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Chroniques / 06.03.2020

Swamp Dogg, Sorry You Couldn’t Make It

Jerry Williams Jr. nous sort enfin son album country. Ne vous attendez pas à un hommage rutilant plein de reprises et de duos prestigieux à la “Nashville” de Solomon Burke. L’approche tient beaucoup plus d’une soul indé que de l’agro-business multimillionnaire qui domine les radios country aux USA. Si Swamp Dogg se prenait d’enregistrer un disque de polka, ce serait avant tout un album de Swamp Dogg, c’est-à-dire un travail personnel, risqué et émouvant.

Justin Vernon de Bon Iver, qui avait produit son disque précédent, est encore derrière les manettes et tient la guitare. Le grand John Prine vient pour une paire de très beaux duos. Memories, dont la bande semble peu à peu rongée comme le cerveau d’un malade d’Alzheimer et Please let me go round again, plaidoyer à la fois drôle et déchirant, parviennent à évoquer la mort et la vieillesse avec justesse et sans morbidité. Les vieux grigous se gondolent en s’envoyant des vannes sous le nez de la faucheuse. La production n’essaie pas de copier les codes du genre : pas de steel guitar ni de banjo et un violon présent subrepticement sur Family pain. Les orgues de Moogstar sont toujours présents et l’ensemble est gorgé de soul. Pourtant la voix de Swamp Dogg est bien plus efficace pour évoquer l’ombre d’Hank Williams que nombre de ses émules de Nashville. I’d rather be your used to be en est la preuve saignante.

La pièce maîtresse de l’album est une reprise du Don’t take her (She’s all I got), écrit par Williams avec Gary US Bonds, dont Johnny Paycheck avait fait un hit en 1971. Le morceau est considérablement ralenti par rapport à la version de Paycheck et l’artiste y livre une performance à fois épique et vulnérable, à l’image de cet excellent album. 

Benoit Gautier

Note : ★★★★½
Label : Joyful Noise
Sortie : 6 mars 2020

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