15 et 17 juin 2023.

28e édition pour Rio Loco. Un rituel. Presque un passage obligé. Un rendez-vous très attendu qui chaque année lance l’été musical de milliers de Toulousains. 

Toujours installé dans l’écrin verdoyant de la prairie des filtres, plein centre, le festival a joué cette année la carte du renouveau, sous la houlette d’un directeur nommé seulement quelques mois plus tôt, Fabien Lhérisson. Grand collectionneur de vinyles et défricheur d’espaces sonores, le nouvel homme fort de la scène toulousaine a réussi à composer en un temps record une programmation toujours aussi métissée (la marque de fabrique du festival) mais nettement plus incarnée. En témoigne cette soirée d’ouverture, placée sous le signe des voix féminines. 

Pour lancer les festivités : le groupe Altess Ego que Soul Bag avait découvert il y a quelques années sous un autre nom (The Roach). L’ossature n’a quasiment pas bougé, toujours portée par la voix puissante et revendicative de Gaëlle Blanchard, et habitée des mêmes tourments musicaux. Soul, hip-hop et légers accents trap sont venus alimenter une setlist remuante et tranchante, branchée sur un groove quasi continu, qui s’est même autorisée quelques emprunts chez des poids lourds de l’industrie (Anderson Paak, Dr Dre).

La suite de la soirée n’aura hélas pas su conserver cette même énergie. Pas le fait de la rappeuse israélienne Noga Erez, vraie belle surprise qui a su capter la foule et la grande scène avec son verbe haut et sa présence remarquable. Une énergie qui retombera vite sans qu’on s’y attende vraiment, lors de l’hommage rendu à l’immense batteur Tony Allen, décédé en 2020 à Paris. Une création collective et quasi unique, et qui restera comme un acte manqué. Afrobeat en pilote automatique, invités plutôt effacés (Oxmo Puccino et surtout Damon Albarn ont déçu), manque de rythme, de cohésion et de communion auront douché les attentes des 20 000 spectateurs qui avaient jusqu’ici, été épargnés par la pluie.

Il faudra attendre la journée du samedi pour retrouver la chaleur et la fusion sur scène, grâce à un autre hommage, cette fois appliqué, et rendu comme il se doit à Aretha Franklin. Band au diapason (Antibalas) appuyé par trois voix exceptionnelles (Robin McKelle, Alice Russell et Zara McFarlane), soit la parfaite alchimie pour interpréter les mots de la Queen of Soul. 

Texte : Mathieu Bellisario
Photos © Anna Carbonnel