Jazz à La Villette 2024, côté jazz
19.09.2024
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25-28 juillet 2024.
Incontournable Porretta ! Trente-sixième anniversaire et superbe édition d’un festival qui, porté par la passion de son fondateur Graziano Uliani, a su garder toute son âme. Le cap est maintenu, sans concession commerciale, pour une programmation de qualité avec des artistes authentiques, parfois méconnus. Quatre jours de fête, d’échanges, de convivialité dans une joyeuse ambiance. La scène haute de seulement 30 cm et l’absence totale de barrière favorisent encore le contact entre le public et les musiciens. Un festival “organique” selon le mot d’un participant.
Jeudi
Ouverture avec les Sweethearts. Fraîcheur, fougue, énergie et beaucoup de talents, les 22 jeunes Australiennes (la plus jeune a 14 ans) délivrent un set sans temps mort. Touche néo-orléanaise : Mitch Wood les rejoint pour trois morceaux dont un swinguant Funky crawfish.
Johnny Rawls, en toute simplicité, la grande classe. Il lui suffit d’une note pour captiver, charmer son public, l’emmener dans sa Red Cadillac. Southern soul, direction Mississippi.
Chris Cain excellemment soutenu par l’orchestre de Luca Giordano. Chris Cain est certainement l’un des plus injustement sous-estimés guitaristes de blues. Influences B.B. King et Albert King, le son est magnifique, le phrasé délié et le discours toujours intéressant sur des compositions personnelles.
Captain Jack Watson victime d’une fracture du fémur a dû annuler sa venue à Porretta. Promesse faite de le recevoir en 2025.
Vendredi
Rick Hutton, l’irremplaçable MC du festival présentait son groupe. Jouant sur d’improbables instruments fabriqués avec des matériaux recyclés, le Gaudat Junk Band revisite avec enthousiasme et humour un répertoire qui va de Can’t turn you loose à Proud Mary en passant par Could you be loved. Rick et Freaky Bea se partagent les vocaux.
Miss Bee & The Bullfrogs, vainqueurs de nombreux tremplins en France, s’imposent sur la scène européenne et pour leur première fois à Porretta.
That’s the boogie woogie! retour de Mitch Woods pour un court intermède. Place ensuite au Memphis Hall Of Fame Band. Dirigé par KC Clayton, il sonne formidablement : mise en place, puissance, précision, qualité des musiciens. Tous sont d’excellents solistes et les trois choristes ne sont pas là pour faire de la figuration. Chain of fools, I’ll take you there, Rock steady, I Can’t stand the rain… Dani McGhee, Candy Fox et Shunta Mosby enflamment le public. Le Memphis hall of Fame Band n’a rien d’ un groupe de fonctionnaires et son plaisir de jouer est aussi évident que contagieux. Orchestre “maison”, il a la charge d’accompagner les invités : ex-directeur musical de Denise LaSalle à qui il a rendu hommage (Lady in the street, Down home blues) Jonathan Ellison joue régulièrement à Memphis où ses indéniables talents de chanteur et guitariste lui ont valu le titre de New King of Beale Street. Jerome Chism, le “prêcheur”, déborde d’énergie : belles et brulantes versions de Love and happiness, Hold on I’m coming, Take me to the river…
Samedi
Grand moment avec Alabama Mike et le Soul Shot de Fabrice Bessouat. Alabama Mike est l’un des plus intéressants chanteurs de blues actuels. Beau grain de voix, expressif, sans maniérisme, il interprète ses propres compositions, des compositions fortes et originales ancrées aussi dans la soul et le funk. Excellent Fat shame avec son « I’m fat, I’m lit, you can’t tell me shit » repris avec délice par le public.
Retour du Memphis Hall Of Fame Band avec ses trois chanteuses toujours bien en vedettes.
L’énergique Gerald Richardson chante, danse, va au contact du public qui lui répond et participe avec enthousiasme à sa “love funk party” .
Moment d’émotion avec Billy Vera. Acteur, écrivain, historien, chanteur, compositeur, il reprend quelques-uns de ses succès comme Room with a view, At this moment et Country girl-city man en duo avec Shunta Mosby. Graziano Uliani lui remet le Sweet Soul Award 2024.
Superbe voix, feeling intense, Wendy Moten est royale dans ses versions de Ain ’t no way, Who will your next fool be, Think… Billy Vera la rejoint pour un duo sur Storybook children, une composition enregistrée en 1967 avec Judy Clay, reconnue comme la première “interracial love song”.
Dimanche
The Commitments sur scène : le public a ovationné la “Dublin soul”. Soutenus par le Soul Shot de Fabrice Bessouat, Andrew Strong (acteur et chanteur dans le film d’Alan Parker) et Eamon Flynn et Conor Brady (musiciens dans la bande originale) se sont retrouvés pour interpréter notamment quelques titres phares du film : Mustang Sally, The dark end of the street, Try a little tenderness.
Très court passage de Mitch Woods et le Memphis Hall Of Fame Band s’installe pour deux heures de show, le grand final avec successivement Jonathan Ellison, Gerald Wilson, Billy Vera, Jerome Chism, Wendy Moten, puis tout le monde sur scène pour Take me to the river.
Standing ovation pour Graziano Uliani et rendez-vous pris pour 2025.
Texte et photos : Brigitte Charvolin