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Live reports / 13.07.2013

VACHE DE BLUES

Voici 13 ans que Vache de Blues existe et l’année 2013 aura encore fait honneur au talent de programmeur de Nico Vallone.

Le vendredi s’est ouvert avec Vecchi E Brutti, groupe de rock pilier de la scène locale, dont le patronyme en italien rappelle les liens historiques forts existant entre la région et l’Italie, dont beaucoup de représentants sont venus travailler dans les usines locales. Ont suivi Bo Weavil, Flyin’ Saucers Gumbo Special et Blues Power Band. Les retours de ceux qui pouvaient être là dès ce premier soir ont été unanymes : il y avait déjà le feu !
Nous sommes arrivés le samedi qui démarrait avec une master class de Marco Pandolfi pour la guitare et l’harmonica. Le groupe anglais Babajack ouvrait ensuite la petite scène. Composé de Becky Tate (vo, perc), Trevor Steger (g, hca) et Marc Miletitch (contrebasse), le groupe a la particularité de fabriquer tous ses instruments avec lesquels il interprète un blues électro-acoustique ancien, sombre, mais parfois plus éclectique puisqu’ils joueront Black Betty de Ram Jam en rappel.

 


Babajack

 

Marco Pandolfi (vo, g, hca) leur succède, accompagné du seul Frederico Panternelli à la batterie. Chicago blues classique au menu, son chaleureux, solos déliés, chant posé, ça se déguste comme du bon vin.

 


Marco Pandolfi et Frederico Panternelli

 

Le groupe belge Fried Bourbon, Steven Troch (vo, hca), Tim Lelegems (g), Chris Forget (b) et Stefan Decoene (dm), va emballer le rythme avec son jump blues, faits de reprises de blues de Chicago (Little Walter, Sonny Boy n°2), du Sud (Jerry McCain), et d’originaux, et quelques boogies dont ils se sont fait une spécialité.

 


Fried Bourbon

 

Le public est désormais debout et va le rester avec Alexx & The Mooonshiners dont le rock très musclé va faire grimper la température. Alexx se donne à fond au chant, arpente la scène dans tous les sens, provoque ses musiciens qui répondent au quart de tour. Lionel Riss est comme toujours étincelant à la guitare, et la rythmique est solide.

 


Alexx & the Moonshineers

 

La soirée se passe sur la grande scène et va commencer par une énorme claque : la Soul Gift Review de Raphael Wressnig, avec Silvio Berger à la batterie, Enrico Crivellaro à la guitare, Deitra Farr au chant et Sax Gordon au chant et au saxophone, va enflammer le public, au sens figuré et propre aussi puisque Raphael mettra le feu à son orgue en fin de concert. Ouverture en trio avec un Jelly bread très chaud, puis arrivée de Sax Gordon déchainé d’entrée avec Big & hot, extrait de son nouvel album, et entrée en scène de Deitra Farr, qui va certes s’assoir mais qui reste majestueuse dans la voix, la présence, l’autorité. À partir de là, le show bascule dans la folie, en totale fusion avec le public. R&B, soul, blues, funk, tout y passe, les riffs des uns soutiennent les solos des autres, jusqu’au feu d’artifice final, et il faudra un rappel, un peu plus calme, pour nous aider à redescendre.

 


Enrico Crivellaro, Sax Gordon, Deitra Farr et Silvio Berger


Raphael Wressnig met le feu !

 

On se dit que Malina Moye, même avec sa flatteuse réputation de « guitar heroin » et de beauté physique, va avoir du mal à prendre la suite. La dame va s’en sortir haut la main, jouant des deux caractéristiques précitées, et de son groupe de tueurs, dont la spécialité semble être le funk plus qu’autre chose. Le lien avec le blues sera très distendu, avec un seul titre véritablement dans l’idiome, quasi escamoté via une succession de clichés à la guitare. Le show est très rodé, avec les effets de guitare, la séquence érotique, le changement de combinaison, qui permettra au groupe d’être seul sur scène pour un très solide instrumental funky, ce qui peut laisser penser à un plan marketing bâti d’avance. À revoir pour confirmer.

 


Malina Moye

 

Thorbjørn Risager et son orchestre (impossible de retenir les noms malheureusement, on note juste que le trompettiste n’est pas l’habituel) vont clôturer la journée de magistrale façon. Thorbjørn en impose par la voix, il n’y en a pas beaucoup de son niveau en Europe, la présence scénique, le répertoire, même les reprises ont l’air d’être des originaux, et la qualité de ses accompagnateurs. Ça flotte ici et là mais le leader reprend facilement la main, créant un lien particulier avec le public en demandant à chacun des musiciens de dire quelques mots en français pour présenter les morceaux, et en terminant avec un Let the good times roll où il fera longuement chanter le public.

 


Thorbjørn Risager

 

Sur la route du retour à Metz, nous croisons les silhouettes d’usines qui ont fait l’actualité en 2013, dont certaines ont servi de modèle au dessinateur Baru, originaire de Villerupt, et qui a de nouveau fait l’affiche du festival cette année.

 


Lonj Trio

 

Le dimanche débute avec le Lonj Trio. Lonj, Thomas Troussier et Denis Agenet vont mettre debout le maigre public de ce milieu de journée avec leur blues roots, repris à Sonny Boy n° 2, R.L. Burnside, avec de fortes doses de John Lee Hooker. Les trois compères sont doués, heureux d’être ensemble et nous avec eux. Ils laissent la scène à la Blue Family, excellent groupe serbe au répertoire dans l’air du temps, repris à Louis Jordan, Sonny Boy n° 1, Howlin’ Wolf sur boogie Hookerien. Ils le bonifient par leur talent et quelques trouvailles comme la petite trompette dont joue aussi le leader chanteur-guitariste ou l’échange entre l’harmoniciste régulier et l’harmoniciste Ana Radzic en invitée. Tout montera encore d’un cran quand Raphael Wressning se joindra à eux pour des solos dynamisants, n’hésitant pas à jouer de la tête ou du pied !

 

 

C’est ensuite le tour des Lazy Buddies dont le look 50’s et R&B swinguant mettent rapidement le public en mouvement. Leur répertoire reprend beaucoup celui de leur CD "Play It Loud", c’est dire si le temps passe agréablement. On retient le très beau solo de Guillaume Rousseau sur le titre lent.

 


Lazy Buddies

 

Vêtements noirs et rouges, traits burinés, postures qui ne trompent pas, les Shaggy Dogs sont un vrai groupe de pub rock, en droite ligne des héros du genre, Dr Feelgood période Wilko Johnson en tête. Red au chant et à l’harmonica, Jacker à la guitare, Guillermo à la batterie et Toma à la basse vont montrer aux petits jeunes que le talent mûrit avec le temps, lequel n’a pas de prise sur l’énergie. Le bassiste Toma remporte haut la main le prix de l’attitude scénique.

 


Shaggy Dogs

 

Le temps de rejoindre la grande scène et voici Igor Prado et son orchestre, son frère Youri à la batterie, Rodrigo Mantovani à la basse, Denilson Martins, et Sax Gordon – qui s’est invité ! –, aux saxophones et Donny Nichilo au piano, qui envoient un titre de chauffe avant d’être rejoints par Lynwood Slim. L’homme est certes marqué par sa récente maladie, mais toujours très en voix et très habile à l’harmonica avec un son particulièrement chaleureux. C’est parti pour une heure et demie de R&B grand teint, fortement bluesy, enluminé de nombreux solos des uns et des autres. Lynwood fera une pause en milieu de set, l’occasion pour Igor pour montrer qu’il n’est pas seulement un guitariste d’exception mais aussi un bon chanteur. À son retour, Lynwood relance la machine à danser, au sein de laquelle le duo de saxophones d’un jour fait des étincelles. Au piano, Donny Nichilo en sourit d’aise. Le final est incandescent, le rappel avec Bloodshot eyes ne l’est pas moins. Du plaisir musical à l’état pur.


Igor Prado

 


Lynwood Slim
 

Anson Funderburgh clôt le festival avec notamment Big Joe Maher à la batterie et au chant et Christian Dozzler au piano, à l’harmonica et au chant. Toujours aussi impressionnant à la guitare, Anson pêche par son jeu de scène peu expansif. C’est l’occasion de se concenter sur la musique plus intimiste que celle des groupes précédents mais non moins prenante. Obligés de partir pour cause de route à prendre tôt le lendemain, nous manquerons le final que Nico Vallone qualifiera de « terrifiant » avec Anson, Big Joe Maher, Igor Prado, Denilson Martins, Sax Gordon, et trois rappels.

 


Anson Funderburgh



Big Joe Maher

 

Il faut aussi parler du lieu du festival, l’enceinte du collège de Villerupt, ce qui donne un site fermé, sûr et sympathique, comme un grand jardin, de l’accueil, chaleureux et serviable, de l’animation générale, avec un stand de commerce équitable, plusieurs points de restauration, avec le fameux bœuf à la guiness, et de boissons, à des prix tout à fait raisonnables.

Bravo aux organisateurs, merci à Nico Vallone pour la programmation et à l’année prochaine !

Texte et photos Christophe Mourot