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Chroniques / 20.09.2019

Brittany Howard, Jaime

Ce n’est pas la première échappée de Brittany Howard en terrain étranger à la rutilante machine Alabama Shakes. Si le groupe qu’elle a cofondé il y a dix ans quand elle était encore à la fac fait figure de solide embarcation pour cette native d’Athens (Alabama), ses projets Bermuda Triangle et Thunderbitch illustraient peut-être déjà l’envie de ce “pas de côté”. Aujourd’hui, c’est une symbolique alliance avec Jaime K. Howard dont il s’agit. Sa grande sœur, décédée prématurément d’un cancer alors qu’elles étaient encore ados, est le point de départ de cet ambitieux projet solo.

Mais c’est bien de Brittany dont parle cet album. De ses interrogations quand la trentaine est atteinte. De ses amours et de sa sexualité (Georgia), de ses croyances religieuses (He loves me). De sa propre histoire familiale parfois incomprise, couple noir et blanc dans une petite ville de l’Alabama (Goat head), de sa condition sociale, celle d’une gamine issue de la working class et qui s’est construite comme elle a pu. Une forme d’exutoire nécessaire pour cette séquence de vie déjà bien fournie. Dans le genre bien fourni, l’emballage musical de cette introspection est d’ailleurs à la hauteur de ce que l’on soupçonnait : onze titres très produits où s’articulent avec audace et un goût certain pour l’expérimentation, boucles hip-hop à l’ancienne, ballades évasives, vibrations de soul contemporaine et emphase psychédélique évoquant les fulgurances d’un Prince au top de son art.

À l’inverse de l’excellent et accrocheur single Stay high, des compositions comme Tomorrow ou 13th century metal apparaissent un peu ardues voire décousues de prime abord. Leur singularité s’apprivoise au fil des écoutes. Écriture musicale solide portée par ce grain de voix rare et cette émotion à fleur de peau qu’elle a, le temps d’un premier album solo, parfaitement su retranscrire. 

Julien D. 

Note : ★★★★½
Label : ATO/Sony Music
Sortie : 20 septembre 2019

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