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Brèves / 12.10.2009

R.I.P. Freddy Robinson (Abu Talib)

Le guitariste (occasionnellement harmoniciste) et chanteur Freddy Robinson – qui avait adopté le nom d’Abu Talib lors de sa conversion à l’Islam à la fin des années 1970 – est décédé d’un cancer le 8 octobre.

Freddy Robinson était né le 24 février 1939 à Memphis et avait appris à jouer de la guitare à l’âge de 9 ans. Monté à Chicago lorsqu’il avait une vingtaine d’années, il avait pris une part importante dans le blues de la Windy City à la fin des années 1950, enregistrant notamment avec Little Walter, Jimmy Rogers et Howlin’ Wolf.

Au début de la décennie suivante, la rencontre du producteur-arrangeur-pianiste-saxophoniste Monk Higgins sera capitale pour la carrière de Freddy Robinson, les deux artistes inaugurant une collaboration qui se poursuivra jusqu’aux années 1980. Monk Higgins fera appel à Freddy Robinson pour l’accompagner à la guitare sur ses propres enregistrements ainsi que pour jouer sur de nombreuses séances pour d’autres artistes (dont Jimmy McCracklin et Bobby Bland) et produira les 5 albums que Freddy enregistrera sous son nom entre 1969 et 1974 : « The Coming Atlantis » (réédité en tant que « Black Fox ») (World Pacific Jazz), « Hot Fun in the Summertime » (Liberty), « At the Drive-In » (Enterprise), « Off the Cuff » (Enterprise). Le cinquième album ne sera publié que partiellement par Ace en 2003, dans une compilation CD des faces Enterprise de Robinson sous le titre « Bluesology ». Ces albums démontraient la souveraine versatilité de Freddie Robinson, les deux premiers, purement instrumentaux, le présentant dans un contexte jazzy sophistiqué (mais où le « groove » ne capitule jamais) tandis que les enregistrements Enterprise donnaient aussi à entendre le bluesman profond, à la voix captivante et aux rythmes « funky ».

Très sollicité en tant qu’accompagnateur pendant les années 1960-1970, Freddy Robinson a notamment enregistré avec Syl Johnson, Ray Charles, Jimmy Witherspoon ou les Crusaders, mais c’est sans doute en tant que membre éminent du formidable orchestre américain dont John Mayall avait su s’entourer au début des années 1970 que Freddy recevra sa plus importante « exposition médiatique », ayant contribué de façon essentielle à plusieurs albums de Mayall (« Jazz Blues Fusion », « Moving On », « Ten Years Are Gone »…) ou produit par lui (« The Devil’s Harmonica » de Skakey Jake Harris, « Blue’s Blues » et « Graffiti Blues » du trompettiste Blue Mitchell…).

Après sa participation à l’album de Louis Myers « Wailin’ The Blues » de 1983, Freddy Robinson semble avoir disparu de la scène musicale. Il ne refera surface (désormais sous son nom musulman) qu’en 1994 avec un CD autoproduit, « The Real Thing At Last », qui le présentait, de façon totalement convaincante, dans une veine de « country bluesman » solitaire. Ce sera son dernier disque personnel. Il n’apparaîtra plus sporadiquement que comme invité occasionnel, comme sur le CD « Nickels & Dimes » de Mitch Kashmar en 2005.

Victime d’une attaque cérébrale en 2008, Abu Talib avait dû énormément pratiquer afin de partiellement recouvrer sa virtuosité à la guitare. En septembre, il avait recommencé à se produire sur scène dans le Sud, en compagnie de son vieil ami Eddie Kirkland…
Joël Dufour