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Live reports / 27.03.2014

Otis Taylor – Harpsliders

Même si les rangs des amateurs franciliens semblaient clairsemés, les Tremblaysiens compensaient largement pour remplir cette fois encore l'Odéon scène Jean-Roger Caussimon.

Depuis leur base nordiste, les Harpsliders ont écumé toutes les scènes nationales, proposant leur prestation qui allie vieux blues millésimés et compositions personnelles à travers une formule minimaliste mais qui fonctionne parfaitement. Manu Slide passe d'une guitare acoustique au ukulélé, avec l'harmonica ou le kazoo en sautoir. Il chante aussi et présente avec humour le répertoire ou les divers instruments utilisés par son compère, Papi Washboard.


La moité des Harpsliders : Manu Slide
 

Lui semble avoir écumé vide-greniers et autres Emmaüs pour bricoler sa batterie sommaire, sa "chocolate box guitar" ou sa basse du même métal. Seul son washboard répond aux canons habituels. Ensemble, ils proposent quelques classiques oubliés de Charley Patton, Joe McCoy ou Bo Carter (l'incontournable Banana in your fruit basket !), mais leurs quelques compos originales font belle figure, et ils n'ont aucun mal à faire reprendre en chœur par le public leur seul morceau, fort réussi, en ch'timi.


L'autre moitié : Papi Washboard, ici à la basse à 2 cordes (à linge !)
 

En seconde partie, Otis Taylor est fidèle à sa réputation. Pas de demi-mesures, il attaque fort, entouré d'un groupe soudé avec des éléments qui lui sont fidèles depuis plusieurs années. Le "transe blues" qu'il revendique est bien présent dans des pièces bâties souvent sur un accord et au pouvoir incantatoire certain pour peu qu'on s'y abandonne. Cette dureté et cette austérité apparentes sont compensées par la voix d'Otis Taylor, d'une douceur étonnante venant de ce géant dont le regard bleu semble mangé par la barbe en friche et l'ombre de la casquette ! La violoniste Anne Harris apporte aussi beaucoup à la prestation, par sa présence musicale (c'est une formidable musicienne) et scénique (difficile de résister à sa grâce féline).


Anne Harris et Todd Edmunds
 

Entre chaque morceau, elle y va d'un intermède solo chaleureusement applaudi. Derrière sa batterie, Larry Thompson fait aussi un formidable travail, alliant puissance et subtilité, et s'offrant un long solo pertinent là où tant d'autres ennuient vite. Scott Taylor, le jeune guitariste (20 ans m'a-t-on dit) est aussi impressionnant de technique et de virtuosité, mais un peu démonstratif  à mon goût.  Le cheval de bataille d'Otis (et d'Hendrix !), Hey Joe est le prétexte à une longue suite de solos en mode psyché. Mais Otis Taylor est un malin, il sait ménager des pauses, accorder des respirations, il sait aussi faire participer le public et quitte la scène (avant le rappel) sur un titre particulièrement groovy où le bassiste Todd Edmunds peut enfin faire ses preuves.


Anne Harris, Todd Edmunds, Otis Taylor, Scott Taylor, Larry Thompson
 

La saison blues de la scène Jean-Roger Caussimon n'est pas terminée, il y aura encore un concert le 24 mai avec rien moins que les Immigrants (le groupe de Mike Greene) et une Texas Guitar Battle avec Anson Funderburgh, Mike Morgan et Holland K. Smith. Excusez du peu !

Jacques Périn
Photos © Miss Béa