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Brèves / 31.03.2015

Lead Belly revit

« Pas de Lead Belly, pas de Beatles » a dit un jour George Harrison. Né il y a un peu plus de cent vingt cinq ans1 près de Shreveport, en Louisiane, le musicien qui ne connut qu'une gloire posthume est l'objet cette année de toutes sortes d'hommages et de manifestations. À commencer par une exposition au Grammy Museum de Los Angeles qui s’achèvera fin mai 2015, l'édition récente d'un monumental coffret de cinq CD chez Folkways contenant seize inédits avec livre illustré de cent quarante pages, « Lead Belly: The Smithsonian Folkways Collection », enfin un documentaire d’Alan Ravenscroft intitulé Legend of Lead Belly. Du 20 au 22 avril, Eric Bibb et Jean-Jacques Milteau enregistreront avec Larry Crockett au Sunset à Paris un album live de chansons popularisées par le maître de la 12-cordes. Trois jours plus tard, le 25 avril, le Kennedy Center de Washington organisera un concert-hommage, « Lead Belly at 125 » avec Robert Plant en invité vedette ainsi qu'Alison et Viktor Krauss, Alvin Youngblood Hart, Lucinda Williams, Shannon McNally, Buddy Miller, Dan Zanes, Valerie June, Billy Hector et Josh White, Jr. Le 15 juin, nouvelle célébration musicale au Royal Albert Hall de Londres avec de nombreux musiciens dont Eric Bibb, Josh White, Jr., Jools Holland, et, comme têtes d'affiche, rien moins que Van Morrison et  Eric Burdon.


Une affiche annonçant un concert de Lead Belly à Paris en 1949. © : courtesy of WNYC.

Un temps compagnon de route de Blind Lemon Jefferson, Lead Belly fut le premier « bluesman » à se produire en France en 1949, quelques semaines avant sa mort. Il avait un répertoire considérable qui touchait à tous les genres :  field hollers, work songs, gospel, ballades, folk songs, chansons pour enfants, ragtime, chansons populaires. Particulièrement significative est l'opinion émise récemment par le musicologue Ben Sandmel dans le magazine Louisiana Cultural Vistas : « Son habileté, son dynamisme, le rythme implacable de sa 12-cordes équivalent en intensité à n'importe quel orchestre de cinq musiciens et préfigurent le funk qui apparaîtra trente ans plus tard. Et à l'écoute attentive de son Fannin' Street, on perçoit la parenté de ses solos de guitare acoustique avec ceux, électroniquement amplifiés, du rock et du R&B à venir. » Et la fête serait complète si l'une de nos chaînes de télévision pouvait se résoudre à programmer Leadbelly, la fiction que lui consacra Gordon Parks et qui retrace la vie héroïque du musicien (condamné au bagne à deux reprises) avec Roger Mosley dans le rôle-titre, film considéré comme l'un des meilleurs de 1976 par le Los Angeles Times mais boycotté par la Paramount et jamais sorti en Europe.
Jean-Pierre Bruneau

1. Ndlr : sur la base des sources récentes les plus fiables, la date de naissance de Lead Belly la plus communément admise est janvier 1888, et même si les années 1885 et 1889 sont encore également citées (mais pas 1890), il est donc né il y a un peu plus de cent vingt sept ans. Du coup, ces commémorations censées marquer les cent vingt cinq ans de sa naissance apparaissent un tantinet « décalées ». Comme nous l’avions déjà relevé à propos du Chicago Blues Festival qui célèbre cette année le centenaire de la naissance de Muddy Waters alors qu’il est né en 1913, les institutionnels semblent avoir du mal à tenir leurs fichiers à jour. Et même s’il faut louer ces initiatives qui sont des hommages mérités à nos artistes favoris, ça manque un peu de sérieux.