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Live reports / 03.05.2024

Shakura S’Aida, New Morning, Paris, 2024

22 avril 2024.

On imagine à quel point la privation de concerts durant la pandémie a dû être difficile à vivre pour une artiste comme Shakura S’Aida. Elle qui tisse un lien véritablement organique avec le public, auquel elle se donne sans compter et duquel elle reçoit, en réponse, une adhésion enthousiaste. Dans son savoureux mélange d’anglais et de français, elle reviendra plusieurs fois sur cette frustration vécue, et sur son plaisir de revenir en France, un pays qu’elle a (et qui l’a) découvert(e) en 2008 et dont elle apprécie l’accueil… et la gastronomie.

Accompagnée par Aubrey Dale aux drums, Roger Williams à la basse, Paige Armstrong à la guitare, c’est Nikki D Brown qui ouvre le show. Petite boule d’énergie, elle pratique la lap steel guitar dans le style incandescent hérité des Campbell Brothers. Sa fougue, sa présence enjouée ajouteront encore à l’impact de Shakura. Perchée sur ses hauts talons, la Canadienne possède au plus haut point cette capacité à entrer progressivement dans ses chansons, à les habiter jusqu’au paroxysme. On craint souvent pour sa voix, tant elle l’emmène au bord de la rupture, mais elle connaît ses limites. 

Des titres de son dernier album sont à l’honneur, comme You’re the one (belle partie de guitare amplifiée de Paige Armstrong), (Taste like) Honey (où elle obtient la participation du public) ou la reprise du Heart of gold de Neil Young. Parmi les temps forts, il faut aussi citer Don’t tell mama where her children hide, la déchirante ballade extraite de l’album “Time”, coécrite avec Brooke Blackburn, qu’elle salue (il était initialement annoncé dans le line-up). 

À sa joie de retrouver le public français s’ajoute celui de revoir son ami Roland Tchakounté (dont nous étions aussi sans nouvelle depuis un moment) qu’elle invite sur scène. Il interprète d’abord seul une de ses compositions avant de partager le micro avec Shakura pour une version mémorable de The thrill is gone, elle, chantant en anglais, lui, dans son idiome camerounais et prenant un bon solo de guitare.

Shakura a attendu la presque fin du concert pour reprendre le sommet de son dernier album, le formidable Clap yo hand and moan, coécrit avec Keb’Mo’ et auréolé d’un chœur plaintif et gémissant. La version scénique est encore plus sidérante d’intensité et justement saluée par une longue ovation.

Fausse sortie. Tous revenaient pour un supplément festif avec Ya ya et l’attendue chanson-titre du dernier opus, Hold on to love reprise en chœur par l’assistance tandis que la scène se vidait progressivement de ses musiciens et alors que Shakura, telle la capitaine d’un navire, restait la dernière sur le pont. Mais cela n’avait rien d’un naufrage !

Texte : Jacques Périn
Photos © Miss Béa

Shakura S’Aida, Roger Williams

Roland Tchakounte, Shakura S’Aida, Aubrey Dayle

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