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Brèves / 12.12.2018

What You Gonna Do When The World’s On Fire

Ce documentaire de deux heures aux superbes images noir et blanc (dont le titre est emprunté à un spiritualnotamment interprété par Lead Belly) constitue une étonnante plongée dans l’envers du décor du quartier noir Tremé à La Nouvelle-Orléans, gangrené par un racisme endémique, un sentiment d’infériorité distillé dès l’enfance, la misère, la violence et la peur permanente.

Le cinéaste italien Roberto Minervini qui vit à Houston a conçu son film à travers quatre séquences distinctes mais entremêlées ce qui nuit à sa lisibilité. De loin, la personnalité la plus présente et la plus intéressante du film est Judy Hill, qui tenait le bar Ooh Poo Pah Doo jusqu’en 2017. Elle crève l’écran par son aplomb et son dynamisme tout en se livrant à une terrible et bouleversante confession sur les abus sexuels dont elle fut victime, enfant, et, plus tard, sa dépendance à la drogue. Judy qui ferme son bar dont le loyer augmente à cause de la gentrification du quartier nous fait rencontrer sa mère, Dorothy, menacée d’expulsion, et un cousin, Michael Nelson, ex taulard, ex-accro au crack. Curieusement, jamais n’est mentionné le fait qu’elle appartient à l’une des grandes familles musicales de Nola, les Hills-Andrews : son père, Jesse Hill, créateur du hit Ooh poo pah doo dans les années 1960 et ses neveux, excusez du peu, Trombone Shorty, James Andrews, Glen David Andrews et le défunt Travis “Trumpet Black” Hill mort en 2015 en tournée au Japon.

Les autres séquences sont moins fortes : les Indiens de Mardi Gras avec Big Chief Kevin Goodman et ses Flaming Arrows ; une mère courage célibataire qui tente d’inculquer le droit chemin à ses deux ados ; et, enfin, partie la plus contestable du film parce qu'artificiellement plaquée, les activités du chapitre de Houston du New Black Panther Party à l’organisation très militaire, dirigé par une femme, Krystal Muhammad, qui enquête sur des meurtres de Noirs à Bâton-Rouge et à Jackson, Mississippi, et confronte la police. 

Jean-Pierre Bruneau