Cherise, Pop-Up du Label, Paris, 2024
09.12.2024
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8 novembre 2024.
C’est un plateau qu’on attendait avec gourmandise depuis pas mal de temps. Pour être sincère, si on avait dans notre viseur señor Joey Quiñones depuis quelques saisons déjà, jamais nous n’avions eu l’occasion de le voir se produire avec une équipe complète fraîchement débarquée de Californie. La première date d’une tournée des salles françaises pour ce doublé estampillé “sweet soul” est donc parisienne et commence le premier soir d’un week-end à rallonge. C’est d’ailleurs peut-être pour cette simple raison que ce New Morning qu’on adore fouler ne fait pas salle archicomble comme ce fut le cas dans un passé proche pour Thee Sacred Souls, cet autre combo œuvrant dans un registre similaire, devenu en quelques tours de pistes et deux LP la véritable tête de gondole actuelle de cette lowrider soul qui nourrit nos âmes et fait chavirer les cœurs.
On les croyait quartet mais ce soir ce sont six musiciens qui se présentent sur scène : The Altons ouvrent le bal, renforcés pour l’occasion par un Joey Quiñones discret en charge d’une seconde guitare et d’un clavier à part entière. Depuis ce succulent When you go (That’s when you’ll know), on se languit d’entendre d’autres compositions de ce combo soul au line-up de groupe d’indie rock. Un album est sur le point de paraître, on va donc en croquer un peu.
Les deux voix lead (Adriana Flores et Bryan Ponce) fonctionnent parfaitement et la rythmique basse-batterie assure le juste groove. Dans cette alternance de titres low, mid et même up tempo parfois, on savoure avec plaisir la première moitié de cette Soul Revue sans louper une miette des chaleureuses harmonies vocales, d’accords subtils des guitaristes comme cette frappe quasi rock de Caitlin Moss, batteuse en titre du groupe depuis ses débuts. Les singles siglés Penrose Records qu’on se met sous la dent depuis plusieurs années y passent et on jubile en direct sur Over & over, Tangled up in you, Soon enough et, enfin, ce majestueux When you go où le grain traînant de Ponce fait, comme sur disque, des merveilles.
C’est une moitié des membres de The Altons qu’on retrouve au sein du groupe suivant, Thee Sinseers. Cette fois, Joey Quiñones a changé de place… et de tenue. Pièce centrale du dispositif et acteur incontournable de cette scène musicale latino-californienne, il est entouré de huit musiciens (3 cuivres, basse, batterie, chœurs, clavier, guitares) et se révèle beaucoup moins discret vocalement que précédemment. Loquace, il taquine et harangue facilement le public entre deux titres, chante haut avec cette maîtrise pleine de retenue, plaisante avec ses musiciens et nous offre la quasi-entièreté de l’album paru un peu plus tôt en 2024. Sans oublier de saupoudrer ce copieux menu des précédents singles tel que l’excellent Seems like pour n’en citer qu’un.
Accords de guitares simples et enluminures stylées. Lignes de basse idylliques, riffs de cuivres très laidback s’autorisant momentanément un chorus, le charme de la formule est aussi à chercher dans ces breaks, négociés au bon moment, au bon tempo et qui font chalouper un New Morning fondant de plaisir au jeu de ces relances. Une marque de fabrique propre à ce registre tout en souplesse et ralenti, que viennent soutenir des chœurs dont l’exaltation n’a rien de mièvre, c’est justement tout l’inverse. Croyez-en votre serviteur, l’effet est garanti !
Tout ce soul circus m’évoque soudainement un autre Over & over (Hugging and loving) que celui joué par The Altons un peu plus tôt ce soir. Celui de Solomon Burke paru en 1976. Géniale déclaration d’amour alanguie et… d’endurance. On y est ! Sweet soul, lowrider soul ou… bedroom soul ! Envie subite d’attraper sa moitié pour roucouler au son de ces excellents Sinseers qui savent y faire en la matière. Ce soir, je suis venu avec un vieux copain, grave erreur (même si, en fan des Delfonics, il était visiblement au bon endroit).
Quasi 1h30 après la reprise, le final sera plus musclé et up tempo. Mais pas moins réjouissant. Les cuivres plongeant littéralement au milieu du public rejoint bientôt par un Joey Quiñones ruisselant qui se fait mitrailler de flashs et de sourires bienveillants. Dernier coup de caisse claire, les lumières se rallument, les visages rayonnent. Love, always!
Et cette sensation d’assister à un truc pas si banal dans le circuit de cette scène soul que les mauvaises langues ou les blasés qualifieront de revivaliste. Voilà que d’un coup je regrette de ne pas pouvoir les suivre sur les autres dates de ce french tour. La proxima vez, sans hésitations.
Texte : Julien D.
Photos © Michel Pampelune