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Live reports / 22.12.2017

Son Little

Miss Ona, cette courte parenthèse incantatoire et quasi a cappella lotie au cœur de son tout nouveau “New Magic” : ainsi Son Little entame son concert parisien. En douceur, planqué sous un chapeau mou et de larges lunettes aux verres jaunâtres d’une autre époque. Et puis lui et son trio complice basculent dans Kimberly’s mine. Relance, cohésion, souplesse… On ressent d’emblée les nombreuses heures passées ensemble sur scène à cultiver des chansons originales élaborées presque seul en studio.

 


Patrick Finerty, Son Little

 


Son Little

 

On ne sait pas comment le patron en blouson fait pour supporter la chaleur des projecteurs, mais en tout cas il navigue à l’aise dans un répertoire désormais fort consistant. On se souvient d’un concert à La Boule Noire il y a trois ans alors qu’il n’avait sorti qu’un EP et on mesure le chemin parcouru. La composante rock qu’il privilégiait alors est toujours présente mais cette fois pour densifier une approche protéiforme qui coule de source et met idéalement en valeur ses chansons. Des chansons gorgées de soul (ce timbre voilé et ce débit traînant sont deux armes fatales à même de suspendre le temps) qui tirent une force particulière d’un savant dosage entre blues (un mode mineur souvent sollicité) et groove (une batterie qui parle hip-hop).

 

 

 

Tissant des trames chamarrées avec sa belle ES-335 (il laisse la Telecaster alerte de son collègue prendre les devants pour la plupart des courts solos), Son Little nous emmène visiter presque tous les recoins de “New Magic”, l’un des grands albums de 2017. Des compos enlevées comme O me o my et Bread and butter répandent leur énergie contagieuse au même titre que ce Alice qui remonte au premier EP, dont Son Little extraira aussi l’imparable Your love will blow me away when my heart aches. The middle et Demon to the dark ont toute latitude pour laisser agir leur fort potentiel d’envoûtement. Comme ce plus ancien Doctor’s in et son riff menaçant, comme ce O mother habité.

 


Jesse Maynard, Son Little

 


Son Little, Stephen Greenberg

 

 

Et puis on frissonne dès les premières notes caressées du merveilleux Mad about you. Après un Blue magic spontanément repris par le public et un Charging bull bien corsé en mode funky rock, Son Little arrêtera à nouveau le cours du temps. Avec Lay down, évidemment. Ce bijou de ballade soul, ode au lâcher prise dans un monde qui va trop vite, reste à ce jour son titre le plus connu. Ce soir il très attendu. Alors Son Little prend tout son temps pour l’introduire et s’en amuse. Et puis, au beau milieu, face à la marée de smartphones dégainés, il se fait vindicatif : « Rangez vos téléphones, insiste-t-il, vous n’avez pas besoin de ça, vous êtes censés vivre le moment… » La Maroquinerie obtempère et s’en souviendra. Une The river courroucée met un terme à un set palpitant d’un bout à l’autre. Son Little est grand.

Texte et photos : Nicolas Teurnier

N.B. : En raison d'une voie ferrée attaquée lâchement par un arbre, notre cher photographe Frédéric Ragot n'a pas pu atteindre la Maroquinerie ce soir-là. Nous avons donc fait avec les moyens (limités) du bord.