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Brèves / 29.11.2017

Robert “Bilbo” Walker, 1937-2017

C’est Roger Stolle (Juke Joint Festival, boutique Cat Head Delta Blues & Folk Art, auteur de documentaires, etc., à Clarksdale), qui vient de publier cette bien triste nouvelle : le chanteur, guitariste et pianiste Robert “Bilbo” Walker s’est éteint ce matin mercredi 29 novembre 2017 à l’âge de 80 ans. Certes, on le savait aux prises avec un cancer depuis plusieurs mois, mais les dernières informations en notre possession ne laissaient pas supposer une issue aussi brutale…

Né Robert Walker Jr. le 19 février 1937 sur la plantation Borden près de Clarksdale (Mississippi), il tient simplement son surnom de son père, Robert “Bilbo” Walker Sr… Mais pour éviter de les confondre, on appelle le paternel Big Bilbo et son fils Little Junior Bilbo ! Son père pianiste lui apprend d’abord les rudiments de l’instrument, mais son rejeton tâte également de la batterie avant de se mettre à la guitare à l’âge de 8 ans. Il fait ses débuts à l’église encore adolescent, mais tout s’accélère pour lui quand sa sœur commence à fréquenter un membre du groupe d’un certain Ike Turner… Il emprunte beaucoup à l’attitude de cet autre célèbre natif de Clarksdale, grâce auquel il découvre aussi les disques de Chuck Berry. Dès lors, Bilbo Walker va se forger le jeu de scène qui fera sa légende, librement inspiré des mimiques de Berry, dont bien entendu sa fameuse duck walk.

 


Utrecht Blues Estafette 1997. © Brian Smith

 

Plus tard, à partir des années 1970, Walker part tenter sa chance à Chicago, où il vit durant dix-sept ans, se produisant dans de nombreux clubs ou sur Maxwell Street, parfois sous le nom de Chuck Berry Jr. Mais il revient de temps à autre dans le Mississippi, puis, à l’occasion d’un engagement à Bakersfield, il s’installe en Californie où il s’occupe aussi d’une ferme dans laquelle il cultive des fruits et des légumes… Ces affaires agricoles et musicales marchent très bien, il en vit plus que correctement, roule dans de belles voitures et ne songe pas à enregistrer.

Mais sa réputation finit par le rattraper dans les années 1990, les promoteurs le remarquent, et à 60 ans, il va réaliser en 1997 son premier album, “Promised Land” pour Rooster Blues. Deux autres suivront : “Rompin’ & Stompin’” (1998) et “Rock The Night” (2001). Des opus débordant d’une énergie débridée plus ou moins bien contenue mais formidablement excitants… À partir de 2008, il collabore avec le producteur et musicien californien Alex “AOK” Okonski, partage son existence entre la Californie et sa région natale, mais il demeure un pilier de la scène du Delta, notamment autour de Clarksdale. Figure incontournable, Walker était un des derniers grands représentants du Delta blues électrifié. Infatigable, alors qu’il approchait les 80 ans, il venait d’ouvrir l’an dernier un juke joint dans la campagne non loin de Clarksdale, le Wonderlight Club. Il en profitera donc bien peu… Car comme l’écrit Roger Stolle en référence au titre de son premier disque, Robert “Bilbo” Walker vient de regagner sa terre promise, et on n’est pas près de l’oublier…

Daniel Léon

 


© Brian Smith