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Hommages / 18.01.2019

Reggie Young (1936-2019)

Pendant plus de cinquante ans, du début des années 1960 au milieu des années 2010, Reggie Young a fait partie de l’aristocratie des musiciens de studios, jouant indifféremment sur des enregistrements pop, soul, rock ou country, et sa guitare orne des dizaines de tubes majeurs, du Drift away de Dobie Gray au Suspicious mind d’Elvis Presley en passant par Dark end of the street de James Carr, mais aussi d’innombrables disques obscurs. Né dans le Missouri, élevé en Arkansas, il avait fait ses débuts professionnels au sein du groupe du rocker de Memphis Eddie Bond avant de rejoindre l’orchestre du studio Royal. Il accompagne les différentes vedettes, essentiellement instrumentales à cette époque, du label Hi, parmi lesquelles Ace Cannon – décédé il y a quelques semaines – et Don Bryant, et se produit avec le Bill Black Combo, avec lequel il assure notamment la première partie de la tournée des Beatles en 1964.

En 1967, il rejoint le house band du studio American, sous la houlette du producteur Chips Moman. Surnommés les Memphis Boys, les musiciens enchaînent alors les séances à succès jusqu’au début des années 1970 pour des artistes aussi divers que Joe Tex, Bobby Womack, Wilson Pickett, Dusty Springfield, Neil Diamond ou Herbie Mann, sans oublier les légendaires sessions avec Elvis Presley dont sont issus In the ghetto et Suspicious mind. Bien que la guitare soit son instrument de prédilection, il lui arrive également d’enregistrer au sitar électrique, par exemple sur le Cry like a baby des Box Tops. Il quitte Memphis au début des années 1970 pour rejoindre Nashville où il s’impose sans difficulté dans le milieu très compétitif des studios locaux, accompagnant les plus grandes vedettes de la scène country, de Merle Haggard à Willie Nelson en passant par Waylon Jennings et Kenny Rogers, et même par Ray Charles à l’occasion de sa période country. Tant Johnny Hallyday qu’Eddy Mitchell ont eu recours à plusieurs reprises à ses services, ainsi que, en vrac, J.J. Cale, B.B. King, Dan Penn, Joe Cocker, Jerry Lee Lewis, Etta James et quelques centaines d’autres.

 


© Ace Records

 

Habitué à se produire sur scène dans le cadre d’hommages à Elvis Presley, souvent avec ses collègues des Memphis Boys, il avait attendu 2017 pour publier un premier album solo (précédé par deux singles obscurs dans les années 1960), “Forever Young”, qui avait donné un excellent prétexte à Soul Bag pour échanger longuement avec lui à l’occasion du numéro 228 (automne 2017). Ace Records publie dans quelques jours une anthologie de son travail d’accompagnateur sous le titre “Session Guitar Star” mais les 24 titres qu’elle propose ne font qu’effleurer la surface d’une œuvre que le Reggie Young Discography Project (reggieyoung.org/discography-project) tente d’inventorier à partir des notes méticuleuses tenues par le principal intéressé, reflet d’une aventure musicale qui se confond avec une vie.

Frédéric Adrian

 


© Ace Records