Big Joe Louis & Friends, The Blues Kitchen, London-Shoreditch, 2024
31.10.2024
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24 mai 2022.
Même s’il n’a à son actif qu’une discographie personnelle réduite, le batteur Nate Smith s’est déjà constitué un public propre, grâce à ses prestations en tant qu’accompagnateur – en particulier aux côtés de José James, qui lui offrait à chaque concert un passage en solo – et aux très nombreuses vidéos qui circulent de ses prestations spectaculaires. C’est donc un Trabendo très bien rempli, avec un public relativement jeune, qui l’attend.
En première partie, la chanteuse et claviériste allemande KID BE KID présente en solo son électro pop décalée, entre Suicide et Soft Cell époque “This Last Night… In Sodom”. Le résultat est très éloigné des centres d’intérêts de Soul Bag et, pour être honnête, de ce que j’aime, mais la musicienne, qui bénéficie d’une quarantaine de minutes pour s’exprimer, finit par faire entrer le public dans son univers très personnel, et sa sincérité ne fait aucun doute.
Sans surprise, Nate Smith est le premier à rejoindre la scène, et à impulser le rythme avant que ses partenaires de jeu – Brad Allen Williams à la guitare, Jon Cowherd aux claviers, Fima Ephron à la basse et Jaleel Shaw aux saxophones, soit le groupe de base de l’album “Kinfolk 2: See The Birds” sorti en 2021 – le rejoignent. Les amateurs de gimmicks et de pyrotechnie resteront sur leur faim : Smith est là pour jouer les compositions de ses deux derniers albums, et c’est à ses collègues – en particulier Jalel Shaw et Jon Cowherd – qu’il délègue la majorité des solos, se contentant d’assurer, avec sa créativité habituelle et en complémentarité avec Ephron, la pulsation qui propulse chaque morceau et d’assurer de brèves introductions rythmiques.
Issu de ses deux albums, le répertoire est accessible et séduisant, sans sombrer dans la facilité, avec des morceaux bien écrits comme Altitude qui ouvre le concert et Collision, et il est facile de se laisser porter par les mélodies. S’il n’a pu emmener sur la route l’ensemble des invités de son dernier disque (Joel Ross, Michael Mayo, Stokley Williams, Vernon Reid, Regina Carter, Brittany Howard…), Smith n’est pas venu seul, et le rappeur Kokayi – en tendu notamment avec Steve Coleman – débarque au milieu du concert pour pimenter de son flow virtuose quelques titres, suivi de la chanteuse Amma Whatt, dont la voix acidulée, en contraste avec la rugosité du style de Kokayi, fait merveille sur le très beau Morning and Allison.
En second rappel, Smith revient seul pour une démonstration brève mais impressionnante de ses capacités polyrythmiques, sans pour autant céder à la tentation de faire un numéro. L’ensemble de la soirée est une réussite inconditionnelle et les conversations à la sortie des spectateurs, qui peinent à s’extraire de la musique qu’ils viennent d’entendre, sont unanimes sur la profondeur et l’intensité du moment qui vient de se passer. Le genre de soirée qui justifie le fait d’aller aux concerts…
Texte : Frédéric Adrian