Dominique Fils-Aimé, Café de la Danse, Paris
07.12.2023
;
Jour férié et salle bondée pour accueillir le Youngblood Brass Band. Après un départ en trombe avec solo de sax et trompette soulful, face à un public qui semble déjà conquis, le groupe du Wisconsin s’attaque au Electric lady de Janelle Monáe, l’occasion pour le trompettiste Mike Boman d’envoyer des attaques puissantes. Leur 20 questions qui suit est moins convaincant, la performance rap de D.H. Skogen (pilier et caisse-claire du groupe) ne manque pourtant ni d’énergie ni d’un certain savoir-faire. Enthousiasme renouvelé avec changement d’instrument pour Nat McIntosh, qui délaisse son trombone pour empoigner son euphonium et tapisser les marches vers l’extase dans une reprise surprenante et réussi : Don’t speak du groupe culte des années 90 No Doubt.
On revient ensuite à une filiation plus homogène mais sans vraiment tomber dans la facilité avec I’ll be there des Jackson 5 : si ce titre plutôt enjoué se prête parfaitement à l’énergie d’un brass band, les parties de trombones douces-amères et les autres cuivres chaleureux soulignent toute la richesse de la composition. Skogen embraye sur un autre titre rappé, l’efficace Nuclear summer, avant que déboule New blood, une des compos les plus chaloupées du YBB qui déclenche l'hystérie ! Zach Lucas délivre alors un fervent solo de sax façon spiritual jazz. Puis place à du… Justin Timberlake, avec What you got. L’un des saxophonistes passe à la flûte pour un solo furtif mais remarquable, et Skogen de clamer, sourire en coin : « Vous ne détestez pas la musique de Justin Timberlake ! » Le YBB pourrait peut-être même nous apprendre à l’aimer !
Encore plus inattendu pour qui ne connaît pas les performances scéniques de la formation, la cover du Mad world de Tears For Fears : c'est une des principales forces du groupe, reprendre des tubes pop-rock et les sublimer, les réinventer ! Ce passage est aussi le moment d'apprécier tout particulièrement les performances des percussionnistes Tom Reschke et Conor Elmes, puissants et en parfaite synchro, sans oublier le solo discret mais inspiré du soubassophone Devon Taylor.
Puis c’est Ain't no nobody de Rufus & Chaka Khan qui est célébré par la formation : la ferveur ne retombe pas, les cuivres se déchaînent à nouveau, nerveux et syncopés. Le public est en transe.
Content de terminer sa tournée dans une région où « the wine is great », le brass band revient aux racines pour le final avec un titre « appris à La Nouvelle-Orléans » il y a maintes années, Let's do it again des Staple Singers. Tout en nonchalance et bonhomie, les cuivres s'entrelacent sans effort. Une merveille.
Hugues Marly
Photos © Sébastien Souris Thibert