Jazz Celebration 2024, Théâtre du Châtelet, Paris
09.10.2024
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12 mars 2020.
On ne sait pas encore ce soir-là que ça sera notre dernier concert avant une période indéterminée, mais heureusement les artistes présents sur scène dégagent une intensité qui réchauffe les cœurs pour longtemps. À commencer par la première partie assurée par la chanteuse et violoncelliste Kim Dee, accompagnée du beatboxer Maon : la dame possède un large répertoire, on pense un instant à Leyla McCalla, mais sa palette se veut plus urbaine, empreinte de jazz, de spoken word mais aussi de R&B et de hip-hop. Dans ses meilleurs moments, la musicienne pousse une voix à fleur de peau, et l’on frissonne sur What the hell.
Le temps d’aller chercher à boire, avant une introduction chaloupée des Gospel Sessions, et Michelle David rejoint ensuite la scène du Café de La Danse, puis entame rapidement le chaleureux Yes I am. La chanteuse tient à remercier le public au vu des récentes restrictions concernant les salles de spectacles. « We are gonna be alright », dit avec une telle bienveillance, on ne peut qu’embrasser cet état d’esprit. La suite, avec le titre Victory et sa tournure boogaloo, continue de donner raison à cet optimisme : pas besoin de savoir se déhancher avec aisance et impossible de résister à l’énergie déployée en ce début de set. Une première séquence marquée par l’éclectisme, que l’on retrouve dans le nouvel album du groupe, puisqu’on enchaîne avec une composition à la touche afrobeat, You are, au texte inspirant sur la confiance en soi.
Sur le point d’interpréter une chanson sur l’amour inconditionnel, Michelle David fait remarquer qu’elle et sa troupe sont l’idée opposée que les gens se font d’une formation gospel : « Ain’t no shame », la bonne parole est la sienne. Le rythme effréné de l’excellent Gone, gone, gone ne dit jamais le nom du seigneur mais souligne sa générosité et possède un attrait galvanisant nuancé par le chant délicat de madame David.
On revient ensuite à des inspirations proprement africaines, dont Testify et ses balancements touareg. Alors que le tempo s’accélère, notre attention se porte sur les deux guitaristes Onno Smit et Paul Willemsen pris dans leur transe, à laquelle on se joint sans réserve. Vient ensuite une annonce qui va laisser place à des chansons plus intimistes, Michelle David nous apprend qu’elle a dû combattre un cancer en 2019 ; désormais soignée, c’est l’heure de célébrer la vie. Second chance arrive donc à point nommé et, comme porté en direction d’une force supérieur, démarre de façon épurée pour s’enrichir sur la fin d’éléments supplémentaires et d’une interprétation plus intense.
C’est maintenant l’heure de réviser ses fondamentaux et de se plonger dans ce gospel funk influencé par le style Daptone, une approche que Michelle David & The Gospel Sessions maîtrisent parfaitement et qui redonne de l’ardeur à cette dernière partie de set. Inattendu, le trompettiste Luc Janssens alterne avec un synthétiseur le temps d’un beau morceau élastique et coloré.
Le concert arrive à son terme, Michelle David engage son public dans un échange qui n’a pour seul mot alléluia ! Elle insiste : « Venez me voir à la fin du concert, je ne vous repousserai pas, j’ai la foi ! » Quand il s’agit d’assister à une telle performance, son public aussi.
Texte et photos : Hugues Marly
Line-up : Michelle David (chant), Onno Smit (guitare), Paul Willemsen (guitare), Bas Bouma (batterie), Luc Janssens (trompette), Lucas Van Ee (saxophone), Claus Tofft (percussions).