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Live reports / 08.05.2019

Yeah ! Nantes You Got Soul #1

Le Ferrailleur, Nantes, 28 mars 2019.

C’est un Ferrailleur rempli au maximum de sa capacité qui accueille en cette fin mars la première soirée Yeah ! Nantes You Got Soul. Le principe de son organisation est celui d’une création artistique et de la programmation d’un artiste international pour valoriser la richesse de la scène locale et souligner le faible taux de passage à Nantes de la plupart des tournées blues. Problème du côté des tourneurs, des salles ? Il s’agissait ici de montrer que c’était tout à fait possible et sans risque (toutes les places sont parties en prévente).

Arrangé par Fabrice Bessouat, l’Hommage To Aretha Franklin met la chanteuse Laurence Le Baccon en vedette, accompagnée par Julie Dumoulin, Louise Vo et Fabiola Roy aux chœurs, Yann Cuyeu à la guitare, Cédric Le Goff aux claviers, Kriss Jefferson à la basse et Fabrice lui-même à la batterie. La formation apparait sur scène et lance un groove fluide, accentué par les mouvements des choristes, joliment placées sur le devant de la scène, qui capte de suite l’attention du public et donne l’impression agréable qu’il se prépare quelque chose de fort. Laurence Le Baccon se présente ensuite au micro pendant que les choristes chantent un riff vocal qui annonce Bridge over troubled water dont Aretha avait fait une magnifique reprise. Le parti pris artistique est annoncé clairement : l’hommage sera rendu à la reine de la soul mais il ne sera ni scolaire ni standard. La suite confirme cela avec les deux piliers Chain of fools et Baby I love you, suivis du moins connu Love the one you’re with.

Laurence Le Baccon © Pierre Lesueur
Louise Vo, Fabiola Roy, Kris Jefferson © Pierre Lesueur
Laurence Le Baccon, Yann Cuyeu © Christophe Mourot

La voix légèrement fumée de Laurence se pose à merveille sur ces chansons, puissante mais avec réserve, avec de belles nuances entre douceur et pointes affirmées. Les arrangements des chœurs, pilotés par Julie Dumoulin, font merveille, il y a là un véritable instrument au service de l’ensemble, avec des soutiens, des contrechants, des riffs syncopés, de belles ondulations corporelles, qui mettent le public en mouvement. Les quatre musiciens sont présents avec un savant dosage permettant de les apprécier sans que la priorité vocale soit oubliée. Cédric Le Goff est le roi du groove, Yann Cuyeu celui du riff funky soul, et la rythmique de Kriss Jefferson et Fabrice Bessouat est une synthèse contemporaine de ce qui se faisait de mieux chez Atlantic, Stax et Hi réunis ! Natural woman, The house that Jack built, I say a little prayer, The weight, Rock steady, Don’t play that song, c’est une visite grand large du répertoire d’Aretha qui est proposée et le temps passe beaucoup trop vite. Nous sommes montés très haut, comment va se passer la suite ?

Fabrice Bessouat © Pierre Lesueur
Kris Jefferson © Pierre Lesueur
Cédric Le Goff © Christophe Mourot
© Christophe Mourot

Guy King va donner très vite la réponse : ça va très bien se passer. L’homme a du métier et sait que le public vient de vivre un moment fort, alors, soutenu par le trio Cédric Le Goff, Fabrice Bessouat et Kris Jefferson, il commence à un niveau d’intensité élevé, un Bad case of love puissant, nerveux, incisif, arpentant la scène de long en large pour se présenter au public et présenter aussi sa guitare, et son fameux jeu avec le pouce qui charme les connaisseurs et époustoufle ceux qui le découvrent. C’est un plaisir de le regarder jouer, la main droite donc, sa façon tranchante de reproduire le riff marqueur de B.B. King, mais aussi sa main gauche qui tord les cordes presque sur toute la largeur du manche. Ses solos font partie intégrante des chansons, il les joue en plusieurs sections, au milieu des morceaux, à leur fin. Son immense talent s’exprime aussi au chant, avec une voix toujours présente, des coups de gorge, de la douceur, des notes toujours tenues, sans faiblesse. C’est du blues, beaucoup de blues, comme on entend peu de nos jours, avec des compositions solides, Alone in the city, If the washing didn’t get you (The rinsing will), My happiness, des reprises appropriées, See saw, Fine little Mama, To know you is to love you, des clins d’œil tout aussi appropriés comme cette reprise de Sunny, commencé a cappella ou presque avec le seul soutien de Cédric Le Goff à l’orgue et le public qui se met spontanément à chanter, le sourire de Guy à cet instant en disant long.

Guy King © Pierre Lesueur
Guy King, Arnaud Fradin © Pierre Lesueur

Arnaud Fradin est invité sur scène pour un titre et Guy ne prend pas ça à la légère : c’est à un véritable défi entre deux excellents guitaristes que nous assistons. Là encore le temps passe vite et c’est déjà le moment du rappel. Mais alors, quel rappel ! Tous les acteurs de la soirée se retrouvent pour un Go out and get it qui restera dans les mémoires. Laurence Le Baccon et ses choristes ont les yeux qui brillent, Yann Cuyeu est plus facétieux et funky que jamais à la guitare, avec un exceptionnel solo, les compères de la rythmique sourient jusqu’aux oreilles et Guy King démultiplie encore son énergie, atteignant de nouveaux sommets musicaux et vocaux. Le public sourit lui aussi, rugit, danse, applaudit, et ne veut pas que ça se termine alors que c’est pourtant le cas. Beaucoup restent sur place pour redescendre ensemble et déjà demander quand aura lieu la deuxième édition !

© Christophe Mourot

Texte : Christophe Mourot
Photos : Pierre Lesueur et Christophe Mourot

NB : Christophe Mourot était coproducteur de la soirée.

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