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Live reports / 27.01.2012

TOULOUSE TOUT BLUES

 
Bernard Sellam (Awek) © David Foto Torres

Fondée en juin dernier, la Toulouse Blues Society a vu les choses en grand pour sa soirée d’inauguration. C’est presque un festival qu’elle a proposé, avec dix groupes et artistes qui se sont relayés pour occuper la scène du Bikini, la mythique salle toulousaine. L’occasion pour le public, venu nombreux (près de 800 personnes), d’avoir un aperçu de la richesse et de la variété de cette scène, de voir ou de revoir avec le même plaisir les valeurs sûres et de découvrir quelques nouveaux talents. Pour faire passer tout ce beau monde en quelques heures, le principe était simple : des sets très courts et des changements de plateau a minima, tout le monde jouant sur le même matériel, batterie et amplis.

Pour lancer la soirée, rien de tel que le blues très soul, ou la soul très blues, de Oli and the LP’s : un sacré groove mené par une rythmique énergique et des compos léchées, rehaussées par deux choristes. Avec pour finir des reprises de Curtis Mayfield et de Sam Cooke, autant dire qu’il a fait tout de suite très bon dans la salle. Un groupe à retrouver sur leur premier album qui paraît prochainement.


  Oli and the LP's © David Foto Torres

À peine le temps de jeter un œil aux expos de photos de Jacques Merle et de peinture de Jorge Ramirez, que déboule sur scène le deuxième groupe. Si blues il y a, celui du Eric Lavalette Band est très rock, avec des accents british. Fort de son nouvel album prometteur, “Delenda Carthago”, Eric enchaîne les morceaux, ponctués de soli de guitares qu’il partage avec Tristan Camilleri et de Greg Lamazères à l’harmonica. Après un dernier morceau ravageur, le groupe quitte la scène à regret.

 
Eric Lavalette Band © David Foto Torres

Changement d’atmosphère avec Nicolas Cassagneau et son blues du monde. Ça fait une paye que l’ancien Fly & the Tox joue seulement accompagné de sa Les Paul et de ses effets. Mais il a l’expérience et emporte le public dans son univers, du Mali aux Beatles. Ça repart de plus belle avec les Chiens Jaunes, un jeune groupe formé il y a plus de 20 ans, et leur blues électrique, relevé de clavier et une voix qu’on croirait venir du bayou. L’harmonica répond à la guitare, tout deux appuyés par une sacrée rythmique qui swingue. Après les cadors, la basse-cour, les Crazy Ducks sont de retour ! Là encore, c’est un vieux groupe reformé dernièrement qui investit le Bikini, montrant une fois de plus combien la scène blues toulousaine a été vivante il y a quelques lustres, quand les voisins n’étaient pas grincheux et les limiteurs de son n’avaient pas pris le pouvoir. Le répertoire de Rosendo Frances, accompagné d’une partie des membres originaux et de l’harmonica d’Awek, est résolument rock’n’roll ; Chuck Berry et Bo Diddley sont à l’honneur.

 
Nicolas Cassagneau © David Foto Torres

Pour cette soirée, la voix rauque et les claviers de Daniel Antoine s’étant fait porter pâles, c’est en voisin que Gaspard Ossikian arrive ensuite sur scène. Fort d’avoir accompagné les Américains Reginald Johnson ou Maurice John Vaughn et de plusieurs albums sous le bras, son Gas Band envoie du blues fort en watts, dont une reprise pourtant pas indispensable du Sud du défunt Nino Ferrer.

 
Gaspard Ossikian © Fabien Bouillet

Après un court entracte, la musique reprend ses droits avec un Awek en forme. Le répertoire du groupe est toujours aussi efficace et agréable à écouter. Pour les accompagner sur deux nouveaux morceaux, à paraître avec le nouvel album au printemps, Bernard Sellam invite le guitariste Fred Cruveiller à les rejoindre avant de laisser la scène aux Mannish Boys, qui démarrent leur set en acoustique, avec Mojo Bruno au dobro. Malheureusement, certains micros ne sont pas ouverts, et le public, qui ne peut apprécier un début de concert assez chaotique, manifeste son mécontentement. Mais les Mannish ne s’en laissent pas compter et assurent une fin de set électrifiée avec un Michaël Malazeyrat toujours aussi présent à l’harmonica.

 
  Stéphane Bertolino et Bernard Sellam © David Foto Torres


Bernard Sellam et Fred Cruveiller © David Foto Torres


Mojo Bruno (Mannish Boys) © Fabien Bouilet

Si tous les musiciens locaux ont chanté leur blues en anglais, Jeff Zima, pourtant d’origine américaine le fait en français. En trio avec batteur et contrebassiste, son jump blues aux accents new orleans fait mouche, avec son phrasé digne de Bobby Lapointe. Le public ne s’y trompe pas et le réclame pour un rappel.

 
Jeff Zima © David Foto Torres

Avant de clore la soirée avec une jam qui voit se relayer nombre de musiciens, c’est le cadet de la soirée qui s’empare de la scène. Little Peter n’a pas 30 ans, mais cela fait longtemps qu’on le croise avec sa guitare dans les bars où on tape le bœuf. Largement inspiré par Stevie Ray Vaughan, en trio comme l’était son idole, il enchaîne instrumentaux, où le public peut apprécier ses talents à la guitare, et morceaux chantés.

 
  Little Peter © David Foto Torres

Au final, cette soirée réussie a montré que le blues est plus que jamais une musique de partage. Partage entre les musiciens sur scène, dans un esprit de fraternité, mais surtout partage avec le public, de tous les âges, enchanté d’entendre la diversité et la qualité de la scène toulousaine. C’est certain, Toulouse rime à nouveau avec blues.
Philippe Dynamo