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Live reports / 01.12.2014

SoBlues Festival

Neuf jours de blues au Mans et dans ses environs, avec une assistance variable malgré un niveau artistique élevé. Nous y avons été présents du 20 au 22 novembre, manquant donc Denis Cook Blues Power le 13 à Chahaignes, Thomas Schoeffler Jr et Otis Taylor Band le 18 à Arnage, The Kid Colling Cartel, vainqueur du prix SoBlues au tremplin blues des Rendez-Vous de l’Erdre en août, et The New Blues Generation Tour le 19 à Coulaines.

Le 20, c’est la Chapelle Saint Aubin qui accueille les amateurs pour une conférence intitulée “Blues et Flux Migratoires” donnée par votre serviteur, et le concert de Rachelle Plas. Avec Philippe Delage à la guitare (Philippe Hervouet étant absent), Philippe Gonnand à la basse, et Marc Hazon à la batterie, Rachelle joue et chante un répertoire rock empreint de blues, toute de cuir vêtue, jeu de scène dynamique, rempli de poses musclées. Audacieuse au chant, elle teste ses limites dans I’d rather go blind. À l’harmonica, elle évoque fortement Jean-Jacques Milteau, avec une vélocité impressionnante et quelques beaux passages dans les aigus. Le public apprécie et sera déçu de ne pouvoir acheter le premier CD de Rachelle, épuisé, même si le deuxième est annoncé début 2015.

 


Philippe Delage, Rachelle Plas, Marc Hazon

 

Le 21, le festival s’installe dans son lieu final, la salle des Saulnières au Mans. Manu Lanvin & The Devil Blues ouvrent le bal tout en puissance et ne vont pas quitter ce niveau d’intensité de tout leur set. Blues rock, chanson française bluesy, on entend toutes les expressions pour qualifier l’univers de Manu. Qu’il soit difficile de le décrire précisément montre la richesse de son univers et sa personnalité. Physique de jeune premier, grosse voix évocatrice, guitare moderne, jeu de scène dynamique, contact simple mais efficace avec le public, répertoire varié, en anglais et en français, générosité, Manu et son excellent duo rythmique, le fantasque Jimmy Montout à la batterie, torse nu après deux morceaux à peine, et la gracieuse Antonella Mazza à la contrebasse, n’ont aucun mal à conquérir le public qui le leur rend bien. Manu sera d’ailleurs visiblement ému en fin de concert. Les moments forts furent l’hommage à Calvin Russel, le medley Baby please don’t go / Got my mojo working avant un Gloria pas si incongru que ça en rappel.

 


Manu Lanvin

 


Antonella Mazza

 


Jimmy Montout

 

Il faut s’appeler Awek pour succéder à ça sans broncher. Vingt ans de carrière et toujours autant d’envie. Awek, c’est cette impression de se glisser dans un costume qu’on a depuis longtemps mais qui reste toujours neuf et confortable. Le quatuor toulousain égrène son répertoire, empruntant à une bonne part de ses disques, avec des reprises millésimées entrelardées, Early in the morning étant l’occasion d’un énorme solo de guitare et d’une partie d’harmonica avec une magnifique note tenue dans les aigus. Sur Don’t touch me baby, c’est Olivier Trebel qui s’illustre à la batterie, avec cette façon de jouer si particulière, les yeux levés vers le ciel, le corps bondissant. Telephone blues se transforme dès le deuxième couplet en Long distance call. Le groupe joue ensuite un inédit, Sunshine in my bedroom, qui devrait figurer sur leur prochain CD. Manu Lanvin apparaît pour I found a new love et Rock me baby (« Envoie quelque chose et on verra bien », lance-t-il à Bernard Sellam alors qu’ils cherchaient quoi jouer) puis les laisse pour le rappel qui se fait avec The hustle is on. Beauté du son, talent des musiciens, qualité du répertoire, Awek est la valeur sûre du blues français.

 


Stéphane Bertolino et Olivier Trebel

 


Manu Lanvin et Bernard Sellam

 

Le 22, la soirée commence avec une deuxième conférence de votre serviteur sur “Johnny Otis : du jazz au rock and roll”, avant de passer aux choses sérieuses avec le groupe français Buzztown, remanié puisque le chanteur saxophoniste Mike Chailloux n’est plus là, remplacé numériquement par Hugues Martineau à l’orgue, le chant étant pris par le guitariste Hugues Renault. Benjamin Jouet à la batterie et Anthony Billaud la basse sont toujours là, et Christophe Dupeu les accompagne à l’harmonica. Difficile encore une fois de trouver un seul mot pour décrire leur répertoire. Blues, rock, jazz, soul, s’y mêlent et les beaux moments abondent. Trader est très swing, I love my car est un excellent rock lent, avec de belles interactions entre la guitare et la batterie pendant le solo. Le rappel se fait avec Sons extrait de leur deuxième album.

 


Buzztown

 

La salle est chaude comme il faut pour accueillir le clou du festival, à savoir le Chicago Blues Festival, tout de suite qualifié de “Texas style”, puisque tous les participants sont texans, par nul autre que Mark “Kaz” Kazanoff, qui prend possession de la scène et du micro, avec à ses côtés Shawn Phares aux claviers, Chris Jones (fils de la vedette du jour qui l’appellera son « mini me ») à la basse et Jamil Byrom à la batterie. Un instrumental R&B en introduction, suivi d’un blues lent, de High heel sneakers qui permet d’apprécier la chant simple et efficace de Kazanoff, son saxophone nous ayant déjà enchanté les oreilles. Il le troque contre un harmonica, dont il joue tout aussi efficacement sur Hard hearted woman et Fanny Mae. Puis Andrew “Jr Boy” Jones parait, avec une belle Gibson noire pailletée, et tout finit de prendre son sens. Quel plaisir d’entendre un vrai guitariste et un vrai chanteur de blues. Pas d’esbroufe, pas de pyrotechnie, pas d’exagération sonore, juste des notes bleues et une voix profonde comme on n’en fait malheureusement presque plus. Le temps passe vite dans ces conditions et c’est la chanteuse Kerrie Lepai qui surgit et entame Big boss man. Finie l’originalité, place aux standards ? Non, car elle enchaîne sur un très beau blues lent, Whiskey drinking blues, suivi de Bad man on whiskey (un sujet qui semble la préoccuper !), et le show part dans une éblouissante dernière ligne droite dansante et bluesy. En rappel, Red beans cooking, avec un rocking solo de Shawn Phares, remettra tout le monde debout. Une magnifique clôture pour une belle programmation !

 


Mark “Kaz” Kazanoff

 


Andrew “Jr Boy” Jones

 


Chris Jones et Jamil Byrom

 


Shawn Phares

 


Kerrie Lepai

 

Texte et photos : Christophe Mourot