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Live reports / 19.02.2016

Blick Bassy

“Akö”, son premier album pour l'inclassable label No Format, a reçu un accueil critique et public plus qu'enthousiaste depuis sa sortie au printemps 2015. Un public qui d'ailleurs ne cesse de grossir depuis que Blick Bassy défend sans relâche en France et ailleurs ce dernier projet qu'il présente comme une sorte « d'Ode bassa à Skip James », le bluesman étant à la source des titres qui ont inspiré l'album. C'est d'ailleurs en citant une anecdote sur une affiche de l'auteur de Hard time killing floor blues punaisée dans son salon que le quarantenaire camerounais, armé de son banjo et entouré de ses fidèles compagnons de route (Clément Petit au violoncelle et Johan Blanc au trombone et claviers) présente la soirée à une salle archi-comble et, étrange sensation, presque déjà conquise.

 


Clément Petit et Blick Bassy

 

Musicalement, le lien avec Skip James est plus difficile à appréhender. Si Bassy revendique son influence, les premiers titres qui nous seront offerts n’ont rien d'un “tribute to”. Mais on peut faire un rapprochement entre cette voix de tête qu'affectionne Blick Bassy et celle, si singulière, du natif du Mississippi. À l'image du disque, un choix réfléchi à été fait en matière de son et de l’ingénierie qui l'accompagne. Qu'ils soient de tempo moyen ou en forme de ballade, les titres présentés ce soir sont reconnaissable immédiatement, mais le trio en propose une adroite relecture en les allongeant, en retravaillant le découpage ou en les agrémentant de textures et d'effets sonores qui semblent envelopper encore un peu plus le spectateur dans ce drôle d’écrin, entre torpeur et… magie.

De la magie, il y en aura à plusieurs reprises. Quand un joueur de violon chinois (Guo Gan, un maître du erhu), une virevoltante danseuse ou encore la projection d'un court film en super 8 viennent se greffer aux chansons interprétées par nos trois brigands dans ce joli décor aux lumières travaillées. Un violoncelle sans archet joué en accord ou en pizzicato ouvre un titre ou en conclut un autre, parfois, c'est le gras du trombone qui est chargé de cette mission. Ailleurs, c'est la voix aérienne de Bassy qui déclenche la délicate offensive musicale. Percussions vocales, scats, grognements et hululement s'entrecroisent au fil des chansons.

 


Blick Bassy, Guo Gan, Johan Blanc

 

Blick Bassy et ses compères proposent ainsi sur scène un habile tissage sonore, entre l'esprit d'un blues minimaliste et une musique africaine moderne, ouverte sur les possibilités qu'offrent la programmation et l'électronique, par exemple. En prenant soin de garder au centre de leur démarche le chant, la voix, le message.

Texte et photos : Jules do Mar