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Brèves / 23.05.2012

La wah-wah perd un as

Nous venons seulement de l’apprendre : le guitariste Charles « Skip » Pitts, Maître de la blaxploitation, novateur de la guitare moderne dans les domaines de la soul, du R&B et du funk, en particulier par son usage de la pédale wah-wah, est mort à 65 ans le 1er mai 2012 à Memphis (Tennessee), des suites d’un cancer du poumon. Né le 7 avril 1947 à Washington D. C., il apprend à jouer de la guitare à 11 ans, notamment avec Bo Diddley qui habite à proximité du domicile familial. Grâce à son oncle qui possède un hôtel près du Howard Theater, Pitts se trouve rapidement au contact d’artistes comme James Brown et Otis Redding, et en 1965 il fait des débuts discographiques remarqués en participant à l’enregistrement du Rainbow ’65 de Gene Chandler, qui se hisse à la deuxième place des charts R&B. Peu après, il rejoint les Midnight Movers de Wilson Pickett, pour lesquels il tient le double rôle de guitariste et de bandleader, collaborant également avec Sam & Dave puis les Isley Brothers (le riff sur It’s your thing en 1969, c’est lui). Entre-temps installé à Memphis, il devient tout naturellement un membre à part entière de l’écurie du label Stax, ce qui lui vaut de travailler avec Isaac Hayes. Le succès suit très vite avec le fameux Theme from Shaft présent sur la bande originale du film Shaft de Gordon Parks (1971, sorti en France sous le titre Les nuits rouges de Harlem), encensé par la critique et qui fera l’objet de deux suites en 1972 et en 1973, puis d’un remake en 2000. Durant près de 30 ans, Pitts poursuivra sa carrière avec Hayes jusqu’à la mort de ce dernier, survenue en 2008. Mais il ne se cantonne pas à cela, ses contributions sont nombreuses et son nom est présent sur bien des hits notables de Stax, aux côtés d’artistes variés comme Rufus Thomas, les Temprees, les Soul Children, Albert King… Plus près de nous, sachant faire preuve d’éclectisme, il participe à la formation des Bo-Keys en 1998, touche au hip hop avec des formations qui reprennent des standards Stax (dont Dr. Dre, Snoop Dogg, les Beastie Boys, Eazy-E, DJ Shadow et Cut Chemist), au blues et à la soul avec Elmo and The Shades… De plus récentes collaborations discographiques le voient aux côtés d’Al Green sur « I Can’t Stop » (2003) et de Cindy Lauper sur « Memphis Blues » (2010), des albums une fois encore très bien reçus. Enfin, décidément infatigable, Charles « Skip » Pitts apparaît également dans plusieurs films et documentaires, dont Wattstax(1973), Truck Turner (1974), Forty Shades of Blue (2005), Black Snake Moan (2006), Soul Men (2008) et Cry Baby: The Pedal That Rocks the World (2011), qui retrace l’histoire de la pédale qui l’a consacré.

Daniel Léon