Robert Finley + Lowland Brothers, La Maroquinerie, Paris
01.12.2023
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Les sourires complices qui illuminent dès les premières mesures les visages de la bande à Michael League en disent long sur ce qui va suivre. Une performance de haut vol qui fait honneur à la déjà belle réputation que Snarky Puppy s'est taillée ces deux dernières années à coups de vidéos diffusées sur Internet.
Pour procéder à ce dynamitage en règle du New Morning, le collectif texan (aujourd'hui basé à Brooklyn) se présente à dix et donne la pleine mesure de son répertoire original et instrumental. Ses compos, Snarky Puppy les déploie devant nous, en prenant le temps d'en exposer les richesses. On en trouve à tous les étages : arrangements inventifs, structures surprenantes, mises en place bluffantes de précision et, surtout, un plaisir de groover ensemble des plus contagieux.
Mike Maher, Jay Jennings, Chris Bullock
Michael League
Au cœur de la fête, le jeu sobre et agile du leader bassiste opère tel un liant. Sans cesse il sollicite, relance, galvanise ses neufs acolytes qui sévissent sous forme de redoutables sections. À sa droite les guitares véloces (Mark Lettieri et Bob Lanzetti), à sa gauche les cuivres affûtés (Mike Maher et Jay Jennings aux trompettes, Chris Bullock au sax ténor). À ses côtés une garde rapprochée de claviers virevoltants sous les doigts de Cory Henry et Bill Laurance : leur maîtrise polyglotte (piano, orgue, Rhodes, Moog…) se double d'un sens aigu de la complémentarité. Mais la palme revient à la section du fond. Si le batteur Robert “Sput” Searight est un prodigieux architecte à lui tout seul, ses dialogues continus avec les percussions de Nate Werth tissent un canevas rythmique aussi foisonnant que palpitant.
Mark Lettieri, Bob Lanzetti
Cory Henry
Bill Laurance
Robert “Sput” Searight, Nate Werth
Aucune faille dans cette machine nourrie à la stimulation réciproque. Snarky Puppy sert en deux sets fumants une bonne partie du répertoire de ses deux derniers albums, “Tell Your Friends” et “GroundUp” (chroniqués dans Soul Bag n° 210). Chaque musicien est capable de solos consistants, mais au rayon des grands moments on retient avant tout des pics de jeu collectif qui soulignent le groove titubant de Slow demon, la pulsation house de Whitecap, la virée néo-orléanaise de Quarter master ou encore les cuivres envoûtants de Young stuff. Quant aux nouveaux titres comme Lingus et Shofukan, ils distillent leurs propres saveurs dans des écrins hauts en couleurs.
Cory Henry, Michael League
Robert “Sput” Searight
Jazz, funk, rock, pop ? Tout ça et bien plus encore, joué soulful et sans temps mort. Cette bande de trentenaires a un paquet de choses à dire et l'éloquence de son discours lui promet un bel avenir. La salle conquise qui finit par chanter les riffs de cuivres ne la laisse pas partir avant deux copieux rappels.
Nicolas Teurnier
Photos © Stella-K