contenter de reproduire la geste pionnière des années 1970, Ackamoor propose une musique vivante et contemporaine et n'hésite pas à faire appel aux merveilles de l’électronique – dans le son du guitariste David Molina notamment – et au synthétiseur, arborant même à plusieurs reprises un keytar (guitare clavier) du plus bel effet. Puisant largement dans les richesses des musiques populaires afro-américaines, Ackamoor, danseur émérite, enfilera même brièvement ses chaussures de claquettes pour un bref numéro de tap-danse ! S’il est le leader évident de l’ensemble, Ackamoor ne craint pas de laisser une large place à ses accompagnateurs, tous très impliqués. La révélation de la soirée pour moi sera la violoniste (et chanteuse ponctuelle) Sandra Poindexter dont chacune des interventions, en soliste, en rythmicienne (en pizzicato) ou à l’unisson du saxophone d’Ackamoor, éblouit de classe et d’imagination, sur un instrument pourtant risqué dans ce registre. Incroyable qu’un tel talent soit resté totalement inconnu jusqu’ici ! Au bout d’une heure de musique constamment brillante et stimulante, tout cela s’arrête, un peu tôt à mon goût, d’autant que le groupe n’aura pas le droit de faire un rappel pourtant demandé avec insistance par le public…

Après un court entracte, c’est au tour de Vaudou Game de s’installer pour un court set – une heure également – totalement identique à sa prestation du mois précédent à La Villette en première partie de l’hommage à Fela de Femi Kuti évoquée ici à l’époque. Le leader du groupe, Peter Solo, semble surpris de la maigreur du public – qui plus est assis ! – mais la puissance du vaudou funk du groupe vient vite régler le problème, et l’espace devant la scène se comble de danseurs… Pas de grande surprise à attendre pour qui les a déjà entendus, mais le groupe assure le show et la musique, pour une belle tranche de musique euphorisante, qui sonne quand même un peu légère – sans que ce soit un défaut de manière absolue – après ce qui l’a précédé…

Frédéric Adrian