Bridé par la loi sur les droits voisins, Jasmine n’a pu inclure les faces General Artists de Gus Jenkins (1963-68), pas plus que les titres inédits publiés après la date fatidique du 1er janvier 1963. Le label a tout de même pu réunir quarante-sept faces rendant parfaitement compte de l’œuvre de Jenkins et de son activité d’accompagnateur-producteur.

On le découvre en 1953 chez Specialty déjà chanteur affirmé et pianiste influencé par Walter Davis. Deux ans plus tard, sur Combo, il signe un très prenant Worries and troubles, rehaussé par la guitare de Melvin Glass. En 1956, le succès de l’instrumental Tricky change la donne. Gus Jenkins va s’obliger à poursuivre dans cette voie, imaginant des arrangements de riffs toujours plus attractifs sans négliger les parties de piano simples mais redoutablement efficaces, ainsi que de bienvenus solos de guitare (Pay day shuffle, Slow down…) ou de ténor, mais au prix parfois d’une certaine monotonie. Au verso de ces faces A, les singles présentent souvent des blues chantés avec conviction par Jenkins, parfois dans une veine à la Guitar Slim (Drift on, Gonna take time…).

Le second CD présente la quasi intégralité du label Pioneer International, aussi bien les propres enregistrements de Jenkins que ceux de son épouse (Mamie Ree, Jenkins ou Perry selon les étiquettes), dont le très surprenant Lament à l’ambiance balkanique avec violon et violoncelle, que ceux d’Alfred & Charles (des guitaristes jumeaux, adeptes de la slide hawaïenne), de Blues Slim (Neal Johnson) ou de l’excellent harmoniciste Haze Hart, disciple de Little Walter (Last time).

En l’absence de bandes officielles (sans doute disparues pour la plupart), Jasmine a fait appel à des collectionneurs (dûment remerciés) pour alimenter cette somme. La qualité sonore est tout à fait acceptable, inespérée même, et n’est-ce pas la musique qui importe ?

Jacques Périn

Note : ★★★★
Label : Jasmine
Sortie : 24 janvier 2020