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Live reports / 06.06.2018

Rick Estrin + Jason Ricci

Dans la salle du 112 à Terville, à côté de Thionville, le festival Blues On The Border est organisé par Patrick Hannak et Nicolas Vallone (ex-directeur du festival de Vache de Blues). C’est la deuxième édition cette année, qui s’étale sur trois jours avec des artistes comme Lucky Peterson, Keziah Jones, Linda Lee Hopkins, Rosedale, The Red Goes Black et, en ce vendredi soir, Rick Estrin & the Nightcats et Jason Ricci & the Bad Kind.

Rick et ses boys, Kid Andersen à la guitare et aux chœurs, Lorenzo Farrell aux claviers, qui assure aussi les basses, et Alexander Pettersen à la batterie, ouvrent la soirée. Le son de l’harmonica, de la guitare, et le rythme félin, nous mettent tout de suite en mouvement. Et quand Rick prend le chant, de cette voix malicieuse si reconnaissable, c’est la cerise sur le gâteau qu’on est venu dévorer. Looking for a womanWrap it up avec ses séquences en stop and go, installent le climat. Puis c’est l’instrumental Walterien Off the wall qui montre que Rick n’est pas qu’un amuseur. Il raconte ensuite comment il a découvert le blues, avec les disques de B.B. King, Muddy Waters et d’autres, étant rapidement marqué par les paroles, avec des choses à propos de « big fat mama with meat shaking on her bones, everytime she shakes her bones, some skinny women lose their home. » « Qu’est-ce que ça voulait dire ? », s’interroge-t-il. Il raconte qu’il a fini par trouver que tout ce langage venait du sud des États-Unis et que là-bas, les gens aimaient les fortes femmes. Et d’enchaîner sur That’s big ! 

 


Rick Estin

 


Kid Andersen

 


Alexander Pettersen

 

Kid Andersen est en vedette sur l’instrumental Mwah! qu’il enrichit d’une introduction à la We are the champions de Queen, de riffs très “surf” et, après un solo de batterie d’Alexander Pettersen, de notes de La danse du sabre ! Rick Estrin revient sur scène et sort un harmonica chromatique pour Calling all fools, qui est l’occasion d’un rare solo d’orgue de Lorenzo Farrell, puis d’un long solo d’harmonica avec des notes graves appuyées qui font rugir le public. Sur Don’t do it, Kid Andersen joue avec la guitare dans le dos, avec les dents, ou en désaccordant certaines cordes. You can’t come back permet à Rick de réincarner Sonny Boy Williamson n° 2, d’échanger en appels et répons avec le public, lui à l’harmonica, le public à la voix, avant de terminer en jouant avec l’harmonica dans la bouche.

 


Rick Estrin

 


Kid Andersen

 


Lorenzo Farrell

 

Pour annoncer le dernier morceau, il dit qu’il n’est pas possible de se quitter sans jouer du blues « lowdown » et il part dans un instrumental en rythme moyen façon Little Walter à faire se dresser tous les poils sur les bras ! Lorenzo Farrell prend un solo au piano électrique, Kid Andersen suit avec une superbe partie de guitare, c’est sublime. Le public tape dans les mains sans faiblir et Rick Estrin revient seul pour le rappel « pour cause de rébellion des membres du groupe ». Il nous gratifie alors d’un morceau solo au chant et à l’harmonica diatonique à douze trous qui met encore les poils de nos bras au garde-à-vous. 

Pendant le changement de scène, alors que Jason Ricci et ses musiciens s’installent, Rick Estrin vend ses CD sur le devant de la scène puis vient discuter tranquillement avec Jason. L’ambiance est cordiale, plaisante à regarder. Intéressant aussi de voir Jason Ricci se mettre en condition, essayant des harmonicas, arpentant la scène, chantant quelques phrases, c’est un artiste qui soigne sa concentration.

Son show démarre pied au plancher avec un blues funky sur rythme rapide dont il joue l’introduction avec une pédale d’effet qui modifie le son de son harmonica diatonique. Des pédales, il en a tout un plateau posé au sol à côté du tabouret qui supporte sa valise d’instruments, couverte d’autocollants dont le couvercle relevé dissimule le contenu aux yeux du public. Elle ne contient vraisemblablement pas que des harmonicas puisqu’il en sortira par moments une canette de boisson énergétique ou une cigarette électronique. L’homme a besoin de se ravitailler car il se donne à fond et son jeu d’harmonica véloce, puissant, doit solliciter fortement tout ce qui sert à en jouer. Le guitariste John Lisi n’est pas en reste avec un jeu tranchant, du bon côté de la force blues rock, et de la sensibilité quand il prend sa guitare métallique.

 


Jason Ricci

 

 


John Lisi

 

 

Jason n’hésite pas à théâtraliser son jeu de scène pour donner encore plus d’intensité à un soul blues lent dont il prend le solo d’abord en amplifié puis à travers le micro voix, avec une belle partie dans les aigus, avant de finir crescendo en amplifié. Le titre Biscuits propose un rythme latin et un solo d’harmonica dont l’agilité laisse pantois. Jason invite ensuite sa femme Kaitlin Dibble sur plusieurs titres dont You’ll lose a good thing sur lequel elle montre qu’elle a de la voix. Puis apparaît Kid Andersen qui prend naturellement le lead à la guitare, tout en traversant la scène pour aller examiner l’équipement des uns et des autres. Jason invite aussi l’harmoniciste Marko Balland, autre spécialiste des pédales d’effet sur l’instrument, et les deux s’expliquent sur un blues rock très funky. Deux harmonicas ne suffisant sans doute pas, Nico Vallone ajoute le sien et le show s’achève ainsi dans une ambiance folle sur un boogie blues hookerien. Après cela, le rappel en soul blues lent permet tout juste de redescendre sur terre avant de prendre le chemin du retour.

Texte et photos : Christophe Mourot

 


John Lisi, Kaitlin Dibble, Jason Ricci

 

 


Avec Marko Balland

 


Avec Marko Balland et Nico Vallone