;
Live reports / 28.10.2020

Theo Lawrence, Antipode MJC, Rennes

11 octobre 2020.

Près de deux ans après une prestation remarquée et remarquable, Theo Lawrence est de retour sur Rennes ! Initialement prévu en mars 2020 à L’Ubu, ce concert est délocalisé à Antipode MJC, une salle plus adaptée aux contraintes exigées par les protocoles sanitaires en vigueur.

En deux années, de l’eau a coulé sous les ponts. Les Hearts qui accompagnaient le songwriter franco-canadien sur l’excellent “Homemade Lemonade” et la tournée qui s’en est suivie ne sont plus. La volonté de s’aventurer toujours plus loin dans les multiples chemins de l’americana matérialisée par l’enregistrement de “Sauce Piquante” courant 2019 a vu Bastien Cabezon (batterie, choeurs) et Julien Bouyssou (orgue, piano) rejoindre Thibault Ripault (guitare) et Olivier Viscat (basse). C’est cet excellent line-up que nous retrouvons donc sur scène.

Les premières mesures d’Adelita donnent d’emblée le ton : les chanceux présents comprennent qu’ils vont assister à 1h30 de très haute volée ! Si le répertoire fait évidemment la part belle aux titres du dernier album (Come on back to my love, N.O.I.S.E, les indispensables Prairie fire et The worst in me…), il compte également quelques reprises soigneusement choisies de Waylon Jennings (Stop the world and let me off), Bill Anderson (Tip of my fingers) ou The Blues Busters (Behold). Seule rescapée de “Homemade Lemonade”, A house but not a home donne lieu à une version énergique. Le choix de limiter les titres du premier LP est volontairement assumé et en cohérence avec la volonté de constamment faire évoluer et d’étoffer le répertoire au gré des inspirations de ce groupe qui ne cesse de composer et d’enregistrer que ce soit à Austin (Fort Horton Studios), à Londres (Toe Rag Studios) ou encore au Kerwax Studio sis à Loguivy-Plougras en plein cœur de la Bretagne ! C’est d’ailleurs dans ce lieu incroyable que le quintet finalise son prochain opus dont plusieurs titres (Pick the right man, Good morning Mr. blues, Cherie ou encore California poppy) sont ainsi dévoilés en exclusivité au public rennais.

Fort d’expériences emmagasinées aussi bien sur les scènes européennes que dans les clubs d’Austin comme le Little Longhorn Saloon ou le Sam’s Town Point, Theo Lawrence a indéniablement gagné en assurance. Détendu, spontané, incitant à la rêverie et à l’imaginaire, constamment soucieux de mettre en valeur les musiciens qui l’entourent, il rayonne véritablement. Un léger incident technique vient quelque peu bousculer l’ordre des choses ? Il renvoie tout le monde en coulisses et, seul sur scène, sa vénérable Martin à la main, il dégaine deux perles acoustiques dont une formidable reprise de The last thing on my mind de Tom Paxton. L’occasion (si besoin en était réellement…) de constater qu’en plus d’être un superbe chanteur, il est un redoutable guitariste au picking impeccable.

Le retour du groupe qui suit cet interlude fait entrer le concert dans une nouvelle dimension avec Evangeline et They don’t like me where I’m from magnifiées par les chorus tout simplement stratosphériques (dans tous les sens du terme !) de Thibault Ripault dont les interventions inventives et toujours finement ciselées en font le digne émule de Roy Nichols, Reggie Young ou Redd Volkaert. Évidemment, l’ensemble du band est au diapason : mêlant country soul, swamp pop, blues cajun, rock ‘n’ roll et influences tex-mex, il a formidablement repensé pour le live des morceaux initialement courts en y adjoignant de magnifiques arrangements et parties instrumentales. Le final de la perle In the back of my mind porté par les nappes de l’excellent Julien Bouyssou et les relances pleines de subtilité du non moins excellent tandem Olivier Viscat-Bastien Cabezon en est une illustration éloquente.

L’année 2020 aura malheureusement fait passer les concerts au rang de raretés… Ce qui fait donc d’un concert de Theo Lawrence une rareté parmi les raretés !

Texte : Nicolas Deshayes
Photos © Julien Dubois

Julien DuboisNicolas DeshayesTheo Lawrence